De l’ère coloniale à l’indépendance
L’essor de la nation singapourienne est marqué par le développement portuaire de la ville grâce à l’arrivée des Britanniques dans la péninsule malaise au 19ème siècle. Etablit d’abord à Penang en 1786, l’empire colonial s’étend pour rejoindre l’île en 1819, suite à l’achat d’un droit d’accès à l’île par la compagnie des Indes orientales. Sous la tutelle de Sir Thomas Stamford Raffles, les colons y boostent l’économie sur fond de querelles locales pour le partage du pouvoir ou plutôt une gestion “équitable” de celui-ci (Kratoska 2005). Singapour devient officiellement une colonie anglaise en 1867 suite à la signature des “Straits Settlements” jusqu’en 1942 où elle cèdera la place à l’occupation japonaise.
L’armée nipponne mettent le grappin sur la Malaisie et Singapour, bien qu’elle soit minoritaire face à la présence blanche. Ainsi, cet épisode marquera des années plus tard la conscience du peuple singapourien quant à la “suprématie occidentale” si vite déchue (Seng 1998, p 8-9). Très vite se forme la résistance chinoise, refusant d’être sous joug colonial et les séquelles de l’occupation simultanée en Mandchourie ne laissent pas de place à une quelconque collaboration avec l’oppresseur (Seng 1998,p 10). La “barbarie” du régime et la dégradation de la qualité de vie des singapouriens met à mal la ville. Les Britanniques reprennent le dessus en 1945 mais les dures années sous domination de l’armée nippone ont favorisé l’émancipation nationale et la lutte pour l’indépendance par le parti communiste malais -chinois. En 1955, le pouvoir colonial anglais lâche la bride, permettant de premières élections pour apaiser les tensions populaires, bien que la couronne conserve le dernier mot quant à la politique de la Cité-Etat.
A ce titre, 5 partis s’opposent: le parti progressiste en faveur du status quo, le parti démocrate en porte-voix du capitalisme, l’UMNO-MCA conservateur proche des élites coloniales, le Parti d’Action Populaire (PAP aujourd’hui à la tête du pouvoir) et le Labour Party qui remporte cette course électorale. Le PAP et son leader Lee Kuan Yew remportent la deuxième manche en 59, offrant au peuple un parti complètement indépendant. Il instaure d’emblée un système d’État providence qui jongle entre redistributions et politiques sociales, pour le bonheur du peuple. LK. Yew dynamise la ville en l’ouvrant économiquement, permettant une accélération des échanges commerciaux et l’ouvrant à l’international (Seng 98 p 2-3). Il forme également le projet d’intégrer la fédération de la Grande Malaisie mais celle-ci lui est accordée à une condition: garantir à la Couronne que toutes les identités culturelles présentes sur le territoire seront respectées et traités au même pied d’égalité afin d’éviter une guerre civile. “Une citoyenneté singapourienne contre l’ethnicité” (Kuntz 2015).
La fabrication d’une identité nationale basée sur l’autonomie des peuples et le multiculturalisme
L’ancien comptoir britannique rejoint la Fédération en 1963 mais de gros problèmes ethniques se posent à son intégration. En effet, le gouvernement de Kuala Lumpur souhaite conserver une forte identité malaisienne or la place de Singapour dans le groupe déséquilibre le nombre de sièges en faveur des chinois (Hamonic 1999, 25-27). Les tensions entre minorités s’exacerbent au point de créer des émeutes raciales rendant impossible la continuité de cette Alliance (Seng 1998, p 14). En 1965, Singapour se retire tristement de la Fédération, laissant le pays aux commandes d’un Etat fort et indépendant sous la présidence de Lee Kuan Yew (Kratoska 2005). L’identité singapourienne “tout en un” se crée: “Nous sommes en train de nous constituer en nation multiraciale. Pas une nation malaise, pas une nation indienne… sans distinction de race, de langue, de religion ou de culture. » (discours de Lee Kuan Yew, Katoska 2005).