La Birmanie est un pays reconnu pour sa diversité ethnique. Le gouvernement Birman reconnait à ce jour 135 minorités ethniques, basé sur des données datant de la colonisation.[1] Alors qu’un rapprochement avait été entamé lors de la guerre d’Indépendance, l’arrivée de la junte militaire provoqua l’arrivée de la politique xénophobe de Ne Win. [2] Dès l’arrivée de la junte au pouvoir, l’importance est mis sur l’unité nationale, créant ainsi beaucoup de conflits avec les minorités ethniques. Le statut des minorités est différent et plusieurs types de citoyenneté leur sont octroyés ou parfois, la citoyenneté leur est refusée, comme dans le cas des Rohingyas.
Les tensions et les luttes avec les minorités s’inscrivent dans l’histoire nationale. Elles se sont battues contre le régime fédéral afin d’obtenir leur indépendance ou une plus grande autonomie. [3] Plusieurs communautés, principalement situées près des territoires frontaliers, détiennent des armées de rébellion comme les Shan, les Kachin, les Môn, etc. La plupart des rébellions contre l’État birman ont été très violentes, résultant très souvent à une violation des droits de l’Homme et à des déplacements forcés. Plusieurs sont devenus des migrants et, dans le cas des Kachen, ils se sont sauvés vers la frontière thaï, où il existe plusieurs camps de réfugiés. [4]
La difficulté du gouvernement birman est de rallier une ethnie bamar majoritaire aux autres minotités ethniques et constituer une vraie fédération. [5] Malheureusement, un nationalisme birman qui transcenderait et rallierait les langues et les cultures de chacun est pour le moment toujours irréalisable. [6]
Récemment, quelques avancées ont permis de faire briller la cause des minorités ethniques, mais elle reste tout de même un enjeu majeur. En 2010, la nouvelle constitution prévoyait une augmentation du degré de représentation locale et multiculturelle dans les élections. En effet, le manque de représentativité pour ces minorités demeure important. [7]
La tentative d’alliance avec les groupes ethniques armés et les minorités ethniques voulait réduire les tensions et insérer les rebelles dans les institutions. [8]Un projet politique afin d’inclure les membres armées des minorités dans les forces transfrontalières fut discuté, mais il tomba à l’eau. Dans l’État du Kachin, suite à cet événement et à l’interdiction de participer aux élections, la violence éclata. [9]
Les Rohingyas, une minorité musulmane, vivent dans la région de Rakhine, près du Bangladesh. Ils sont reconnus comme la minorité la plus persécutée par la majorité ethnique bouddhiste birmane. Ils ont perdu le droit à la citoyenneté birmane depuis la loi de 1982.[10] Ils sont désormais des apatrides. Depuis 2012, la violence entre les communautés accroît la situation précaire que vit au quotidien cette minorité. [11] En effet, forcés de se déplacer, discriminés, victimes de violence, les Rohingyas se voient refuser la citoyenneté birmane encore aujourd’hui.[12] L’État birman exerce une répression telle que les Rohingyas doivent faire face à des restrictions sur le mariage, l’éducation, leur déplacement, etc. Plusieurs membres de cette minorité vivent en tant que réfugiés au Bangladesh, en Malaisie et en Thaïlande. Ils se retrouvent complètement isolés politiquement et ne sont pas bien accueillis en tant que réfugiés.[13]
Pour l’opposition officielle, la LND, les processus de démocratisation souhaitent améliorer les relations avec les groupes ethniques. En 2012, lors de son premier discours en tant que membre du parlement, Aung Sann Suu Kyi se prononça sur la situation des minorités en Birmanie en déclarant que plus d’efforts doivent être mis pour éradiquer la violence et la pauvreté dans les communautés ethniques. [14]
Cependant, dans cette période de démocratisation et depuis la libération d’Aung San Suu Kyi, beaucoup de pressions s’exercent sur les épaules de la LND afin qu’elle améliore la situation des Rohingyas. Très impopulaire chez la majorité birmane représentant 65% de la population, la figure de la paix et de la démocratie tente de s’occuper de la situation de cette minorité sans causer de précédent. Malgré cela, beaucoup la critique de ne pas en faire assez et accuse cette dernière de négliger les Rohingyas pour conserver ses électeurs. [15]
En conclusion, le défi concernant les conflits avec les minorités ethniques est encore un enjeu important dans la politique birmane. La stabilité du pays dépend beaucoup de l’évolution des relations entre l’État et les minorités ethniques. La communauté internationale reconnait l’urgence d’agir pour réduire les souffrances des minorités.[16] Dernièrement, des pressions ont été exercées par l’ONU afin que le gouvernement s’implique davantage dans la protection des minorités ethniques et religieuses, mais plus précisément dans le cas des Rohingyas.[17] La réponse de l’ancien gouvernement fut de rejeter la résolution de l’ONU.[18] Ces derniers évènements démontrent que le défi des minorités reste un enjeu actuel en Birmanie qui évoluera probablement en même temps que la démocratisation du pays.
