Épopée philippine – épisode 6

Le 4 Juillet 2012, à Quezon City, Manille.
Magandang Hapon po !
Ako po si Sandra Vilder. Tawagin mo na lang akong Sandra.
Taga-Canada po ako.
Estudyante po ng Asian Studies. Nag-aaral ako sa Unibersidad ng Pilipinas.
Pero nakatira po ako ngayon sa Sikatuna.
Ikinagagalak kayong makilala !
Vous devinez ? Ça dit en gros : Bonjour, je m’appelle Sandra V. mais vous pouvez m’appeler Sandra. Je viens du Canada, j’étudie en études asiatiques à l’université des Philippines. Je vis à Sikatuna. Enchantée !
Les po, c’est la marque de politesse. En fait, c’est vraiment pas aussi simple que j’avais espéré ! Je me casse un peu la tête dans mes cours de tagalog. Surtout qu’on apprend des phrases, mais on a pas de vocabulaire, pas de grammaire, c’est difficile de comprendre ce qu’on dit et de retenir du coup je trouve.
En ce moment j’ai une allemande dans ma chambre. Elle travaille pour une ONG allemande qui travaille sur les Philippines. Elle est là seulement pour quelques jours. Elle est pas méchante mais je la trouve rébarbative. Déjà je suis tranquille d’habitude, et là elle m’envahit, pfff… Et puis elle a la trentaine, elle parle sur skype avec son copain tous les soirs… Les gens qui sont en couple depuis longtemps ils sont toujours un peu moins fun que les autres. (mon avis) Oh et puis les Allemands et leur austérité, heing !
Lundi j’ai passé une terrible journée. La fin de semaine entière a été consacrée à travailler sur mon devoir, qui a vaguement l’air de s’achever. Dimanche soir, je me réveille dans la nuit avec un mal de dent foudroyant. Je me tordais dans tous les sens, mais malgré mes efforts pourtant de bonne foi, la douleur ne partait pas. L’allemande à côté qui dort, je pouvais même pas gémir pour satisfaire mon envie de me plaindre. J’essaye de pas faire de bruit et je vais chercher à tâtons des cachets pour au moins avoir l’impression de pouvoir y faire quelque chose. En attendant que ça fasse effet je descend à la cuisine pour essayer de trouver un truc froid à mettre sur ma mâchoire. Je ne trouve rien, à part trois carottes enveloppées de plastique. Va pour les carottes. Ça me calme un peu et je remonte me coucher. Mais là le cachet devait descendre dans mon estomac et ça commençait à me donner des nausées. Finalement après un suspense insoutenable à côté des toilettes, rien ne se passe et je me recouche, fatiguée.
Le lendemain, le lundi donc, j’avais un examen de 7h de long pour un prof à Montréal. Il devait m’envoyer mon examen à 9h du soir, donc 9h du matin pour moi. Après ma nuit terrible je décide qu’il vaut mieux que je dorme un peu plus, maintenant que je dors. Je finis par me lever, je vais dans un café internet, je me branche, il est 10h, pas de courriel… Je lui en envoie un, commençant à paniquer. Eh oui, s’il va dormir sans m’envoyer mon examen, je perds ma journée, et les jours suivant j’ai cours, je ne pourrais pas ! C’est la fin, le drame, la catastrophe ! Vers 11h, il me réponds, ah euh oui j’ai oublié, je vous l’envoie demain ! Là je lui réponds, prête à dépecer un mouton à mains nues, que c’est impossible, que sinon je risque de m’évaporer instantanément ! Il finit par m’envoyer mon examen qui devait commencer à 9h, à midi. Je râle, parce que j’avais pas envie de passer ma journée à ça moi ! J’ai jusqu’à 19h, ok, génial.

