Par Catrine Godin
1
l’obscurité étend ses hordes
dans les lits les saignées
chaque jour rogne
une naissance au milieu des haches
nos yeux érigent des murailles
délitent
les forêts
2
las d’une vieille guerre
des remous ruminent un crachat
entre les cuisses du monde
des sangles usées gagnent leur pari
près des os
intiment nos faunes
dont les landes rêvent encore
3
le tambour frénétique de la ville
assoupit
tes lignées
dans la rage froide des rivières
que les hommes barrent
la violence imbibe ainsi
par cumul
4
berceuse de chalazes endolories
une mémoire chante où se broie le monde
les morts mâchent le germe de tous nos noms
5
nos organes délavés
n’entonnent plus l’ode aux louves
comme le ciel renie sa couleur
nulle n’échappe aux harnais des jours
6
le futur fou court à l’aveugle
des fureurs grimpent dans tes robes
puis t’abandonnent
la parole couche sur le trottoir
et s’oublie comme les pigeons
7
les vitrines te distraient
capturent ton visage
ton nom
disparaissent
dans les reflets
s’efface le nom vrai qui te signe
8
jusqu’où s’incarnera
la victoire du déchet
nos corps
cette corde que rien ne délie
des enfances englouties
les trophées silencieux
en bas culotte
9
îles brisées
couvez nos oiseaux
stériles et glutineux
sans voix ni terre
nulle n’implore le retour
d´un improbable cargo
10
béton
armé jusqu’au noir des yeux
le coeur élimine
l’horizon
garde
aigus les crocs de tes filles
11
consens-tu
un culte
cloue ton corps
sur l’autel
des objets
au bord des dents
un sexe s’écrase
dans tes vœux
comme s’il le fallait
12
ton doigt tourne un acte vengeur
dans les essences amères
la bouche rouge de lipide
séquestre les baisers
trahissent
les promesses
13
amphore des siècles
que ne te souviens-tu
tous tes âges et le vin patient
j’écoute les lamentations du mot amour
se tracer des desseins noirs
dans ta crèche désabusée
où dort encore le langage
que tous tes gestes appellent
14
comme une mer debout couche les monts
lave et rend la terre
sois le retrait puis l’avancée
il faut cette franche lame de la vague
15
n’engendre plus le néant
s’ils disent que tu en es la mère
n’en crois rien
mais entend
les fils et des frères
tes compagnons de toujours
attendent une reconnaissance
que tu ne te donnes pas encore