Le soft power sud-coréen en Thaïlande

Par Karel Sauvageau

La relation d’entraide entre le Royaume de Thaïlande et la Corée remonte à très longtemps, c’est-à-dire au 14e siècle[1] lorsque le royaume de Siam avait envoyé des représentants auprès de la dynastie Goryeo. En 1949, le Royaume de Thaïlande a officiellement reconnu la République de Corée nouvellement indépendante, devenant ainsi l’une des toutes premières nations au monde à le faire. Lorsque la guerre de Corée a éclaté, le gouvernement thaïlandais avait immédiatement envoyé un régiment de l’armée royale thaïlandaise pour combattre aux côtés des troupes sud-coréennes[2]. Aujourd’hui, les deux pays ont développé une entraide culturelle et économique, ayant chacun basé leur développement économique sur une croissance[3] ainsi qu’une politique[4] d’exportations. Ils ont en effet favorisé une coopération quant à leurs activités touristiques et leurs investissements respectifs.

Figure 1 : https://fr.123rf.com/photo_59846791_puzzle-avec-le-drapeau-national-de-la-cor%C3%A9e-du-sud-et-de-la-tha%C3%AFlande-sur-un-fond-de-carte-du-monde-illu.html.

 

Coopération économique

Les deux pays partagent les valeurs communes de démocratie et d’économie de marché et ils ont étroitement coopéré au maintien de la stabilité et de la paix dans leur pays respectif. Entre autres, le Royaume est l’un des fervents partisans de la stabilité et de la paix dans la péninsule coréenne. Depuis 2003[5], ils ont convenu de propulser leurs relations bilatérales à un niveau supérieur en élargissant la coopération dans de nouveaux domaines tels que les technologies de l’information, la science et la technologie, la culture et l’éducation, tout en contribuant au maintien de l’amitié traditionnelle entre les deux peuples.

Alors que les investissements sud-coréens à l’étranger ont commencé à augmenter en 1988, de nombreuses entreprises sud-coréennes se sont installées en Thaïlande, créant ainsi un investissement totalisant plus d’un milliard de $US[6]. En 30 ans, leur commerce bilatéral a été multiplié par près de 140 fois pour atteindre 8,3 milliards de $US en 2007[7].  Le tourisme est devenu un élément crucial de leur coopération économique, avec en 2007 déjà plus de 1,1 million de Sud-Coréens qui ont visité la Thaïlande, faisant de la Corée du Sud le troisième pays effectuant le plus de visites dans le Royaume. D’autre part, la Corée du Sud est l’une des destinations touristiques préférées des Thaïlandais[8].

Figure 2 : https://www.academia.edu/24513052/KOREAN_SOFT_POWER_IN_SOUTH_EAST_ASIA_THE_CASE_OF_THAILAND_ASIANIZATION_OF_GLOBALIZATION.

En 2020, on dénombrait 400 entreprises sud-coréennes qui ont investi en Thaïlande et la valeur des échanges entre les deux pays était estimée à environ 15 milliards de $US (470 milliards de baht)[9]. Étant donné que la Thaïlande est en voie de développer un corridor économique axé sur les industries innovantes et de haute technologie, la valeur des investissements sud-coréens en Thaïlande devrait s’accélérer[10].

 

Influence culturelle

Si on compare les échanges culturels entre les deux pays en se basant sur 2015 comme année de référence, on constate que la Corée du Sud a une longueur d’avance sur le Royaume de Thaïlande en termes d’influence culturelle. Il y a eu en effet 2 fois plus de touristes sud-coréens en Thaïlande que de touristes thaïlandais en Corée du Sud. Or, il y a 3 fois et demie plus de Thaïlandais résidents en Corée du Sud que de Sud-Coréens résidents en Thaïlande et la Corée du Sud offre 3 fois moins de programmes universitaires thaïlandais que la Thaïlande offre de programmes sud-coréens. De plus, en réponse à la vague culturelle sud-coréenne, ce sont environ 80% des femmes thaïlandaises qui achètent des produits cosmétiques sud-coréens[11]. Alors que le port du costume traditionnel coréen est chose coutume pour les touristes en Corée du Sud, on peut voir ce phénomène lors d’événements dans des centres culturels sud-coréens en Thaïlande.

