Au-delà du développement : Quand La Coopération Internationale Rencontre l’altermondialisme

Par Timothé Nothias, Anne-Cécile Gallet et Dominique Caouette,

Version pdf.: Bloc 3 – Timothe Nothias, Anne-Cecile Gallet et Dominique Caouette

À moins de cinq ans du terme fixé en 2000 lors du Sommet du millénaire, il est déjà établi que la plupart des Objectifs du millénaire, ne seront pas atteints au moment de l’échéance de 2015. S’agit-il d’une grande et surprenante déception ou plutôt d’une nouvelle manifestation du mirage du développement et de sa mythologie moderniste et progressiste? Dans ce chapitre, nous optons sans hésitation pour la seconde possibilité. Le développement et l’idée sous-jacente d’une coopération internationale tirent leurs racines à la fois des écrits et des idées des philosophes des Lumières du XVIIIe et XIXe siècles, mais aussi du contexte géopolitique de son émergence en tant que construction sémantique et institutionnelle spécifique. Tout dépassement de cette mythologie moderne nécessite un double mouvement cognitif.

D’une part, une analyse des origines ainsi que de l’évolution tant des discours que des pratiques du développement et de ses acolytes que sont l’aide internationale et la coopération. Et d’autre part, la possibilité de reconnaître à l’intérieur de la mouvance altermondialiste, diffuse, hétéroclite et hétérogène, les premiers signes d’une redéfinition de la conceptualisation de la coopération internationale horizontale, post-nationale et plurielle. Plutôt que d’avancer un programme d’action pour une renouvellement de la coopération, il est ici suggéré qu’une nouvelle réflexivité normative enracinée dans une praxis fondée sur une cohérence transnationale offre nombre d’avenues capables d’imaginer la coopération internationale telle un mouvement réciproque et syncrétique de solidarité citoyenne.

L’invention du développement[1]

Le développement a longtemps été défini comme l’ensemble des pratiques sociales dont la finalité était l’amélioration du bien être de la société, celle-ci liée de manière inhérente à la modernisation de l’Occident. L’idée de développement tire ses fondements dès les origines de la civilisation occidentale. En effet, le développement est intrinsèque à la société où la modernité s’est en premier réalisée, à savoir l’Occident.

Suite à la période des Lumières qui consacre la domination de l’idéologie du progrès infini, l’apparition de la doctrine du développement prend véritablement corps aux dix-huit et dix-neuvièmes siècles, dans une Europe en proie au désordre social, causé entre autres par l’urbanisation rapide, l’omniprésence de la pauvreté et la révolution industrielle naissante. Le maintien de l’ordre social n’est pas assuré par le laisser-faire libéral préconisé par Smith, mais se réalise dans une curatelle exercée par certains acteurs dévolus (entrusted) sur la société. Quelques décennies plus tard, List, à travers ses thèses sur le protectionnisme, introduit l’idée de l’intervention étatique pour télescoper le progrès à travers l’action de l’État. Au cours de ce processus, le développement, appréhendé comme le progrès s’impose alors non pas comme un moyen, mais une finalité. Il devient progressivement une pratique étatique volontaire et s’inscrit surtout dans un nouveau discours, celui du sous-développement.

Reposant sur une dialectique, la notion de développement appelle à une contrepartie, en l’occurrence le sous-développement. Très rapidement, le développement vient ainsi occuper une place centrale dans l’étayement pour l’opinion publique d’une doctrine d’intervention basée sur une mission civilisatrice. Ceci vient présenter sous un joug philanthropique bien plus flatteur les visées économiques du colonialisme. Par ailleurs, ce moment colonial est aussi important parce qu’il voit, outre la construction du discours, les premières pratiques sous le couvert du développement.

Cependant, le développement, défini comme un « projet » naît véritablement au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en 1948, lorsqu’au lendemain du discours du président Truman et son point IV sur l’assistance technique aux nations défavorisées, la moitié de la population de l’humanité se réveille littéralement « sous-développée ». Cette innovation terminologique inaugure une nouvelle ère dans la conception des rapports internationaux. Le développement prend alors un caractère transitif puisqu’il a désormais la possibilité de provoquer activement le changement vers une situation d’abondance. Le projet de développement prend l’aspect non plus d’un internationalisme généreux mais d’une entreprise collective mondiale, résumée à un ensemble de mesures techniques visant à la croissance de la production.

Ce discours au nom du bien être de l’humanité sert alors les intérêts des États-Unis. L’invention du projet de développement s’inscrit en effet dans un cadre historique particulier. Le contexte est à l’heure de la fin du colonialisme, la réorganisation du système mondial au profit d’une hégémonie étasunienne, l’entrée dans la guerre froide –impératif d’entraver les avancées du communisme–, l’essor de l’industrialisation avec sa nécessité d’étendre le capitalisme pour maintenir les profits et enfin la foi en le progrès : la technologie s’impose comme véhicule des idéaux modernistes.

Les premières théories du développement

Au moment de l’entrée dans la guerre froide, les deux blocs –capitalisme et socialisme– vont s’appuyer idéologiquement sur des théories antagonistes, le modernisme de Rostow pour l’Occident, le marxisme pour l’URSS.

La théorie de la modernisation formulée par Rostow dans les années 1950 avance que le développement de n’importe quelle société adopte un schéma en cinq stades de croissance économique[2]. Au cours de ces étapes, la société traditionnelle peut ainsi aboutir à l’ère de la consommation de masse. Le succès que remporte cette approche s’explique par la conjoncture historique particulière dans laquelle elle émerge[3] : l’URSS est en avance dans la conquête spatiale et son idéologie séduit car elle apparaît comme un modèle viable. Pour les pays du Nord, sa théorie justifie la poursuite des politiques et pour les pays du Sud elle perpétue l’espoir d’un avenir meilleur. Sa théorie situe le rôle des économistes comme des acteurs centraux en proposant le développement comme une science économique, elle rend intelligible les défis du développement et enfin elle rationalise et organise l’idée d’une aide internationale au développement. Par contre, dès les années 1950, des voix dissonantes se font entendre, critiquant son universalisme et ethnocentrisme.

