En Birmanie, il existe un groupe (bouddhiste) de moines extrémistes ultranationaliste depuis juin 2013. Ce groupe se nomme Ma Ba Tha (association pour la protection de la race ou de la religion ou encore Association patriotique du Myanmar en français), serait dirigé par Ashin Wirathu (connu pour un discours ouvertement violent et antimusulman) et aurait 200 divisions administratives en Birmanie.
Ce groupe serait responsable des attaques faites à l’encontre de la minorité musulmane birmane (5%). Les habitants musulmans de la ville de Mandalay prétendent que les événements d’inimité sont datables à l’apparition de ce groupe et de leur prédécesseur (le mouvement 969). Le 969 est un nombre constitué des neuf qualités du Buddha, des six qualités du Buddha enseignant et des neuf qualités de la communauté de moines. (Zin 2015,382) Ses activités ont débuté en 2012 et Wirathu serait le dirigeant. La transition politique de 2011 serait en effet responsable de l’apparition de ses deux groupes religieux. La violence faite à l’égard des musulmans se serait amplifiée à cause des élections de 2012 remportées par le parti d’Aung San Suu Kyi. Le 969 et Ma Ba Tha développent un agenda politique similaire (mise en place d’un gouvernement central majoritairement birman et bouddhiste).
En juillet 2014, il y a eu des émeutes antimusulmanes reliée de proche ou de loin à Ma Ba Tha. L’élément déclencheur aurait été un viol d’un homme musulman à l’encontre d’une fille bouddhiste. Toutefois, Ma Ba Tha aurait démenti avoir un lien avec ces émeutes. Les révoltes religieuses, qui ont pris place à Mandalay en juillet 2014, ont été finalement montrées au grand jour qu’elles étaient planifiées par le Ma Ba Tha (avec l’implication de membres du gouvernement). Cette situation a entaché le mouvement auprès des médias locaux et du public.
Mandalay, une ville où l’hindouisme, l’islam et le christianisme sont pratiqués, est le cœur de la religion bouddhiste. « Cette ville aurait été, en effet, construite par le roi Mindon Min au 19ième siècle dans le but d’exécuter la prophétie bouddhiste stipulant que cette ville serait le centre de l’étude et du renouveau du bouddhisme. » (McPherson 2017) Ainsi, la conception de cette ville s’inscrirait dans la psyché nationale (notamment auprès de Ma Ba Tha) si bien que dans la sixième décennie, le ministère de l’information a invoqué la ville comme le «cœur indestructible de la Birmanie.» (McPherson 2017)
Ma Ba Tha a réussi à convaincre le gouvernement de ne pas intégrer la minorité rohingya dans le recensement de 2014 (le premier depuis 30 ans). De plus, le gouvernement a donné raison aux manifestations anti carte blanche organisées par les nationalistes de Ma Ba Tha en acceptant de retirer le droit d’avoir cette carte (droit de vote) à plus d’un million de personnes (principalement des Rohingyas ainsi que d’autres minorités ethniques) et ce, au début de l’année 2015. «Des « cartes vertes » ont récemment été distribuées aux musulmans de Meiktila en remplacement de leurs papiers d’identité détruits lors des émeutes ⌊de 2013⌋. Elles leur confèrent un statut de citoyen associé et les privent de nombreux droits, comme celui d’aller à l’université, de monter une entreprise ou encore de se présenter à des élections.» (Quérouil, 2017)
Le Sangha (le clergé bouddhiste) s’est toujours distanciée des activités de Ma Ba Tha (elle ne partage pas les mêmes idées) si bien qu’en mai 2017, elle leur a commandé d’arrêter leurs activités sous peine de poursuites. (RFA 2017) Dorénavant, l’organisation a changé de nom pour prendre celui de la fondation philanthropique Bouddha Dhamma. Cette association s’autoproclame comme le défenseur de la religion bouddhiste (la religion la plus répandue en Birmanie et parmi toute l’Asie du Sud-Est).
Ma Ba Tha aurait des relations avec l’armée birmane et aurait été formée pour influencer les résultats des élections de 2015 (assertion des médias). Le gouvernement d’Aung San Suu Kyi (LND, la ligue nationale pour la démocratie) serait inefficace face cette organisation (les encourage même). En effet, la couverture de l’édition de juin 2013 du Time était U Wirathu. « Thein Sein [le président de la LDN et du pays] a interdit la distribution de cette édition en Birmanie et à condamner l’histoire. » (Zin 2015, 380) Dans un communiqué, Thein Sein a même qualifier le mouvement 969 de non-violent et a l’a reconnu comme « fils de Buddha ». Malgré les demandes des officiers haut-placés de l’ONU de censurer Wirathu, aucune action n’a été menée à son encontre. (Zin 2015,380)
Des moines du mouvement Ma Ba Tha s’opposent à la révision de l’article 59 (f) qui stipule que pour accéder au poste de président et de vice-président, le candidat ne peut s’unir ou avoir une progéniture non-birmane(attaque à Aung San Suu Kyi). Le but est de prémunir la direction de la Birmanie d’un non-bouddhiste ou encore d’un musulman.
Cette organisation est la responsable d’une pétition (qui a recueillie 1,3 millions de noms) concernant quatre lois pour protéger la race et la religion bouddhiste. Cette pétition, qui est maintenant connue sous le nom des lois de la protection de la race et de la religion (limiter les changements de fois, abolir les mariages interreligieux, avoir la mainmise sur le taux de fécondité des musulmans et interdire la polygamie), s’est rendue jusqu’au pouvoir législatif en novembre 2014. En février 2015, la chambre haute s’est prononcé en concordance avec une loi stipulant l’obligation d’une autorisation des autorités locales pour les femmes bouddhistes désirant s’unir à un homme d’une autre religion et celle reconnaissant le droit de regard du gouvernement sur les naissances. Ma Ba Tha n’accepte pas les voix dissidentes si bien qu’elle a accusé la presse (The voice daily, Messenger weekly journal) et des groupes d’activistes (ex : 88 génération) d’être des « traitres », des « opportunistes » et des « réactionnaires ». (Zin 2015,383)
Wirathu anime même des rencontres pour les moines et les partisans pour leur apprendre le mode d’utilisation des réseaux sociaux pour faire connaître son emploi du temps auprès du public.
Pour visionner la bande annonce d’un documentaire sur Wirathu réalisé par Barbet Schroeder (Le véritable W) :
Sources :
Mc Pherson, Poppy. 8 mai 2017. ‘We must protect our country’: extremist Buddhists target Mandalay’s Muslims. En ligne. https://www.theguardian.com/cities/2017/may/08/buddhist-extremists-anti-muslim-mandalay-ma-ba-tha. (Page consultée le 1 juin 2017)
Quérouil, Manon. 8 juin 2017. Birmanie: quand le bouddhisme prêche la haine. En ligne. http://www.geo.fr/photos/reportages-geo/birmanie-quand-le-bouddhisme-preche-la-haine-ashin-wirathu-venerable-w-barbet-schroeder-birmanie-rohingya-175024 (Page consultée le 8 juin 2017)
RFA. 23 mai 2017. Buddhist Authorities Ban Myanmar’s Ultranationalist Ma Ba Tha Group. En ligne.http://www.rfa.org/english/news/myanmar/ban-05232017152958.html (Page consultée le 1 juin 2017)
Zin, Min. 2015. «Anti-Muslim Violence in Burma: Why Now ?». Social research: An international quarterly 82 (n°2): 375-397.