Vietnam : discrimination envers la minorité LGBT dans les écoles

Par Anna Dauray

Le harcèlement des étudiants de la communauté LGBTQ+ est commun dans les écoles vietnamiennes. L’organisation « Human Rights Watch » (HRW) a rencontré des étudiants LGBTQ+ dans diverses écoles. Plusieurs rapportent qu’un grand nombre de leurs collègues et professeurs utilisent un vocabulaire dénigrant envers eux et le reste de la communauté LGBTQ+. Certains racontent qu’en plus des abus verbaux, ils ont été menacés de violence . Une étude faite par l’organisation « Center for Creative Initiatives in Health and Population (CCIHP) » démontre que l’acte de violence la plus commune envers les personnes LGBTQ+ est le harcèlement verbal. D’autres types de violence sont aussi communs, 16 % des étudiants interviewés ont subi des violences physiques comme se faire attaquer avec des pierres, des briques ou se sont fait battre et 19 % rapportent avoir subi du harcèlement sexuel ou des viols.[2] Sur les 52 enfants et jeunes adultes interviewés par l’HRW, 40 disent que leurs professeurs font des remarques haineuses envers les personnes LGBTQ+. Le commentaire le plus fréquent traite de l’homosexualité et le définit comme une « maladie mentale ». La fausse croyance que l’attirance homosexuelle est une maladie mentale qui peut être diagnostiquée, traitée et qu’ils peuvent en « guérir » se fait sentir partout au Vietnam. Cela met en évidence l’échec du gouvernement, et des associations professionnelles de la santé du Vietnam, à communiquer le fait que l’attraction sexuelle n’est pas une « maladie mentale », mais bien une variance naturelle de la sexualité.[3]

Couverture du livre « My teacher Said I Had a Disease » [Human Rights Watch/ Sally Deng, 2020]

Peu d’accès à l’information dans les écoles

Les étudiants LGBTQ+ qui subissent de l’hostilité à la maison et par leurs collègues ont besoin d’accéder à de l’information et des ressources qui valident leurs identités. Cependant, très peu des étudiants interviewés par « Human Rights Watch » sentent que leur école donne un accès adéquat aux informations et ressources sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et sur la communauté LGBTQ+. En 2014, un rapport sur les droits des personnes LGBTQ+ au Vietnam de « United Nations Development Programme » mentionne que les institutions scolaires ne sont pas sécuritaires pour les étudiants LGBTQ+. Aucune politique contre la discrimination et contre le harcèlement envers le genre et l’orientation sexuelle ne les protègent. Par ailleurs, l’éducation sexuelle sur le genre et sur l’orientation sexuelle est limitée au Vietnam et les professeurs évitent d’en parler, étant donné que c’est considéré comme un sujet sensible. Quand les leçons sur le sujet de la communauté LGBTQ+ sont incluses, elles sont souvent mises à la fin des manuels et ignorées des éducateurs. Les étudiants LGBTQ+ n’obtiennent donc pas leur information et l’accès aux ressources nécessaire à leur bien-être à l’école.[4]

 

Étudiants futurs de la société

Afin de créer les conditions nécessaires pour que les personnes LGBTQ+ aient des vies heureuses, la société en générale et particulièrement les étudiants doivent avoir une vision, une attitude et des comportements positifs envers cette communauté.[5] Les étudiants sont le futur de la société et sont ceux qui pourront changer celle-ci. Les recherches de Van Tuan démontrent que la majorité des étudiants vivant dans Hô Chi Minh-Ville voient positivement les personnes LGBTQ+. Cependant, ce n’est pas le cas pour un petit pourcentage des étudiants et ceux-ci ont des comportements négatifs envers les membres de la communauté LGBTQ+.[6] En revanche, la discrimination de la communauté LGBTQ+ ne se trouve pas seulement dans les écoles. Les hommes gais et les femmes transgenres subissent beaucoup de discrimination.[7] Les discriminations prennent plusieurs formes. Des hommes qui ont dévoilé leur homosexualité ont perdu leur emploi et ont été exclus de leurs groupes sociaux. Ils sont sujets à de la violence physique et certains sont forcés à subir des « traitements » pour les « guérir » de leur homosexualité.[8] Il y a un manque d’information concernant la communauté LGBTQ+. Les faits concernant les personnes LGBTQ+ n’étaient pas vu dans les écoles et les médias n’en parlait que rarement. Toute sexualité non hétérosexuelle était taboue au Vietnam. Jusqu’à récemment les relations homosexuelles étaient considérées comme un fléau social au même titre que la prostitution et l’utilisation de drogues.[9] Les recherches de Hoang et Nguyen, publiées en 2012, révèlent que les jeunes personnes gaies et transgenres qui subissent de l’intimidation ont un taux élevé de dépression et de suicide.[10] Les femmes lesbiennes font aussi face aux stigmates. Certaines ont été victimes de violences physiques et sexuelles, comme des viols « guérisseurs ».[11] La grande majorité des personnes LGBTQ+ cachent donc leur orientation sexuelle et identité de genre.[12] En changeant la vision que les étudiants ont envers ces personnes, ceux-ci pourront changer la société pour qu’elle soit plus sécuritaire pour les membres de la communauté.