Malgré ces quelques oppositions, la pratique du développement s’institutionnalise et se professionnalise : la source du pouvoir et de la connaissance est placée dans l’expertise scientifique, menée par des technocrates, en opposition au savoir traditionnel.

Les approches contre-hégémoniques telles que l’école de la dépendance ou du système monde s’érigent en réaction à la théorie de la modernisation. Les postulats généraux en sont que le développement, loin de mener à l’autonomisation du Sud en lui garantissant la prospérité, exerce sur lui en réalité des effets de domination en l’enfermant dans une dépendance structurelle. Le système international est analysé comme déformé par l’époque de la domination coloniale pour répondre aux besoins européens, laissant les pays du Sud structurellement dépendant. La théorie de la modernisation est perçue comme perpétuant le sous-développement[4].

Une stratégie alternative de développement est mise de l’avant, celle de la déconnexion (delinking), c’est-à-dire le détachement des pays du Sud du système international par la révolution socialiste, afin de s’orienter vers un modèle de développement endogène. Ces théories, malgré leur aspect mono paradigmatique partagé avec le modernisme, demeurent néanmoins les premiers signes vers l’essor de théories critiques.

L’ère avortée du réformisme[5]

Les théories de la dépendance ont suscité beaucoup d’enthousiasme et ont ouvert la voie à un contexte de contestation du discours de la modernisation sans bornes. Le foisonnement de mouvements sociaux dominés par des revendications pacifistes et écologiques, dont Mai 1968 en représente l’apogée.

Cette remise en cause manifeste toute sa puissance dans la création de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) qui, après la crise pétrolière de 1973, témoigne d’une nouvelle force collective de négociation, émanant pour la première fois du Sud, capable désormais d’ébranler les économies occidentales. Ce renouveau prend aussi ses racines dans une série d’évènements s’enchaînant depuis la décolonisation. En effet, outre le contexte d’optimisme qui prévaut dans les années 1960-1970, le mouvement des pays non alignés en 1961 qui se renouvelle en Groupe des 77 ainsi que la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) deviennent les tribunes d’expression privilégiées des pays du Sud. Elles consacrent le rôle de l’Organisation des Nations unies (ONU) dans l’avènement d’un ordre nouveau : le multilatéralisme plutôt que l’unilatéralisme des États-Unis.

C’est au sein de cette même organisation, en 1974, que le tiers-mondisme se concrétise dans une version réformiste qui propose la mise en place d’un Nouvel ordre économique international (NOEI). Les revendications des résolutions qui constituent le NOEI se construisent autour de trois axes. Les pays du Sud aspirent tout d’abord à réformer le système commercial mondial. Ensuite, mention est faite d’une réforme du système financier qui impliquerait entre autres, d’augmenter l’aide internationale. Enfin, le Groupe des 77 exhortent les pays riches à leur offrir davantage de pouvoir au sein des institutions internationales.

Néanmoins, les grands appels des pays du Sud restent lettres mortes lorsque le contexte s’assombrit en raison de la Guerre froide et d’un ralentissement de la croissance résultant en une réduction de l’aide internationale.

Outre sa conjoncture historique particulière, le NOEI comportait déjà les causes de son échec en lui-même. La domination de l’OPEP avait fractionné les intérêts du Sud et célébré les pétrodollars, prémisses de la crise de la dette. Au final, le NOEI n’apporte aucun changement structurel et se contente plutôt de réifier le mythe du développement, instrumentalisé par les élites du Sud. Plus loin encore, alors que le NOEI occupe le devant de la scène, une série de rapports se succèdent : le rapport « What Now » de Hammarskjöld, le rapport Nord-Sud de Brandt ou encore l’approche des besoins essentiels de McNamara. Ces rapports et approches ont en commun le désir d’identifier et de dépasser les ratés des deux premières décennies du développement. Avec l’approche sur les besoins essentiels, il n’est plus tant question d’augmenter le revenu que de combler les besoins essentiels des populations pauvres. Toutefois elle est vite confrontée à un certain nombre d’impasses puisque la définition des besoins essentiels souffre d’une certaine naïveté et ethnocentrisme.

Du développement à la mondialisation[6]

L’échec du NOEI ouvre la voie au début des années 1980 à une lutte inter-paradigmatique autour du développement et de la question des pratiques de coopération internationale. Alors que le développement alternatif prône une approche par le bas, la contre-révolution néolibérale s’impose de façon hégémonique. Plusieurs facteurs concourent à l’échec du NOEI et ouvrent la voie au néolibéralisme, rendant ce choix presque évident.

La mondialisation financière s’est accélérée au le milieu des années 1970 et mène à une financiarisation de l’aide internationale, l’éclosion de la crise de la dette ainsi qu’à une restructuration des États. Cette mondialisation financière se caractérise par l’émergence d’un système bancaire mondial, servi par le foisonnement de banques transnationales. De plus, la fin du système de Bretton Woods en 1971 suspend la convertibilité du dollar en or qui s’impose comme la devise internationale d’échange.

