Vers la fin du XXe siècle, le système politique indonésien sera remis en question. Le Nouvel Ordre de Suharto, bien qu’il ait assuré une croissance économique substantielle aux Indonésiens, les a progressivement brimés de leurs droits. Avec la fin de la Guerre Froide, plusieurs pays de la région vivront un retour à la démocratie; les Indonésiens verront là une chance d’exprimer plus ouvertement leur mécontentement avec ce régime qu’ils verront de plus en plus comme étant véritablement autoritaire. Par ailleurs, l’Indonésie perdra l’appui international alors que l’occupation violente du Timor oriental sera vue d’un mauvais oeil par la communauté internationale au cours des années 1990 marquées par la volonté de résolution de conflits. Le mécontentement social croissant atteindra son apogée en 1996, lorsque des manifestations éclateront partout à Jakarta face à la répression d’un des partis d’opposition, mené ironiquement par la fille du président Suharto.
Dans le contexte de la crise économique asiatique de 1997, la situation économique de l’Indonésie, qui était autrefois très forte, s’est détériorée. La dette nationale a pris une ampleur démesurée, alors que la prévalence du domaine manufacturier a précarisé la situation de travail de plusieurs habitants. La pauvreté urbaine a donc subi une croissance énorme, et les conditions de travail, malgré un taux de chômage bas, se sont fragilisées: la présence et la pression des syndicats s’est donc concrétisée dans un contexte où l’économie se basait principalement sur l’exportation de matières premières.
La situation financière de la majorité de la population s’est aussi détériorée à cause de la corruption inhérente au régime de Suharto. Dans le contexte des campagnes de privatisation des années 1980, l’administration de Suharto accordait ses contrats de manière essentiellement clientéliste, surtout aux amis ethniquement chinois du régime, ce qui nuit au développement de la région. Cet avantage social conféré aux Indonésiens ethniquement chinois rend la société indonésienne en général dépendante de leur investissement économique, ce qui exacerbera les tensions ethniques chez la majorité musulmane, surtout considérant que ceux-ci ne peuvent pas s’organiser librement en un parti politique pour exprimer leur mécontentement. Ainsi, le gouvernement perdra complètement l’appui de la population et Suharto se retirera en 1998. S’ensuivra une transition plus paisible que la dernière (1965-1966) où l’Indonésie retrouvera enfin un système démocratique.
Schwarz, A. (1997). Indonesia after Suharto. Foreign Affairs, 76(4), 119-134. https://www.jstor.org/stable/20048126