Parade de la fierté gai au Vietnam [AFP/Hoang Dinh Nam, 2015]

Changements

La situation de la communauté LGBTQ+ s’améliore lentement au Vietnam. La visibilité publique des gens LGBTQ+ et les organisations civiles de la communauté ont augmenté. Des millions d’utilisateurs de médias sociaux montrent ouvertement qu’ils sont LGBTQ+. Le premier défilé de fierté gaie a eu lieu en 2012 et le deuxième l’année suivante malgré les restrictions légales sur les rassemblements pacifiques. En 2000, les mariages gais étaient illégaux. En 2012, le gouvernement a reconsidéré la loi des familles pour peut-être inclure les mariages gais.[13] En 2014, la loi sur le mariage et la famille a changé pour décriminaliser les mariages gais, mais ils ne sont toutefois pas reconnus. En 2015, le Code civil a enlevé l’interdiction aux personnes transgenre de changer leur sexe légal, cependant ils ne fournissent pas un accès transparent et facile à la procédure.[14]

Le gouvernement vietnamien a une relation neutre avec la communauté LGBTQ+. Les autorités tolèrent le mouvement des droits LGBTQ+, car ils ne font de mal à personne, leur mobilisation est très pacifique et le mouvement ne sert pas un parti politique en particulier.[15] Les autorités ne perçoivent pas les problèmes contre lesquels la communauté LGBTQ+ vietnamienne se bat comme un problème politique. Les militants LGBTQ+ sont des jeunes des villes, éduqués, polis et qui ne confrontent pas les autorités. Les normes sociales et l’attitude envers l’homosexualité changent de plus en plus. Ce changement arrive plus vite et plus clairement dans les grandes villes.[16] Les nombreux défilés et les manifestations paisibles de la communauté LGBTQ+ changent petit à petit l’image négative en une image positive des personnes LGBTQ+ aux yeux de la société vietnamienne. Les dialogues entre les autorités et la communauté LGBTQ+ ont permis au gouvernement d’avoir une vision plus réaliste de celle-ci. L’image positive qui s’est construite avec le gouvernement a permis aux communautés LGBTQ+ de discuter ouvertement à propos de leurs droits.[17]

Références

[1] Human Rights Watch. 2020.

[2] UNDP, USAID. 2014.

[3] Human Rights Watch. 2020.

[4] Ibid.

[5] Van Tuan, P. 2020.

[6] Ibid.

[7] Hoang and Nguyen 2012; Hoang, Dinhand Nguyen 2011; iSEE 2009a,2010b, 2012.

[8] CCIHP 2013; Hoang, Dinhand Nguyen 2011;iSEE 2009b, dans Oosterhoff P., Hoang T. et Thu Quach T. 2014.

[9] Hoang Ha, 2013.

[10] Oosterhoff P., Hoang T. et Thu Quach T. 2014.

[11] CSAGA 2010; iSEE 2010a.

[12] Blanc 2005 ; Institute for Social Development Studies. 2004. dans Oosterhoff P., Hoang T. et Thu Quach T. 2014.

[13] Oosterhoff P., Hoang T. et Thu Quach T. 2014.

[14] Human Rights Watch. 2020.

[15] Oosterhoff P., Hoang T. et Thu Quach T. 2014.

[16] Ibid.

[17] iSEE Institute. 2017.

Bibliographie

Hoang Ha Y. Public perceptions on LGBT issues in modern Vietnam. 2013 https://core.ac.uk/download/pdf/268100906.pdf

Human Rights Watch. “My Teacher Said I Had a Disease” Barriers to the Right to Education for LGBT Youth in Vietnam. 2020. https://www.hrw.org/sites/default/files/report_pdf/vietnam0220_web.pdf

iSEE Institute. Vietnam Context Analysis Report on human rights, health and well-being of Vietnamese LGBT community. 2017. https://static1.squarespace.com/static/526c21b5e4b0d43e45f6c4c2/t/59c18ff38a02c77cab2e26e0/1505857530763/Country+Context+Analysis+Vietnam.pdf

Oosterhoff P., Hoang T. et Thu Quach T. Negotiating Public and Legal Spaces: The Emergence Hoi An LGBT Movement in Vietnam. 2014. https://core.ac.uk/download/pdf/29134882.pdf

UNDP, USAID. Being LGBT in Asia: Viet Nam Country Report. Bangkok. 2014. https://www.usaid.gov/sites/default/files/documents/1861/Being_LGBT_in_Asia_Viet_Nam_report_ENG.pdf

Van Tuan, P. (2020). AWARENESS, ATTITUDES AND BEHAVIORS IN COMMUNICATION WITH THE LGBT COMMUNITY OF STUDENTS IN HO CHI MINH CITY, VIETNAM. PalArch’s Journal of Archaeology of Egypt/Egyptology, 17(4), 328-338.

Lien pour marque-pages : Permaliens.

Les commentaires sont fermés