Ainsi, une partie de l’aide internationale est petit à petit converties en emprunts auprès des banques dont les liquidités sont abondantes depuis la crise pétrolière de 1973. Les pays du Sud s’endettent et cette dette devient une crise lorsqu’au début des années 1980, les politiques monétaristes de Friedman s’imposent comme unique solution d’assainissement des finances publiques. Le Mexique est le premier à se déclarer en faillite en 1982 initiant une vraie déconfiture en Amérique latine, puis en Afrique. Face à cette crise, les États perdent de leur autonomie au profit des organisations internationales.

Les institutions internationales, soutenues par les États-unis et conscientes de la réussite des nouveaux pays industrialisés asiatiques relancent le projet de développement comme un objectif d’insertion sur les marchés mondialisés. Le marché et le libre-échange se présentent désormais comme les clés de voûte du développement. Il est concrétisé dans les pays en développement par les plans d’ajustements structurels qui prônent une austérité, un retrait de l’État et une dérégulation de l’économie visant à une meilleure participation au commerce international.

Cette conception du développement devient hégémonique durant les années Reagan et la théorisation de cette pratique est défendue et intellectualisée par l’école de Chicago, qui remet en cause le New Deal et le fordisme en prônant la dérégulation, la libéralisation et la privatisation, les préceptes qui forment le Consensus de Washington. Ce nouveau paradigme idéologique développe des conceptions de court terme qui tournent autour d’un retrait de l’État, d’une faible régulation, de taxes et de salaires minimaux. Ces politiques se traduisent par des privatisations et une libéralisation, sur la marchandisation du monde, et sur la financiarisation menée par Wall Street. En somme, le projet de développement change de visage de l’intervention de l’État au profit du libre marché et s’axe autour de l’insertion marquée dans la mondialisation comme voie d’avenir.

L’impasse du développement[7]

Le triomphe de la doctrine autour de la synergie marché – mondialisation n’occulte cependant pas la volonté entamée lors des luttes inter-paradigmatiques de penser une autre forme de développement. De nombreux courants intellectuels critiques fleurissent à partir de la fin années 1980, surtout pendant la décennie suivante plaçant cette période sous le signe du questionnement et de l’éclectisme. D’essence constructiviste, ces approches remettent en question les perspectives structuralistes positivistes et critiquent essentiellement les notions de progrès linéaire et modernisation. Elles cherchent à concevoir un développement davantage équitable, inclusif et durable.

Dans la lignée du développement alternatif qui avait préconisé un autre développement dans les années 1980, les approches constructivistes poststructuralistes telles que l’anti-développement, l’au-delà du développement et le post développement soutiennent que le développement est dans une impasse. L’accent est mis sur le pouvoir des discours et des idées pour façonner la réalité, ou comment le projet de développement s’est construit et vient répondre aux intérêts occidentaux. De plus, pour ces perspectives critiques, la mondialisation représente une radicalisation du projet de la modernité. Ces courants viennent critiquer l’approche par le haut (top-down) et le rôle donné aux experts, aux « professionnels » du développement, et privilégient plutôt des pistes de recherches pour un développement interactif, non-directif, participatif et local (grassroots participation et bottom-up strategy). Autres approches constructivistes, celles post-modernistes et postcoloniales viennent quant à elles mettre l’accent sur le postnationalisme identitaire : les cultures sont mixtes et mondialisés, soumises à une dynamique de syncrétisme et d’hybridité.

Ces courants de réflexion, aux approches radicales, trouvent cependant peu d’écho dans les doctrines au sein des institutions internationales de pratique du développement. Celles-ci essaient de renouveler la problématique, sans arriver à une véritable nouvelle approche comme en témoignent les travaux de la Commission Sud. Les années 2000 voient apparaître deux nouveaux paradigmes[8]. Celui dit de Bretton Woods, véhiculé par les institutions telles que le FMI, la Banque Mondiale et l’OMC, reprend les conceptions du Consensus de Washington. Celui dit des Nations-Unies, regroupant les institutions affiliées à l’ONU, voit la pauvreté mondialisée, en raison d’une mondialisation à double vitesse avec l’expansion des richesses économiques mais aussi une intensification des inégalités. Les approches se centrent sur l’individu, et le combat contre la pauvreté par le « développement » humain passe par la lutte mondiale contre l’exclusion sociale. Trop faiblement renouvelée, la pratique du développement est elle aussi dans l’impasse.

De l’aide internationale  à l’altermondialisme

Le carrefour de la coopération

Cinq décennies de pratique du « développement » amènent un bilan mitigé. L’inefficacité du régime de l’aide internationale au développement se fait crûment sentir. Au-delà de l’ethnocentrisme des modèles prônés, on pointera principalement comme cause conceptuelle de l’échec une essentialisation du tiers-monde par une approche de ce dernier comme un tout homogène[9]. La prégnance du mythe du progrès naturel inéluctable et universel dans les discours sur le développement contribue en effet de façon non négligeable à son impasse et échec. La dictature du progrès et de la science a mené à la sacralisation du rôle de l’expert technocratique, aujourd’hui incarné dans le consultant sans-frontière et a conduit à une pratique directive et managériale du développement.

Un momentum particulier se dégage cependant dans l’ère du temps depuis les années 2000 pour un renouveau en profondeur de l’approche du développement. Le paysage international est effectivement en proie à de grandes mutations à de multiples niveaux. Les analyses structurelles hégémoniques du sous-développement comme un manque (moderniste) ou comme un blocage (marxiste) sont dépassées sans pour autant être remplacées par des théories de tailles équivalentes. Aujourd’hui, les approches partielles et non-totalisantes mettent l’accent sur la nécessité de dépasser la notion même de développement. Un message réapproprié puisqu’il n’est désormais plus question du développement pour lui-même, mais davantage, de saisir sa multi-dimensionnalité politique, économique, sociale, et environnementale. En parallèle, le système capitaliste se fissure et les institutions telles que la Banque mondiale, le FMI et l’OMC voient leur légitimité sans cesse davantage décriée.

