Piraterie maritime : une guerre persistante dans le détroit de Malacca

Par Raïssa Abdourahman

La piraterie moderne en Asie du Sud-Est, est un phénomène qui est apparu vers la fin des années 90, qui s’est par la suite intensifié jusqu’au début des années 2010 et qui s’est donc réduit depuis les années récentes. Pendant longtemps, le détroit de Malacca était connu comme étant la zone la plus infestée de pirates au monde. La piraterie a bouleversé plusieurs États et leur prise de décision quant à trouver des solutions à long terme. Malgré le fait que le détroit de Malacca regroupe plusieurs pays qui luttent tous contre cette problématique, chacun d’entre eux éprouve de la difficulté à maintenir un état stable vu les impacts.

De façon générale, la piraterie est la pratique d’attaquer et de voler des navires en mer (Oxford Dictionnary 2019). Cependant, la piraterie maritime est une problématique regroupant un grand nombre de crimes tout différents avec des motivations différentes. Par contre, la piraterie peut être dirigée par des activités criminelles de mer de petite ampleur, par exemple la contrebande de produits (Frécon 2008) ou bien de grande ampleur, par exemple un vol qualifié, piratage ou attaque par enlèvement contre rançon sur des navires en mer (Raymond 2009). Certains auraient tendance à utiliser la piraterie à des fins politiques et d’autres l’utilisent à des fins de crimes transnationaux (Jeong 2015).

Mais, pourquoi est-ce que le détroit de Malacca est important ? Le détroit de Malacca est d’une importance massive car il représente la principale traversée de navigation entre l’océan Indien et l’océan Pacifique. Celui-ci relie les principaux commerces maritimes de l’Inde, de la Malaisie, du Japon, de la Chine, de Taiwan, de la Corée du Sud et de la Russie (Umana 2012). On compte une quantité importante de pétrole passant par ce détroit et qui se rend jusqu’à l’ouest des côtes américaines et canadiennes (Ke 2006). C’est également une voie de transport de conteneurs majeure. Tous les produits électroniques chinois et de nombreux autres produits doivent passer par ce détroit (Zulkifli 2016). Cela en fait donc la zone d’expédition la plus encombrée au monde (Zulkifli 2016). Il est donc très important d’alarmer les navires traversant ce détroit pour éviter et réduire toutes sortes de problèmes qui peut avoir un impact non seulement dans la région mais à l’échelle internationale. Le détroit de Malacca est donc un point stratégique important qui requiert l’attention particulière des États de la région.

 

Source : Oil & Gas Logistics

Le processus de prévention a longtemps été révisé pour essayer de trouver des résolutions possibles à la problématique. Les pays dans le détroit de Malacca dont l’Indonésie, la Malaisie, la Thaïlande, Singapore et les Philippines ont tous chercher des façons à contrer le problème de façon individuel. Par contre, cela n’a pas pris de temps avant que ces pays réalisent que l’aide régional et international serait d’autant plus bénéfique. L’entraide régionale incluant les ententes multilatérales comme le Regional Cooperation Agreement on Combating Piracy and Armed Robbery (ReCAAP) et bilatéraux parmi les nations de l’Asie du Sud-Est comme l’Indonésie et la Malaisie qui consistait à rejoindre des patrouilles navales dans le détroit de Malacca (Liss 2007). L’ASEAN compte parmi l’effort coopératif le plus important avec ses dirigeants engagés pour renforcer la coopération afin de créer une « communauté de la sécurité » pour lutter contre la piraterie, le terrorisme et d’autres crimes transnationaux dans la région (Liss 2007). Dans l’ensemble ces ententes sont survenue afin de joindre les officiers de l’armée de la marine et de la police pour protéger et surveiller les eaux délimitant la région.

Cependant, ces efforts coopératifs ont tous connu des difficultés. C’est-à-dire que peu importe l’effort soutenu de l’ASEAN à sécuriser sa région, la communauté était limitée par sa politique de non-ingérence dans les affaires intérieures (Liss 2007). Pour les attentes multilatérales, le ReCAAP, introduit par le Japon, favorise le partage d’informations liées au piratage et la création d’un centre de partage d’informations (Liss 2007). Cette entente regroupant plusieurs pays dont le Bangladesh, l’Inde, la Corée du Sud, le Sri Lanka, etc., n’incluait pas deux des pays les plus en ce qui concerne la piraterie dans la région à savoir la Malaisie et l’Indonésie. Quant aux ententes bilatérales, par exemple, entre la Malaisie et l’Indonésie, la jointure des patrouilles navales des pays faisait peu à pas de différence. Le frein et le ralentissement de la lutte contre la piraterie sont sans doute liés au fait que de nombreux officiers de l’armée, de la marine et de la police acceptent des pots-de-vin ou bien des taxes des criminels dans les limites du détroit de Malacca (Liss 2007).

Malgré les problèmes rencontrés dans la procédure de la lutte contre la piraterie, le détroit de Malacca a tout de même connu une évolution importante. Lorsqu’on compare cette vaste région au tout début de l’émergence de la problématique, à son apogée jusqu’à aujourd’hui, on remarque une réduction d’incidents majeurs. En effet, l’International Maritime Bureau (IMB) a annoncé dans leur rapport concernant le nombre d’attaques de pirates qu’il n’y a eu aucune attaque reportée dans le détroit de Malacca en 2016 et 2017 (ICC-IMB 2018). On rajoute que ceci est dû à la croissance et l’intensification des patrouilles en mer par les autorités des états littoraux depuis juillet 2005 (ICC-IMB 2018) Il est donc conseillé aux navires de continuer à appliquer des mesures strictes de surveillance de navires lors de la traversée du détroit (ICC-IMB 2018).

 

Bibliographie

 

Frécon, Éric. 2008. «The Resurgence of Sea Piracy in Southeast Asia», Institut de recherche sur l’Asie du Sud-Est contemporaine, 3, 52-69.

Frécon, Éric. 2008. «The Resurgence of Sea Piracy in Southeast Asia», Institut de recherche sur l’Asie du Sud-Est contemporaine, 4, 70-82.

ICC International Maritime Bureau. 2018. «ICC IMB Piracy and Armed Robbery Against Ships-2017 Annual Report», ICC-IMB, 1-65.

Jeong, Keunsoo. 2015, «Diverse Piracy Patterns and Different Control Mechanisms», ISA Global South Caucus Conference, 1-23.

Ke, Xu. 2006. «Contemporary Maritime Piracy in Southeast Asia», National University of Singapore, 3, 64-108.

Liss, Carolin. 2007. «Southeast Asia’s Maritime Security Dilemma: State or Market?», The Asia-Pacific Journal, 5, 1-18.

‘’Piracy’’, Oxford Dictionnary, En ligne, https://en.oxforddictionaries.com/definition/piracy

(consultée le 18 avril 2019)

Raymond, Catherine Zara. 2009. «Piracy and Armed Robbery in the Malacca Strait», Naval War College Review,62, 1-12.

Umana, Felipe. 2012. «Transnational Security Threats in the Straits of Malacca», Fund For Peace, 4-30.

Zulkifli, Noraini. 2016. «China, USA and India in the Straits of Malacca: the significance toward Japan», International Research Journal of Social Sciences. 6, 41

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