Reportage : « Left For Dead: Myanmar’s Muslim Minority »
[1] David I. Steinberg, « The problem of Democracy in the Republic of the Union of Myanmar : Neither Nation-State nor State-Nation», Southeast Asian Affairs (2012), 221.
[2] David I. Steinberg, « The problem of Democracy in the Republic of the Union of Myanmar : Neither Nation-State nor State-Nation», Southeast Asian Affairs (2012), 221.
[3] David I. Steinberg, « The problem of Democracy in the Republic of the Union of Myanmar : Neither Nation-State nor State-Nation», Southeast Asian Affairs (2012), 221.
[4] Alexander Horstmann,.«Sacred Spaces of Karen Refugees and Humanitarian Aid Across the Thailand-Burma Border», ASEAS – Austrian Journal of South-East Asian Studies, 4.2 (2011), 258.
[5] David I. Steinberg, « The problem of Democracy in the Republic of the Union of Myanmar : Neither Nation-State nor State-Nation», Southeast Asian Affairs (2012), 223.
[6] David I. Steinberg, « The problem of Democracy in the Republic of the Union of Myanmar : Neither Nation-State nor State-Nation», Southeast Asian Affairs (2012), 226.
[7] David I. Steinberg, « The problem of Democracy in the Republic of the Union of Myanmar : Neither Nation-State nor State-Nation», Southeast Asian Affairs (2012), 231.
[8] Alexander Horstmann,.«Sacred Spaces of Karen Refugees and Humanitarian Aid Across the Thailand-Burma Border», ASEAS – Austrian Journal of South-East Asian Studies, 4.2 (2011), 258.
[9] David I. Steinberg, « The problem of Democracy in the Republic of the Union of Myanmar : Neither Nation-State nor State-Nation», Southeast Asian Affairs (2012), 233.
[10] Syeda Naushin Parnini, «The Crisis of the Rohingyas as a Muslim Minority in Myanmar and Bilateral Relations with Bangladesh», Journal of Muslim Minority Affairs 33.2 (2013), 282.
[11] Ronan Lee, «A Politician, Not an Icon: Aung San Suu Kyi’s Silence on Myanmar’s Muslim Rohingya», Islam and Christian–Muslim Relations 25.3(2014), 321.
[12] Ronan Lee, «A Politician, Not an Icon: Aung San Suu Kyi’s Silence on Myanmar’s Muslim Rohingya», Islam and Christian–Muslim Relations 25.3(2014), 326.
[13] Ronan Lee, «A Politician, Not an Icon: Aung San Suu Kyi’s Silence on Myanmar’s Muslim Rohingya», Islam and Christian–Muslim Relations 25.3(2014), 330.
[14] Ronan Lee, «A Politician, Not an Icon: Aung San Suu Kyi’s Silence on Myanmar’s Muslim Rohingya», Islam and Christian–Muslim Relations 25.3(2014), 328.
[15] Ronan Lee, «A Politician, Not an Icon: Aung San Suu Kyi’s Silence on Myanmar’s Muslim Rohingya», Islam and Christian–Muslim Relations 25.3(2014), 327.
[16] Syeda Naushin Parnini, «The Crisis of the Rohingyas as a Muslim Minority in Myanmar and Bilateral Relations with Bangladesh», Journal of Muslim Minority Affairs 33.2 (2013), 295.
[17] Reuters, « UN Calls for Credible Burma Election, Minority Protection», The Irrawaddy, 24 novembre 2014. En ligne. http://www.irrawaddy.org/burma/un-calls-credible-burma-election-minority-protection.html (page consultée le 8 décembre 2014).
[18] Kyaw Hsu Mon, « Govt Rejects UN Calls for Rohingya Citizenship», The Irrawaddy, 21 novembre 2014. En ligne http://www.irrawaddy.org/burma/govt-rejects-un-calls-rohingya-citizenship.html (page consultée le 8 décembre 2014).