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Après 7 longues et pénibles heures de souffrance intellectuelle, je suis prête à envoyer mon examen par courriel et là, ET LÀ !!! Plus d’internet. Niet, que dalle, pfuit, rien ! Je l’ai eu toute la journée, mais c’est 19h01 que ça décide de partir en cacahuète ! Épuisée, je trouve le moyen d’enrager, j’ai envie de mordre ! Mon cheesecake au chocolat que j’avais commandé pour m’auto-congratuler, me regarde, désolé. Je le fais emballer, je ramasse mes affaires et je cours jusqu’à chez moi. Après une journée passée à la clim, je coule du nez, j’éternue, et le dehors me parait affreusement chaud. Je commence à suer comme jamais, j’arrive, je regarde personne, je dis pas bonjour ni bonsoir, je file dans ma chambre, je rouvre mon ordi sur les toilettes parce que j’en pouvais plus (parce qu’à la fin je pouvais pas perdre une seule minute !), et je finis par lui envoyer mon examen, sur le bol des toilettes, à 19h37, transpirante comme une glace au soleil, épuisée.
Ahlala !
Eh puis mon mal de dent n’est pas réapparu, on m’a dit que c’était psychologique… Mon esprit est puissant quand même !
Il pleut beaucoup depuis une semaine, mais il fait quand même chaud. Le temps est lourd et c’est pas toujours évident de rester énergique. Et en fait les philippins sont pas du tout des super-héros ! Moi je pensais, innocemment, que les philippins étaient rodés à deux choses : la chaleur et la pluie, mais non, que dalle ! Ils sont tous mous quand il fait chaud. Et plus il fait chaud, plus ils marchent lentement, on dirait qu’ils veulent tout faire pour pas transpirer. D’ailleurs ils transpirent, c’est pas comme les japonais qui ont des pouvoirs mystiques et ne transpirent que rarement ! Ils marchent vraiment lentement, j’essaie de m’habituer, de faire pareil, mais de temps en temps je reprends mes habitudes d’arpenteuse des villes pressées. Par conséquent je crois que vue de haut, je dois donner l’impression d’une auto-école qui apprend a passer les vitesses !
Et quand il pleut, là c’est le bordel, ils conduisent de manière encore plus aléatoire et ils sont tous récalcitrants. Encore hier ! Il pleuvait comme si le ciel venait de perdre au poker, j’avais pas enviiiiiiie d’aller à l’université ! Je me disais, non mais là personne ne va y aller, tout le monde reste chez soi à regarder la télé ! Mais je me dis qu’on sait jamais, qu’un cours de tagalog perdu et je serais moi-même perdue. Je rassemble mon courage et hop je pars en jeepney. J’avais mal à la tête, tu parles la veille j’ai du me concentrer et stresser pendant 7h de temps, j’ai pas l’habitude ! J’arrive à UP, je demande la salle de cours qui avait changé et dont je n’avais pas le nouveau numéro, au département de filipino. Là on me dit que Celle qui Sait, Elle dort. Ah. Alors j’attends. Elle se réveille après vingts minutes pendant lesquelles un chat miniature a miaulé comme un damné, grimpant les marchent qui avaient l’air démesurément grandes pour cette petite chose, visiblement en train de chercher un autre chat, un peu comme un chat concierge. Après une conversation en tagalog qui se déroule devant mes yeux mais qui parle de moi, on me dit qu’il n’y a tout simplement pas cours. JE LE SAVAIS ! RAAAAH !
Pour récompenser mon effort, je me suis arrêtée là où on change de jeepney, Philcoa, pour acheter des bricoles. C’était bien parce que la pluie matait l’irrépressible « eh Ma’am » et j’étais un peu tranquille. J’ai acheté un nouveau porte monnaie (C’est l’inconvénient de se le faire voler, il faut un autre porte-monnaie ensuite, et ça fait deux semaines que je mets mes sous dans la pochette de mon drap décathlon) à 15 pesos, un t-shirt Batman de toute beauté à 125 pesos (J’ai négocié 10 pesos de rabais, grande fierté !) et un nouveau parapluie parce que le mien est déjà cassé. (c’est le troisième quand même) Ensuite devant les beaux étalages de mangues, je ne résiste pas. Le vendeur trouve l’idée saugrenue de me trouver sympa et je pense qu’il m’a raconté sa vie, mais bon j’ai pas compris un huitième. Bah, oui, fort bien. Je monte dans un jeepney et je rentre à la maison.

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À chaque fois que je vais à UP (Je rappelle que c’est le ptit nom de l’Université des Philippines) je me fais un plaisir de respirer et regarder les arbres, l’herbe… Le vert me manque ! D’ailleurs j’ai remarqué que si j’arrêtais de manger ma mangue journalière, ben je suis beaucoup moins énergique. Il y a tellement peu de fraîcheur dans les plats de Manille… Tout est frit, lourd, c’est pas génial à long terme. Alors je me suis racheté des mangues et quelques légumes pour me faire des salades à la maison et attraper quelques vitamines. Les cuisinières trouvent ça drôle que je mange autant de mangues et de salades. Même les jus, à part le jus de coco, que j’aime pas spécialement, y a pas de jus frais, c’est dommage quand on pense à tous les fruits invraisemblables qu’ils ont ! J’ai pas encore tout goûté mais ils sont bons, diversifiés et nombreux. Ils pourraient faire des plats super frais, trop bons avec ça ! Bon.
Dans deux semaines je vais à Tagaytay !
Beaucoup de complaintes j’ai l’impression à cet épisode, mais je vais tâcher d’être plus enjouée les prochaines fois.
Au fait, quelqu’un a lu Sputnik, mon amour ? si oui, donnez-moi vos impressions svp ! Je dois écrire 2000 mots sur ça. Je l’ai pas encore lu et c’est pour vendredi ;p
« Il releva les yeux, se redressa et tapa bravement le pavé sous la pluie rageuse et la chaleur mordante ».

Sandra Vilder (Mon blog d’écriture http://facondeetbagou.wordpress.com/ )

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