L’attention et les questionnements se concentrent sur les liens entre réduction de la pauvreté et l’expansion géographique ainsi que l’intensification de la mondialisation économique. Le phénomène de marchandisation progresse mais génère de plus en plus d’hostilité de la part des populations marginalisés qui décrient haut et fort les promesses illusoires offertes par le néolibéralisme. Cette fissuration s’accélère d’autant plus face à son incapacité à solutionner autrement que par l’illusion technologique (techno fix) les problèmes écologiques sans précédent auxquels fait face la Terre. La géopolitique mute rapidement avec la montée de nouvelles puissances économiques. Alors que la mondialisation économique atteint une intensité d’un niveau inégalé dans l’histoire de l’humanité, la compression de l’espace-temps grâce aux nouveaux moyens de communication favorise l’émancipation et montée en puissance d’une multitude d’acteurs non-étatiques, capables d’agir au-delà et à travers les frontières.

Dans cette période aux enjeux exacerbés, la praxis de la coopération internationale se trouve ainsi à un véritable carrefour, dont on dégage deux grandes tendances. Celle de l’establishment, dite des écoles gestionnaires, s’appuie fondamentalement sur les idées libérales et modernistes. L’accent est mis sur la formation d’experts spécialisés afin d’améliorer la gestion de l’aide et des situations d’urgence, le développement étant alors de nouveau ramené à une compétence technique davantage qu’une problématique civilisationnelle. La seconde se situe dans la construction d’un contre discours marquée par une ontologie post positiviste et une épistémologie constructiviste. Ce contre-discours s’incarne dans un vaste éventail de courants de pensée et de mouvements sociaux que l’on peut regrouper sous l’appellation altermondialisme.

L’altermondialisme, des réflexions en mouvement

L’altermondialisme s’est développé comme un nouveau champ de connaissances des relations internationales dont les contours restent très flous. Défini par Dupuis-Déri comme « une convergence de mouvements sociaux et d’acteurs politiques (intellectuels, ONG, partis politiques) qui se reconnaissent mutuellement comme victimes et adversaires du néolibéralisme et du capitalisme, national ou mondialisé »[10], l’altermondialisme montre qu’il devient de plus en plus urgent de briser certaines frontières épistémologiques qui ont marqué l’étude des relations internationales et de la politique comparée.

L’altermondialisme reste avant tout un contre-discours. Pour certains, on peut y voir ce que Karl Polanyi désignait de double mouvement, un mouvement de résistance qui forcerait la mise en place de mécanismes d’ajustement et de mesures sociales pour limiter les abus et les excès d’un hyper-libéralisme exclusif[11]. L’altermondialisation serait alors le contre-mouvement qui permettrait de donner un visage humain ou du moins assurerait la pérennité de la mondialisation des marchés et de l’économie[12].

D’autres voient plutôt en l’altermondialisation une vision tout autre de la mondialisation, fondée sur l’idée de multitudes, de pluralités et de diversités[13].  Encore plus difficile à définir que la mondialisation, l’autre mondialisation serait une mouvance sociale beaucoup moins bien définie, d’où le recours à différentes terminologies souvent inspirantes, mais difficiles à saisir ou à opérationnaliser : constellation d’oppositions, multitudes, ou encore résistance intergalactique, pour reprendre l’expression des Zapatistes. Encore en gestation et profondément horizontaliste, l’altermondialisation reste définie par ses pratiques plutôt que par des axes organisationnels et un programme politique précis.

La construction d’une théorie autour de l’altermondialisation demeure ainsi alambiquée et il reste même compliqué d’en déterminer le champ d’études. Nous pouvons toutefois articuler quelques réflexions qui, comme l’altermondialisme, sont aujourd’hui en mouvement continu et entrent dans le vaste domaine de l’analyse politique. Selon Thomas Risse, il s’agit de permettre la rencontre de deux grands terrains d’analyse soit la sociologie politique et l’étude des relations internationales[14]. La rencontre de ces deux agendas de recherche a remis à l’ordre du jour l’importance de comprendre et d’expliquer le rôle des acteurs non-étatiques et la place déterminante des normes et des idées au sein des relations internationales.

Il est en effet nécessaire, pour comprendre les dynamiques de l’altermondialisme, de dépasser l’analyse stato-centrée et de retenir le rôle privilégié joué par les acteurs transnationaux, afin d’apporter une compréhension du monde nuancée et plus proche de la réalité. Tous ces acteurs se nourrissent de l’ouverture d’un espace politique transnational qui émerge et se construit depuis une quinzaine d’année. Selon Robert O’Brien, la montée de mouvements transnationaux peut être associée aux mutations de l’ordre international qui, ayant conduit à une phase de « multilatéralisme complexe », ouvre l’espace à la voix de la militance transnationale[15]. Il note que ce nouveau phénomène dans les relations internationales s’exprime de manière conflictuelle car, d’un côté les institutions au pouvoir cherchent à maintenir l’ordre en place alors que les mouvements altermondialistes ambitionnent de l’altérer. Ce courant s’inscrit dans ce que Held nomme « démocratie cosmopolite »[16], concept qui met en lumière le désir des militants de se préoccuper de problématiques reliées à des régions proches ou éloignées et à l’ordre mondial en général.

