L’Indonésie face à un dilemme entre développement durable et performances économiques

Par Hugo Ballesteros

L’Indonésie dispose d’un atout économique considérable, son sous-sol regorge de ressources naturelles, ce qui en fait un territoire très prisé par les investisseurs étrangers (Andrews, 2003). Pour ce dragon qui a eu énormément de mal à se relever de la crise de 1997, ces matières premières valent très cher. Néanmoins, il s’avère que leur exploitation massive met en péril l’équilibre environnemental du pays. Que ce soit par la déforestation ou l’extraction des ressources minières et des minerais, l’Indonésie fait face à d’importants problèmes de surexploitation qui sont les conséquences d’un commerce international sauvage et irresponsable.

Comment peut-on expliquer que l’Indonésie ait du mal à concilier prospérité économique et développement durable? Nous verrons d’abord que le pays regorge de précieuses ressources naturelles. Ensuite, nous nous arrêterons sur les problèmes de déforestation engendrés par les plantations d’huile de palme du pays. Enfin, nous traiterons de la responsabilité sociale des entreprises qui est reléguée au second plan.

 

De riches réserves de ressources naturelles qui s’épuisent

L’Indonésie est le premier producteur mondial d’étain, fait partie des 5 principaux producteurs de nickel et se classe parmi les 10 plus gros producteurs de cuivre (Courrier International, 2012). De plus, la mine de Grasberg est la plus importante du monde en ce qui concerne l’extraction d’or, le pays est également extracteur de bauxite et premier exportateur de charbon, autant dire que l’Indonésie dispose d’incroyable stock de ressources naturelles (Courrier International, 2012). Il s’avère que les FMN à production intensive ont dû léguer leurs parts aux entreprises locales plus respectueuses d’une exploitation durable des ressources naturelles. De plus, il a été décidé que le minerai indonésien ne pourra être exporté que s’il est transformé (Courrier International, 2012).

 

Les plantations d’huile de Palme à l’origine de la déforestation

Par ailleurs, la déforestation intensive pose un autre problème majeur en Indonésie. Le constat est alarmant, on sait que la forêt indonésienne a diminué de 21% entre 1990 et 2005, et le phénomène ne s’est pas arrêté depuis pour autant(Boudier, 2008).

Il faut savoir que l’Indonésie est le plus gros producteur d’huile de palme au monde. Or, ces plantations d’huile de palme requièrent de gigantesques feux de déblaiement pour être aménagées. Les feux de déblaiement représentent entre 40% à 80% des feux de forêts indonésiennes (Boudier, 2008). Non seulement les conséquences sont dévastatrices sur le plan écologique pour les espèces végétales et animales, mais elles sont également destructrices sur le plan social pour les 100 millions de personnes qui dépendent des produits de la forêt(Boudier, 2008). En effet depuis 1960, et notamment durant le régime de Suharto, les FMN se sont vu attribuer de plus en plus de terrains forestiers. Or, seuls 3% des firmes accusées d’avoir brûlé les forêts ont été condamnés (Boudier, 2008). Par exemple, le géant de la distribution Tesco est concerné étant donné que la firme distribue plus d’un millier de produits contenant de l’huile de palme (Boudier, 2008).

L’Indonésie produit 44% de l’huile de palme mondiale, soit plus de 6% de son PIB. C’est ce qu’on appelle « l’or rouge » (La croix, 2012). En revanche, sa production est accusée d’être la cause principale de la déforestation en Indonésie. Avec l’équivalent de six terrains de football qui disparaissent chaque minute, le bilan est inquiétant : 85% des forêts de Sumatra ont été rasées (Boudier, 2008). D’ailleurs, les petits producteurs se sont également lancés dans cette production qui est très demandée sur les marchés internationaux et qui rapporte beaucoup (La croix, 2012).

Les dommages environnementaux en sont arrivés à un tel point que l’Indonésie envisage de contingenter l’industrie de sorte qu’il ne puisse plus y avoir de plantations supplémentaires, au détriment de la bonne santé économique du pays qui repose en grande partie sur cette production (La presse, 2016). D’autre part l’utilisation des pesticides est également un fléau qui a été laissé pour compte.

 

La Responsabilité Sociale des Entreprises reléguée au second plan

L’Indonésie a été durement frappée par la crise financière de 1997, le dragon est l’un des pays d’Asie du Sud-Est qui s’en est le moins bien remis (Boudier, 2008). En effet, le pays a été secoué par l’instabilité politique et sociale, ce qui a fait fuir les investisseurs étrangers qui ont redouté de perdre leurs capitaux dans un « mauvais pari » indonésien (Caouette, 2017).

Dès lors, pour continuer à conserver une attractivité internationale, l’Indonésie a eu besoin de miser sur l’exploitation de ses ressources naturelles. En ce sens, la « Responsabilité sociale des Entreprises » a souvent été reléguée au second plan, pour ne pas frustrer les intérêts des FMN que le pays accueille (Boudier, 2008). En ce sens, l’État accepte de collaborer étroitement avec les FMN ou de leur octroyer des privilèges complaisants au détriment du bien-être social des pays (Boudier, 2008). Par exemple, en février 2005, sous la pression de la FMN Fila, l’État indonésien a accepté de déplacer la production sous-traitée de l’entreprise Tae Hwa d’un site où les travailleurs faisaient grève vers un site où la main d’œuvre est plus docile. Cette décision a eu pour conséquence la mise au chômage des employés et la fermeture de l’usine (Boudier, 2008).

L’Indonésie est donc malheureusement contrainte de faire d’importants sacrifices sociaux pour réparer les dommages collatéraux de la crise qu’elle a subi de plein fouet en 1997.

 

Bibliographie

Andrews, Tim G. Nartalin Chompusri, and Bryan J. Baldwin. « Chapter 2 : Rise of Multinationals » The Changing Face of Multinationals in Southeast Asia. London : Routledge, 2003 : pp.28-52

Boudier, F., & Bensebaa, F. (2008). Responsabilité sociale des firmes multinationales : faut-il être propriétaire pour être responsable ? Mondes en développement, 144(4), 27.

Courrier international. (2012) RESSOURCES NATURELLES. L’Indonésie reprend la main http://www.courrierinternational.com/article/2012/03/29/l-indonesie-reprend-la-main

Caouette, Dominique. 8 Juin 2017. “Diasporas Chinoises et Firmes Multinationales en Asie du Sud-Est” Cours 11, Asie du Sud-Est. Montréal : Université de Montréal

La Croix. (2012) – Huile de palme, « l’or rouge » de l’Indonésie – http://www.la-croix.com/Actualite/Economie-Entreprises/Economie/Huile-de-palme-l-or-rouge-de-l-Indonesie-_EP_-2012-11-12-874963

La presse (2016) – L’Indonésie s’attaque à l’huile de palme http://www.lapresse.ca/environnement/201605/02/01-4977127-lindonesie-sattaque-a-lhuile-de-palme.php

Mackie, Jamie, « Changing Patterns of Chinese Big Business in Southeast Asia », Southeast Asian Capitalists.

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