Les migrations climatiques aux Philippines

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Figure 1 : Une femme marche dans les débris après le passage du typhon Haiyan aux Philippines en 2013.

Par Claire Coviaux

À la fin de l’été 2017, les Philippines ont subis une série de violents ouragans qui ont eu une grande répercussion au sein de la population civile et des médias. Ces épisodes climatiques extrêmes, dont principalement des inondations, tempêtes et cyclones tropicaux ont déplacés 2,5 millions de personnes dans l’archipel cette année [1].

Les Philippines sont composées de plus de 7 000 îles et sont régulièrement affectées par le phénomène météorologique El Nino, ce qui provoque de grandes catastrophes climatiques et place le pays comme le 9e plus vulnérable aux risques entrainés par les changements climatiques. Les variations de température touchent les productions agricoles qui deviennent irrégulières. Les effets immédiats causés par ces catastrophes climatiques sont le déplacement de milliers de personnes, dont 6 000 migrants lors du Typhon Haiyan en 2013. Les risques climatiques sont l’érosion du littoral et des récifs coralliens ainsi que la hausse des tempêtes tropicales. Les populations les plus pauvres qui habitent à proximité des littoraux, des cours d’eau et des flancs de montagnes sont les plus vulnérables face à l’élévation du niveau de la mer. Cette hausse pourrait submerger certaines îles de faible altitude et les habitants qui y habitent. L’augmentation des températures entraine l’instabilité de la production alimentaire et la vulnérabilité des populations locales pour l’accès à l’eau potable. Les typhons causés par les changements climatiques touchent principalement les populations défavorisées dans des zones géographiques à risque, ce qui amplifie les risques sanitaires et de maladies déjà préexistants et affecte la production en termes d’impacts économiques [2].

Les populations locales philippines sont touchées par les typhons, la hausse des températures, l’augmentation des précipitations, la baisse des productions agricoles, les pressions pour l’accès à l’eau potable, l’aggravation des risques de santé, et les femmes sont souvent encore plus touchées selon les perspectives de genre. Ces populations défavorisées sont forcées à la migration et à la relocalisation pour s’adapter face aux conséquences des changements climatiques sur leurs ressources agricoles et côtières, ainsi que leur milieu de vie. Les philippins qui font le choix de migrer essayent de trouver un emploi et soutiennent financièrement leurs familles [3].

La montée et la baisse du niveau de la mer causée par les changements climatiques est aussi un enjeu primordial pour mesurer plus précisément les migrations liées à la hausse des deltas et canaux. L’évolution du niveau de la mer et des précipitations peut aussi avoir des conséquences néfastes sur les dépôts de sédiments, ce qui aggraverait l’érosion des côtes, augmenterait les températures et les épisodes de sécheresses [4].

Cependant, les catastrophes naturelles ne dépendent pas uniquement du seul facteur climatique et sont bien souvent aggravées par des circonstances sociétales, économiques et politiques. Ainsi fin 2004, quatre cyclones et dépressions tropicales ont affecté la côte orientale de l’île de Luçon au nord des Philippines et ont causé la mort de plus de 1 600 personnes. Au-delà du seul fait climatique, les facteurs de croissance démographique trop importantes, le difficile accès à la terre, la corruption gouvernementale, le contrôle des ressources par l’élite, l’exploitation forestière illégale ont aggravés la situation des populations locales défavorisées face aux catastrophes naturelles causées par les changements climatiques, ainsi que les infrastructures vétustes qui ne résistent pas aux changements climatiques extrêmes [5].

Les déplacements de populations lors des migrations climatiques n’ont fait que croître aux Philippines entre 2008 et 2014 et touchaient principalement les victimes de tempêtes tropicales à 81.6% et d’inondations à 15.8%. Les typhons sont aussi la source des plus grands flux de déplacements, alimentent des migrations récurrentes avec des impacts à long-terme et la région du nord des Philippines est la plus touchée. [6].

Pourtant, les communautés locales, ainsi que les organisations nationales et internationales viennent au secours des populations déplacés pour les relocaliser et leur procurer de l’aide à court, moyen ou long terme. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) s’intéresse principalement à la construction d’abris d’urgence, au rétablissement rapide des populations locales et des zones géographiques affectées, à l’accès à l’eau potable et à l’hygiène, à l’éducation, à la sécurité alimentaire, à la logistique, à la santé, à la construction de camps, à la nutrition et protection des population déplacés, au rétablissement des milieux de vie, à l’agriculture, à la coordination, aux rétablissement des communications d’urgence et avec les communautés, ainsi qu’à la sécurité des populations déplacés [7]. Les migrations apportent aussi des changements dans les rôles traditionnels donnés aux femmes car leur indépendance financière, leurs contributions économiques sont renforcées et elles jouent un rôle fondamental dans les stratégies de développement pour reconstruire leur village ou aider leur communauté [8].

Bibliographie

Ionesco, Dina, Daria Mokhnacheva et François Gemenne. 2017. The Atlas of Environmental            Migration. Londres : Routledge.

[1] Alice Baillat, « Les Migrations Climatiques à l’Épreuve du « Schisme de réalité ».

[2] Développement et Paix, « Chaud Devant : Impacts Des Changements Climatiques Dans Les Pays Du Sud Et Recommandations Pour Une Action Du Canada ».

[3] Développement et Paix, « Chaud Devant : Impacts Des Changements Climatiques Dans Les Pays Du Sud Et Recommandations Pour Une Action Du Canada ».

[4] Richard P. Mateo Zenon et Fernando P. Siringan, «Tectonic Control of High-Frequency Holocene Delta Switching and Fluvial Migration in Lingayen Gulf Bayhead, Northwestern Philippines  »

[5] Jean-Christophe Gaillard, Catherine C. Liamzon et Emmanuel A. Maceda, « Retour sur les causes d’une catastrophe : pourquoi plus de 1 600 morts aux Philippines fin 2004 ? ».

[6] Internal Displacement Monitoring Centre, « Global Estimates 2015 : People displaced by disasters ».

[7] UNHCR, « Philippines : Typhoon Haiyan Action Plan ».

[8] Dina Ionesco, Daria Mokhnacheva et François Gemenne, « The Atlas of Environmental Migration ».

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