Par Kenta Mouphas
Les plantations de palmiers pour le commerce de l’huile de palme ainsi que l’exploitation forestière sont les principaux facteurs causant la déforestation de la forêt tropicale malaisienne. Or, cette forêt était autrefois utilisée par les peuples autochtones de la région pour subsister à leurs besoins. De nos jours, le gouvernement impose des restrictions aux peuples autochtones en ce qui a trait à l’utilisation des terres, avec pour motif principal la protection de l’environnement. Toutefois, ces restrictions n’ont pas empêché les autochtones de s’adapter au changement, et de prendre avantage des nouvelles lois sur la propriété des terres.
La forêt tropicale en Malaisie est un puit de ressources alimentaires et de revenus importants pour les autochtones. À quatre kilomètres du village, dans la zone forestière qu’ils appellent puru, ils récoltent des fruits, chassent les animaux et utilisent le bois et les herbes médicinales dont ils ont besoin.
Ladangs est le mot qu’ils utilisent pour désigner les terres utilisées pour l’agriculture sur brûlis. Ces terres, qui sont une source de revenus sûre pour ces derniers, leur permettent parfois de s’en sortir sur le plan financier. Toutefois, l’État imposa des lois pour restreindre l’utilisation des ladangs. De leur point de vue, les autochtones mettraient en danger l’écosystème, et seraient responsables du déboisement du pays par la pratique de l’agriculture sur brûlis. Pourtant, la technique de l’abatis-brûlis serait même bénéfique si le temps de repos entre les plantations est bien respectée. De plus, les plantations diversifiées des autochtones joueraient le rôle de refuges pour la faune locale (Ichikawa, 2006: 404).
Les vraies causes du déboisement progressif de la forêt malaisienne seraient le commerce du bois, les monocultures, la construction de routes ainsi que l’urbanisation.
Ces phénomènes seraient apparus très rapidement dans le but de répondre aux besoins socio-économiques de la région. Cela concerne tout particulièrement la plantation de palmiers pour le commerce de l’huile de palme, dont la popularité ne fait que croître, et le commerce du bois, très prisé dans la région depuis l’ère coloniale. Les palmeraies destinées à la confection de l’huile de palme occupaient, en 2004, 4% du territoire du pays (Ichikawa, 2006: 404).
Les terres sont gérées par l’État et soumises à ses lois. Les autochtones ne sont pas toujours d’accord avec elles puisque les terres qu’ils utilisaient depuis toujours leur sont confisquées. La loi des vingt-cinq degrés imposerait des restrictions sur les terres ayant une inclinaison de vingt-cinq degrés et plus, avec pour objectif de réduire l’érosion des sols. Or, dans l’État de Sabah, située sur l’île de Bornéo, 64% des terres possèdent une inclinaison de 25 degrés et plus. De ce cas, elles sont déclarées comme zones protégées, le tout limitant encore davantage l’exploitation de la forêt et de ses ressources. De plus, les autochtones de la région ne possèdent aucun titre de propriété, que ce soit individuellement ou collectivement (Lunkapis, 2015: 4).
En conséquence, le terrain n’étant pas conforme à loi, il est devenu interdit d’y pratiquer l’agriculture, plongeant ainsi la communauté dans la pauvreté.
Les communautés autochtones se retrouvent dans l’incapacité de demander des subventions ou des prêts dans les institutions financières ou à l’État, puisqu’elles ne possèdent pas de propriété foncière ou ne peuvent pas prouver en posséder une. L’un des problèmes est qu’il arriverait souvent qu’une personne et une compagnie fassent une demande pour le même titre de propriété. En conséquence, la demande du particulier ne peut être traité car on favoriserait celle des compagnies qui pourtant aurait été faite ultérieurement à la leur (Lunkapis, 2015: 8).
Pourtant, certaines communautés ont réussit à déjouer les lois pour continuer de gagner un revenu. La loi « Sabah Rubber Industrial Board » permet l’utilisation de ces terres à vingt-cinq degrés ou plus. Les communautés sont autorisées à exploiter ces terres pour cultiver du caoutchouc. L’État les aiderait en fournissant les engrais, les insecticides et autres technologies de pointe. Il permet cela car le commerce du caoutchouc rapporte un gros bénéfice au pays.
De plus, des programmes pour éduquer ces communautés sur les enjeux environnementaux du pays auraient été mis en place. Ces communautés y voient une autre manière de faire un plus gros bénéfice, et de promouvoir leur culture au niveau international (Lunkapis, 2015: 9).
L’État malaisien restreint l’utilisation des terres et de la forêt sous le prétexte de la préservation de l’environnement, tel que minimiser l’érosion des sols. Les autochtones, ne pouvant plus utiliser ces terres, trouvent donc d’autres moyen d’obtenir un revenu en tournant ces lois à leur avantage, avec comme exemple la plantation de caoutchouc. Avec ces programmes d’éducation sur l’environnement mis en place par l’État, ils y verraient là une opportunité encore plus grande pour améliorer leur situation financière ainsi que pour faire rayonner leur culture.
Bibliographie:
Ichikawa, Masahiro. 2007. » Degradation and loss of forest land and land-use changes in Sarawak, East Malaysia: a study of native land use by Iban » Ecological Research , Vol.22: pp 403-413
Lunkapis, Gaim. 2015. »Secure land tenure as prerequisite towards substainable living: a case study of native communities in Mantob village, Sabah, Malaysia « SpringerPlus, Vol.4: pp- 110