La multiplication des appartenances et des loyautés subjectives reste plus envisageable que la naissance d’une citoyenneté mondiale qui serait une simple transposition du système national au niveau international. Selon James Rosenau, cet écartèlement de l’analyse statocentrique peut être illustré par l’idée de la « fragmégration »[17]. Néologisme voulant qu’il faille maintenant tenir compte dans nos analyses à la fois des processus de fragmentation et des processus globaux d’intégration (économique, politique, culturelle, etc.) qui au final nous mène à une certaine « glocalisation ». C’est à l’intérieur de ce processus dialectique que l’on peut voir émerger les avenues les plus prometteuses pour une compréhension à la fois originale et explicative de la mondialisation et de l’altermondialisation, mais aussi d’un renouvèlement de l’appréhension et de la pratique de la coopération internationale.

Même si la date de naissance « officielle » de la montée de la mouvance altermondialiste, figurée par les acteurs transnationaux est souvent associée aux résistances en marge du Sommet de Seattle, en 1999, sa gestation a duré de longues années, voire de longues décennies selon certains, depuis l’apparition de crises pétrolières et économiques à répétition dans les années 1970. Dès les années 1980, avec la mise en place des programmes d’ajustement structurel et par la prise en charge de la gestion macroéconomique étatique par le FMI et la Banque mondiale, on commence à percevoir un tournant dans les pratiques et le discours de la solidarité internationale. Cinquante-six émeutes anti-FMI ont été relevées entre 1985 et 1992. Se dessinent alors quelques grandes caractéristiques des pratiques et du discours altermondialistes, l’insistance sur l’inclusion, l’équité, la participation et la dissidence directe dans la rue et non plus à travers des partis politiques ou institutions étatiques[18]. Le soulèvement zapatiste de janvier 1994 et son appel à une résistance transcontinentale au néolibéralisme global revêtent aussi eu une importance particulière. La création du mouvement La Via Campesina en 1996 marque également une étape clé de la construction d’un espace politique transnational. Par la suite, les forums et les rassemblements parallèles aux rencontres de l’Organisation mondiale du commerce sont devenus des moments privilégiés d’expression de la dissidence. D’abord à Genève en 1998 puis l’année suivante lors de la « bataille de Seattle », une multitude d’acteurs de la société civile se sont rencontrés et ont manifesté.  Les rencontres ministérielles qui ont suivi (Doha 2001, Cancun 2003, et Hong Kong en 2005), les sommets du G-8, les réunions du FMI et de la Banque mondiale sont ainsi devenus des occasions  importantes pour les mouvements sociaux transnationaux de se rassembler et d’agir collectivement en vue de protester contre des modes de décisions jugés non démocratiques et exclusifs. Ainsi, la montée d’une nouvelle mouvance citoyenne devient une réalité visible et tangible, d’où la nécessité de développer significativement un champ des études transnationales au sein des relations internationales et de la sociologie politique.

Sur le plan théorique, l’étude de l’altermondialisme emprunte essentiellement au constructivisme et aux analyses post-positivistes[19]. Le constructivisme semble être le paradigme privilégié en particulier pour l’étude de l’altermondialisme[20]. D’une part, son insistance sur le rôle de l’intersubjectivité, c’est-à-dire l’importance de la co-constitution de la réalité comme produit de l’interaction sociale semble particulièrement pertinente pour saisir la mise en place du discours altermondialiste sur la mondialisation. D’autre part, le constructivisme permet de comprendre toute une série de pratiques alternatives et de normes comme composantes de ce mouvement multiforme, pluriel et éclaté. Que ce soit le rôle grandissant des normes internationales, des idées telles la justice sociale, le commerce équitable ou encore le développement durable, l’écologie, la simplicité volontaire, la décroissance, force est de reconnaître qu’il s’agit là de constructions discursives et narratives.

Diversité, horizontalité, inclusion et autonomie

L’altermondialisme s’apparente davantage à une mouvance qu’à un mouvement. Loin d’être un acteur structuré et centralisé, ou courant unifié capable de gouverner le monde différemment demain, l’altermondialisme se constitue d’un ensemble pluriel et éclectique. Dans ce paysage haut en couleurs parfois chaotique, le désordre bariolé fait ressortir une des composantes majeures de la richesse de l’humanité : sa diversité. Parce que tout le monde est accepté, personne n’est exclu, ce qui crée une unité. La diversité devient source d’unité. La subtilité de la devise du Forum Social Mondial (FSM), « Un autre monde est possible »,  réside dans le fait qu’elle ne prône pas de prime abord un monde meilleur, mais invite à la réflexion sur la multitude d’options qui sont envisageables[21]. La mouvance s’applique ainsi à démontrer dans son hétérogénéité que différentes solutions sont envisageables; et qu’être altermondialiste aujourd’hui n’est pas exiger le remplacement d’une pensée unique par une autre. Une réponse au « There is no alternative » (Il n’y  a pas d’alternative – expression du Premier ministre britannique Margaret Tchatcher) martelé durant les années 1980 pour justifier le libéralisme. En effet, dans la vision néo-libérale, suite à la chute du communisme au début des années 1990 il n’y a plus qu’un seul modèle de société possible. Au contraire, dans la vision altermondialiste, le système néo-libéral n’est pas viable et on prône la construction d’alternatives multiples qui pourraient s’illustrer par un arc-en-ciel. De ces alternatives multiples émerge toutefois un corpus de valeurs communes, une convergence qui tend à renforcer l’idée d’unité dans la diversité.

Le premier appel des altermondialistes reste celui de la remobilisation politique et citoyenne pour résister et proposer[22]. Cette prise de conscience doit refléter une nouvelle culture politique qui, loin d’être révolutionnaire, pourrait juste d’une part, se rapprocher des grands principes démocratiques dont, selon certains, les pays traditionnellement démocratiques se sont éloignés pour se rapprocher d’une oligarchie, et d’autre part, intégrer un processus de décision plus horizontal. Les nouvelles stratégies visent les capacités d’action du citoyen et de la société civile en tant que moteur d’innovation. L’inclusion et la participation politique sont donc au centre des préoccupations des altermondialistes.