Figure 3 : https://www.bangkokpost.com/life/social-and-lifestyle/1854129/dining-on-success-of-the-korean-wave.

L’intérêt que possède la population thaïlandaise envers la langue coréenne n’a cessé de croître au fil des années. Étant donné l’influence culturelle sud-coréenne qui s’y est construite, apprendre le coréen en Thaïlande n’est plus uniquement un divertissement, mais c’est devenu plutôt une réelle manifestation de cette influence. On estime que plus de 40 000 élèves thaïlandais du secondaire étudient le coréen, ce qui représente le plus grand nombre d’étudiants de cette langue dans un pays autre[12] que la Corée du Sud elle-même. En réponse à l’essor de l’enseignement en coréen, le gouvernement thaïlandais organise régulièrement des concours de discours en coréen et offre l’accès au test de compétence en coréen (TOPIK) dans six villes thaïlandaises, dont Bangkok et Songkhla[13].

Figure 4 : https://www.korea.net/NewsFocus/Culture/view?articleId=174915.

Ainsi, la relation de proximité et de coopération entre la Thaïlande et la Corée du Sud a favorisé la vague culturelle sud-coréenne en Thaïlande, cette dernière qui, en Asie du Sud-Est, est le pays qui semble particulièrement apprécier la culture et la langue du pays de l’Asie de l’Est.

[1] Ministry of Foreign Affairs of the Republic of Korea, Overview of Korea-Thailand relations.

[2] Mala, Dining on success of the Korean Wave.

[3] Courmont et Mottet, L’Asie du Sud-Est Contemporaine, 112.

[4] Kim, Le Soft Power Sud-Coréen en Asie du Sud-Est : Une théologie de la prospérité en action, 39.

[5] Ministry of Foreign Affairs of the Republic of Korea.

[6] Ministry of Foreign Affairs of the Republic of Korea.

[7] Ministry of Foreign Affairs of the Republic of Korea.

[8] Ministry of Foreign Affairs of the Republic of Korea.

[9] Mala.

[10] Mala.

[11] Leveau, Korean Soft Power in Southeast Asia – The case of Thailand : Asianization of Globalization.

[12] Kim et Lee, Thailand’s interest in Korean-language education grows.

[13] Kim et Lee.

Bibliographie

Courmont, Barthélémy et Mottet, Éric. L’Asie du Sud-Est Contemporaine. Asies Contemporaines. Québec (Québec) : Presses de l’Université du Québec, 2020.

Kim, Hui-yeon. Le Soft Power Sud-Coréen en Asie du Sud-Est : Une théologie de la prospérité en action. Bangkok : Institut de recherche sur l’Asie du Sud-Est contemporaine, 2014. http://www.doi.org/10.4000/books.irasec.194.

Kim, Hyelin et Lee, Hana. « Thailand’s interest in Korean-language education grows ». KOREA.net, Ministry of Culture, Sports and Tourism and Korean Culture and Information Service, 2019. https://www.korea.net/NewsFocus/Culture/view?articleId=174915.

Leveau, Arnaud. « Korean Soft Power in Southeast Asia – The case of Thailand : Asianization of Globalization ». Research Institute of Korean Studies, Korea University, 2016. https://www.academia.edu/24513052/KOREAN_SOFT_POWER_IN_SOUTH_EAST_ASIA_THE_CASE_OF_THAILAND_ASIANIZATION_OF_GLOBALIZATION?source=swp_share.

Mala, Dumrongkiat. « Dining on success of the Korean Wave ». Bangkok Post, 2020. https://www.bangkokpost.com/life/social-and-lifestyle/1854129/dining-on-success-of-the-korean-wave.

Ministry of Foreign Affairs of the Republic of Korea. « Overview of Korea-Thailand relations » 16 janvier, 2009. https://overseas.mofa.go.kr/th-th/brd/m_3136/view.do?seq=668364&srchFr=&amp%3BsrchTo=&amp%3BsrchWord=&amp%3BsrchTp=&amp%3Bmulti_itm_seq=0&amp%3Bitm_seq_1=0&amp%3Bitm_seq_2=0&amp%3Bcompany_cd=&amp%3Bcompany_nm=&page=24.

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