Par Michaël Trahan
C’est chaque nuit la même lumière,
les mêmes fantômes, les mêmes fleurs.
Histoire, énigme, cercle. Lettres.
La répétition m’incombe exactement.
Je vois le grand ciel, la catin noire,
la vraie de vraie peur qui mord au ventre.
La chambre, la fenêtre, le lit qui est grand
et qui est vide. Le drap plié, déplié.
Je ne dors plus je veille les pierres
qui tombent et le vent qui rend fou.
Je compte les pétales, les feuilles –
ma maison est légère (trop légère).
Je tourne les pages pour me rassurer.
Mes fantômes, mes beaux fantômes
découchent un soir sur deux.
J’attends, la nuit venue, j’attends.
Je suis le portrait craché
d’une cause perdue.
***
Michaël Trahan est né en 1984. Il a grandi à Acton Vale, en Montérégie, avant de s’établir à Montréal au début des années deux mille. Au Quartanier, il a publié La raison des fleurs (2017 – Prix littéraire du Gouverneur général, catégorie poésie) et Nœud coulant (2013 – prix Émile-Nelligan, Prix du Festival de la poésie de Montréal et prix Alain-Grandbois de l’Académie des lettres du Québec). Il est aussi l’auteur d’un essai sur la réception de Sade, La postérité du scandale (Nota bene, 2017), et d’une thèse de doctorat sur la lisibilité de la littérature dans le champ poétique français contemporain. Il est directeur littéraire de la revue Estuaire.
Références
Trahan, Michaël. 2017. « La raison des fleurs ». Montréal : Le Quartanier, Coll. «Série QR». Extrait : p. 15. © Le Quartanier, © Michaël Trahan.