L’altermondialisme prône en outre le respect de la nature et l’avènement d’un humble équilibre entre l’activité humaine et l’environnement[23]. Selon cette même logique, le contrôle des biens publics naturels doit d’opérer par la communauté qui peut être géré par le libre marché. Par ailleurs, l’autonomie prime sur la dépendance donc l’aide au développement est sérieusement remise en cause. L’accent est ici placé sur l’autosuffisance qui n’est pas synonyme d’autarcie, mais qui pointe plutôt vers un développement local et non-directif. Ceci implique alors que la coopération internationale se réorganise ainsi autour de collaborations et de solidarités. Ces diverses nouvelles formes de coopération permettent de prendre en compte la diversité culturelle, louée au sein des mouvements altermondialistes et vue comme une richesse.

Enfin, une dernière valeur commune se retrouve dans la volonté d’agir dans l’alternatif[24]. Le FSM, en tant que sphère public alternative, est une illustration de cette dynamique. Cet objet social encore diffus et qui résiste aux cadres d’analyses traditionnels est un espace ouvert, horizontal et démocratique de réflexion et réseautage. Plus qu’une dynamique de contre-sommet, mais moins qu’un processus de table ronde de la part de la mouvance altermondialiste, les forums sociaux sont une plateforme ouverte d’échanges en tout genre.

Repenser la coopération internationale

Ainsi, la mouvance altermondialiste se réunit dans le fond autour de ce corpus de valeurs et de normes partagées, mais, dans la forme la réalité reste souvent complexe et hybride. En dépit de cette unité de valeurs, les solutions proposées demeurent hétérogènes. Il est possible d’identifier de manière schématique, trois tendances.

Les étatistes représentés, entre autres, par Martin Khor de Third World Network, un réseau altermondialiste, mettent l’accent sur l’importance d’une intégration croissante mais plus équitable dans la mondialisation[25]. Ainsi, ils souhaitent construire une mondialisation à visage humain. Ils prônent une révision des relations interétatiques qui passe par exemple par une réforme et une démocratisation de la prise de décision au sein des organisations internationales ou une annulation de la dette des pays en développement. Ils réclament également un meilleur accès aux marchés internationaux, c’est-à-dire la fin du protectionnisme déguisé de la part des pays riches.

Les réformistes soutiennent l’approche de la deglobalization entreprise par Walden Bello et qui se propose de répondre au défi d’imaginer une alternative à la mondialisation dominante[26]. Il analyse qu’au-delà de la réforme ou de la déconstruction, il faut couper avec le modèle dominant et reconstruire une nouvelle gouvernance mondiale, sur une base propositionnelle : l’intervention doit être simultanée sur plusieurs niveaux (local et global), les économies nationales doivent être déglobalisées et le système des institutions internationales doit être modifié. Il prône en effet tout d’abord un désengagement des économies nationales basé sur un engagement sélectif dans le commerce international ainsi qu’une subordination de l’économie au politique, et préconise une gouvernance mondiale alternative fondée sur une déconcentration et décentralisation du pouvoir institutionnel au profit d’un système pluraliste et flexible.

Enfin, les radicaux regroupent de nombreux groupuscules qui restent souvent plus anti- que altermondialistes[27]. Privilégiant une multitude de formes d’action, y compris la violence et les actions spectaculaires, ce courant est celui qui a le plus de visibilité. Ironiquement, ce courant contribue sans le vouloir à discréditer l’altermondialisme que beaucoup voient comme une utopie défendue par des anarchistes et des casseurs. Il s’agit d’une double ironie car ces altermondialistes sont souvent ceux et celles à la recherche d’une plus grande cohérence. Ainsi, plusieurs organisent leur vie dans des camps autogérés et insistent sur un mode de vie au quotidien qui reflète les valeurs défendues, d’autonomie, d’autogestion et de démocratie directe. Malheureusement, les medias dominants souvent simplistes et sensationnalistes, plutôt qu’analytiques, exacerbent ce paradoxe : leur conduite offre une certaine visibilité à l’altermondialisme mais d’un autre côté, elle peut aider les néolibéraux à asseoir l’ordre établi en délégitimant leur action.

Deux autres approches remettant en cause le néolibéralisme dominant se dégagent également, sans pour autant se revendiquer altermondialistes. Tout d’abord, ce que Ramo a nommé « Consensus de Beijing (Pékin) »[28] et qui désigne la politique de développement prônée par la Chine met l’accent sur les réformes structurelles et la discipline collective en tant que conditions sine qua none à la réussite économique, au détriment des libertés civiques et politiques. L’innovation est une valeur encouragée, de même que l’indépendance vis-à-vis des pays de l’Occident et de leur aide conditionnée. L’auto-détermination permise par ce développement permet de contrebalancer le pouvoir hégémonique.

Ensuite, le Consensus du Sud, tire ses sources des modèles asiatiques et de l’approche néo-structurelle. La stratégie nationale doit comprendre des politiques macro-économiques de croissance avec des politiques fiscales qui visent à réduire l’inflation et les déficits ainsi que s’orienter vers l’offre à travers des politiques de développement des capacités, des investissements. La croissance économique est atteinte de manière optimale à travers l’interaction stratégique entre l’économie nationale et l’engagement international, c’est-à-dire que par exemple la libéralisation doit se faire graduellement. L’appareil bureaucratique, très efficace collabore avec les milieux d’affaires pour planifier, dans une certaine mesure, l’économie. En outre, le gouvernement conserve sa légitimité grâce à la mise en place de politiques de redistribution. Enfin, le Consensus du Sud met l’accent sur l’importance de l’intégration régionale pour contrer les méfaits de la mondialisation.

