La minorité malaise à Singapour

Par Kenta Mouphas

La minorité malaise, dans la cité-état de Singapour, semble être désavantagée pour diverses raisons par rapport aux autres groupes ethniques du pays. Dans des domaines tels que l’éducation et l’économie, les malais semblent moins bien réussir que d’autres minorités telles que les Indiens. De plus, selon les statistiques, ils seraient ceux qui souffriraient le plus de cancer et de diabète. Ils seraient plus à risque de souffrir de problèmes de drogue et seraient ceux qui divorceraient le plus. C’est pourquoi, ils organisent des rassemblements et des séminaires visant à améliorer leurs situations, ainsi qu’à dénoncer la résistance du gouvernement contre ce changement. Quelles seraient les raisons de cette discrimination envers les malais?

Les malais représenteraient 14% de la population de Singapour. Ils subiraient un traitement défavorable comparé aux autres ethnies de la cité-état, et surtout, seraient désavantagée face à la majorité ethnique chinoise.

Cette disparité entre la minorité malaise et la majorité chinoise existerait depuis l’indépendance de Singapour en 1965. Certes, la modernisation du pays a été bénéfique pour la population entière, y compris les malais. Cependant, il semblerait que leurs performances au niveau de l’éducation et de l’économie soient plus faible que leurs pairs d’ethnies différentes (Hussain, 2011: 1171).

À cause des préjugés et des stéréotypes à leur encontre, la minorité malaise subirait de la discrimination au quotidien. L’accès à des emplois supérieurs dans les domaines de l’armée, de la police, etc… serait plus difficile pour eux (Hussain, 2011: 1156).

De plus, les malais estiment que le pays n’en ferait pas assez pour eux sur le plan religieux. Dans les années 2002 et 2003, les parents malais auraient mis de la pression sur les établissements scolaires de leurs enfants pour que les écoles permettent le port du tundung, une version du hijab. La demande aurait été refusée, et plusieurs élèves du secondaire et de sexe féminin auraient été renvoyés à la demande du Ministère de l’éducation et de certains écoles pour l’avoir porté. La plupart des malais apprécient certes l’atmosphère prospère de la cité-état, mais la discrimination se ferait plus présente face au fait que leurs coutumes religieuses soient dépeintes négativement et comme une menace (Hussain, 2011: 1170-1171).

À cela, le gouvernement justifierait ces initiatives par l’excuse de vouloir protéger l’identité nationale de Singapour, car pour le gouvernement, il serait important de conserver une harmonie ethnique dans le pays.

La religion de la minorité semblerait poser problème au gouvernement puisque, sous prétexte que cela pourrait affecter le jugement dans leur devoir de citoyen, une politique dans les années 1960 jusqu’au milieu des années 70 les excluait du service militaire obligatoire. Le gouvernement pensait à cette époque qu’en cas de conflits avec les pays voisins, les malais éprouveraient de la sympathie envers leur confrères de la même ethnie (Aljunied, 2010: 311).

L’histoire se répéte sensiblement en 1987 lorsque le fils de Lee Kuan Yew, le général Lee Hsien Loong, aurait justifié la raison pour laquelle les malais furent bannis des zones stratégiques dans la force aérienne de Singapour. Selon lui, la raison pour laquelle cela aurait été interdit est que le gouvernement n’aurait pas voulu qu’un soldat soit dans une position délicate où ses émotions pour la nation entreraient en conflits avec ses émotion pour sa religion (Hussain, 2011: 1169-1170).

Le problème principal du gouvernement de Singapour envers l’ethnie semblerait donc être la crainte que leur religion soit plus importante pour eux que les sentiments nationaux et civiques. De plus. cela perturberait l’image multiculturelle harmonieuse du pays.

Ce conflit émotionnel fut mentionné lors d’une entrevue par le premier ministre Lee Kuan Yew avec le quotidien Berita Haran. Il reconnaît un progrès en parlant de l’intégration des malais dans la société, mais selon lui, les protestations d’une partie de la population malaise singapourienne et de la Malaisie lors de la visite du président israélien Chaim Herzog démontrent la force de ce conflit. De son point de vue, ils ne seraient pas encore membres du courant dominant national. Toutefois, il croit que ce sera possible avec la prochaine génération (Aljunied, 2010: 318).

Cette entrevue du premier ministre provoqua une division dans la communauté, les élites malaises rappelant vivement à la minorité de ne pas mélanger la religion avec la politique et de ne pas tomber dans un complexe minoritaire.

Toutefois, le gouvernement ne remplirait pas ses devoirs puisque, selon l’article 152 de la Constitution de Singapour, «the Government shall exercise its functions in such manner as to recognize the special position of the Malays, who are the indigenous people of Singapore, and accordingly it shall be the responsibility of the Government to protect, safeguard, support, foster and promote their political, educational, religious, economic, social and cultural interests and the Malay language» (Aljunied, 2010: 319).

Ce que le gouvernement n’aurait pas fait, si l’on tient compte des programmes mis en place pour promouvoir le mandarin ou les programmes de religion à l’école, comme le programme « Religious Knowledge ».

Puis, Singapour aurait imposé, depuis 1989, un nombre maximum de malais dans les logements publics par crainte que la minorité malaise ne s’isole dans ces zones, devenant par la suite une menace pour l’intégration nationale.

Selon les statistiques de 2010, le nombre de malais qui immigrent à Singapour serait en déclin, comparé à celui des indiens et des chinois qui augmenterait. Les malais sont discriminés dans la société singapourienne malgré l’article 152 de la constitution du pays. Cette discrimination pourrait être expliquée par la crainte de la religion musulmane et de la mauvaise image véhiculée dans les médias au quotidien. La condition des malais se serait certes améliorée, mais l’égalité entre eux et les autres ethnies de la cité-état n’est pas encore acquise.

 

Bibliographie

Aljunied, Syed Mudh Khairudin. 2010. « Ethnic Resurgence, Minority Communities, and State Policies in a Network Society: The Dynamics of Malay Identity » Identities, Vol 17 (2-3): p. 304-326

Mutalib, Hussin. 2011. « The Singapore Minority Dilemma » Asian Survey, Vol 51(6): pp. 1156-1171

Lien pour marque-pages : Permaliens.

Les commentaires sont fermés