Conclusion : De l’aide internationale à la solidarité citoyenne

Quel bilan peut-on tirer de ces six décennies du projet de développement. Tout d’abord, il ressort que les idées datant du libéralisme philosophique persistent encore aujourd’hui. Pour les tenants de la mondialisation, la modernisation et le progrès restent toujours à l’agenda. En même temps, ces soixante années de développement ont été toutes sauf statiques, des premiers projets de modernisation des années 1950, à l’approche sur les besoins essentiels, les demandes pour un Nouvel ordre international économique, aux programmes d’ajustements structurels ou encore au développement économique axé sur les exportations et la libéralisation économique.

Comme le souligne Wallerstein, nous sommes aujourd’hui à un carrefour. D’une part, il existe un vaste consensus que nous sommes arrivés à la fin des grandes métathéories sur le développement. D’autre part, les discussions contemporaines se structurent autour de deux avenues conceptuelles. Une première choisit d’inscrire le développement à l’intérieur des réflexions macro sur le système monde-capitaliste (Wallerstein[29], Negri et Hardt[30]) ou la mondialisation (Bahgwati[31] et Wolf[32]). Une seconde approche fait plutôt le pari de penser qu’un « autre monde est possible ». Ce vaste chantier de réflexion altermondialiste est en pleine effervescence et ne peut se capturer au singulier tant sa diversité et son éclectisme sont importants. Ces deux grandes avenues intellectuelles ont également leur expression institutionnelle. D’un côté, on assiste à la prolifération des écoles et des programmes de gestion du développement.  De l’autre, les altermondialistes se réunissent à travers toute une panoplie de forums sociaux, à différentes échelles, d’un forum social de quartiers, aux forums nationaux ou encore mondiaux.

Comment alors penser l’aide au développement et la coopération internationale? La première idée qui ressort sans doute le plus clairement, c’est la nouvelle humilité qui marque ce champ. Humilité face aux résultats mitigées du projet du développement, mais également parce que l’aide internationale constitue une fraction bien minuscule de l’ensemble des flux financiers internationaux. L’exception à cette humilité reste sans doute les interventions humanitaires et d’urgence ou toute une industrie se met en place sous les regards attentifs des médias. Ainsi, telle la dialectique mondialisation – altermondialisation, il existe aujourd’hui un courant critique (Pandolfi[33], Mcfalls[34], Corbet) qui remettent en question ces interventions en exposant et révélant les enjeux éthiques et les relations de pouvoir de ces opérations à grand déploiement.

Plus largement, la division Nord-Sud apparait quant à elle de plus en plus désuète. L’émergence de la Chine, de l’Inde et des autres pays du (BRIC), la montée d’une gauche autonomiste et anti-américaine en Amérique du Sud, mais aussi l’élargissement du G-8 au G-20 remettent sérieusement en question cette division du monde. De même, les nouveaux enjeux de sécurité internationale, y compris une préoccupation omniprésente face au terrorisme ont eu comme conséquence, de rendre les enjeux de développement tributaire des considérations de sécurité.

Le pôle contre-hégémonique de cette dérive de l’aide et de la coopération reste possiblement l’altermondialisme. Cette mouvance tente de manière plurielle et parfois éclatée de se distancer  d’une conception de la coopération internationale qui se voudrait unilatérale ou encore dominé par un mode de connaissance linéaire ou inspiré par la modernité des Lumières. Ici, l’idée de solidarité internationale semble prendre son sens propre. Associé à cette idée, les notions d’équité, de durabilité, de mutualité et de réciprocité deviennent le propre des pratiques altermondialistes. De plus, c’est l’engagement pour une mobilisation collective et citoyenne qui semble dominé cette mouvance qui reste largement antisystémique.  Imaginer un « autre monde » passe donc par la déconstruction d’un système d’accumulation privés et non durable. Certains analystes, dont Wallerstein, vont jusqu’à avancer que les limites systémiques du capitalisme et son effondrement sont déjà à l’horizon, d’ici 25 à 50 ans. Plutôt que d’opter pour le difficile art de la prédiction, il apparaît plutôt important ici d’insister sur la métamorphose de la coopération internationale qui s’opère actuellement. Celle-ci s’éloigne progressivement de ses racines liées à la modernité et à l’idée de progrès universel pour ouvrir plutôt un nouvel imaginaire structuré autour de l’idée de solidarité transfrontalières face un destin cosmopolite commun.


[1] Voir Gilbert Rist, « L’invention du développement » , Le développement : histoire d’une croyance occidentale, Paris, Presses de Science po, 2001, p. 116-129 ; Michael Cowen et Robert Shenton, « The Invention of Development» , Power of development, Jonathan Crush (dir.), Londres, Routledge, 1995 ; Arturo Escobar, « The Problematization of Poverty : The Tale of Three Worlds and Development » , Encountering Development: The Making and Unmaking of the Third World, Princeton, Princeton University Press, 1995, p. 21-54.

[2] Walt W. Rostow, « Les cinq étapes de la croissance» , Les étapes de la croissance économique, Paris, Seuil, 1975, p. 53.

[3] G. Rist, 2001, p. 164-170.

[4] Gilbert Rist, « Le Triomphe du Tiers-Mondisme » , Le développement : histoire d’une croyance occidentale, Paris, Presses de Science po, 2001, p. 234-276 ; Suzanne Dansereau, « Les théories du développement : Histoires et trajectoires » , Introduction au développement international : Approches, Acteurs et Enjeux, Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa, 2008, p. 39-51.

[5] Voir Gilbert Rist, « Le Triomphe du Tiers-Mondisme » , Le développement : histoire d’une croyance occidentale, Paris, Presses de Science po, 2001, p. 234-276 ; Vijay Prashad, « New Delhi » , Les nations obscures : Une histoire populaire du tiers-monde, p. 263-280.

[6] Voir Philip McMichael, « International Finance and the Rise of Global Managerialism » , Development and Social Change : A Global Perspective, Thousand Oaks, Pine Forge Press, 2000, p. 113-146 ; Jan Nederveen, « Neoliberal Globalisation and the Washington Consensus » , International Development Governance, Ahmed Shafiqul Huque et Habib Zafarullah (dir.), New York, Taylor and Francis, 2006, p. 91-104.

[7] Voir Jane L. Parpart et Henry Veltmeyer, « The Development Project in Theory and Practice: A Review of its Shifting Dynamics » , Revue canadienne d’études du développement, vol. 5, n°1, 2004, p. 39-59.

[8] Jean Philippe Thérien, « Beyond North-South Divide : The Two Tales of World Poverty» , Third World Quaterly, vol. 20, n°4, 1999, p. 723-742.

[9] G. Rist, 2001, p. 116-129.

[10] Francis Dupuis-Déri, L’altermondialisme, Montréal, Boréal, 2009, p. 21-22.

[11] James H. Mittelman, The Globalization Syndrome: Transformation and Resistance, Princeton, Princeton University Press, 2000.

[12] Louise Amoore, The Global Resistance Reader, Londres, Routledge, 2005.

[13] Michael Hardt et Antonio Negri, Multitude: War and Democracy in the Age of Empire, New York, The Penguin    Press, 2004.

[14] Thomas Risse-Kappen (dir.), Bringing Transnational Relations Back In: Non-State Actors, Domestic Structures and International Institutions, Cambridge, Cambridge University Press, 1995.

[15] Robert O’Brien, Anne-Marie Goetz, Jan Aart Scholte et Marc Williams, Contesting Global Governance. Cambridge, Cambridge University Press, 2000, p. 5.

[16] Voir Chaire de Recherche du Canada en Mondialisation, Citoyenneté et Démocratie, Le mouvement altermondialiste dans les relations transnationales :  Fruit de l’érosion du pouvoir de l’État à l’ère de la mondialisation ?, Paris, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, 2005, p. 9 ; David Held, Democracy and the Global Order, Cambridge, Polity, 1995 ; Mary Kaldor, Global Civil Society : An Answer to War. Cambridge, Polity, 2003 ; Daniele Archibugi, « Cosmopolitan Democracy and its Critics: A Review » , European Journal of International Relations, vol. 10, p. 437-473.

[17] James N. Rosenau,, Distant Proximities: Dynamics Beyond Globalization, Princeton, Princeton University Press, 2003.

[18] David Graeber,  Pour une anthropologie anarchiste, Montréal, Lux  Éditeur, 2006.

[19] Angus Cameron et Ronen Palan, The Imagined Economies of Globalization, Londres, Sage, 2004.

[20] Boaventura De Sousas Santos, « The WSF : Toward a Counter-Hegemonic Globalization, Part I &II » , in Jay Sen, Anita Anand, Arturo Escobar et Peter Waterman (dir.), The World Social Forum, Challenging Empires, New Delhi,  The Viveka Foundation, 2004, p. 235-245, p. 336-343.

[21] Arturo Escobar, « Other Worlds are (Already) Possible : Self-organisation, Complexity, and Post-capitalist Cultures » , in Jay Sen, Anita Anand, Arturo Escobar et Peter Waterman (dir.), The World Social Forum, Challenging Empires, New Delhi,  The Viveka Foundation, 2004, p. 349-358.

[22]  Blaise Lempen, La démocratie sans frontières : essai sur les mouvements anti-mondialisation, Lausanne, L’âge D’Homme, 2003, p. 67-82.

[23] Ibid, p. 83-96.

[24] Chico Whitaker, Changer le monde : (nouveau) mode d’emploi, Paris, Editions de l’Atelier, 2006.

[25] Peter Waterman, « The Global Justice and Solidarity Movement And The World Social Forum : A Backgrounder » , in Jay Sen, Anita Anand, Arturo Escobar et Peter Waterman (dir.), The World Social Forum, Challenging Empires, New Delhi,  The Viveka Foundation, 2004, p. 55-66.

[26] Walden Bello, Deglobalization : ideas for a new world economy, Londres, Zed, 2004.

[27] Francis Dupuis-Déri, L’altermondialisme, Montréal, Boréal, 2009, p. 59-60.

[28] Joshua Cooper Ramo, The Beijing Consensus, Londres, The Foreign Policy Center, 2004.

[29] Immanuel Wallerstein, « After Developmentalism and Globalization, What ? » , Social Forces, vol. 85, n°3, p. 1263-1278.

[30] M. Hardt et A. Negri, 2004.

[31] Jagdish Bhagwati,  In defense of globalization, Oxford, Oxford University Press, 2004.

[32] Martin Wolf, Why Globalization works, New Haven et Londres, Yale University Press, 2004.

[33] Mariella Pandolfi et Didier Fassin, Contemporary states of emergency : the politics of military and humanitarian interventions, Cambridge, MIT Press, 2010.

[34] Laurence McFalls, Doit-on intervenir, in. Guillermo Aureano, Philippe Faucher, Frédéric Mérand et Marie-Joëlle Zahar (dir.), La Politique internationale en Questions, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2009, p. 214-223.

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