Propreté, sécurité et ordre: les trois mots essentiels au développement de Singapour

Par Chloé Bérubé

« Il est interdit de mâcher du chewing-gum dans le métro. On ne fume dans la rue qu’aux endroits spécifiquement désignés. Un mégot par terre, c’est 500 dollars d’amende, un papier entre 500 et 1000 dollars »[i]. En anglais on dit souvent que Singapore is a fine city. En effet, dans les deux sens du terme, cette affirmation n’est pas erronée. C’est d’ailleurs grâce à de stricts politiques et règlements que le gouvernement de Singapour a pu établir un ordre public exemplaire. De loin l’une des villes les plus sécuritaires et propres au monde, Singapour a réussi à attirer un très grand nombre de capitaux et d’investissements étrangers.

Singapore is a fine city

Ce qui dérange surtout ce n’est pas de tels règlements, mais bien le montant des amandes et les peines pour de telles infractions. À Singapour, vous pouvez être condamné à une amende ou même arrêté simplement pour avoir craché, jeté des déchets ou de la gomme à mâcher. Cet ordre public découle « d’un ensemble de règles qui ont été progressivement imposées par les autorités de la petite république depuis les années soixante et dont le respect est assuré par la menace de sanctions sévères, prenant généralement la forme d’amendes fort coûteuses »[ii]. Il est également très difficile d’échapper à ses règlements. Par exemple, sur Orchard Road, une célèbre rue commerçante de la cité-État où plus d’une dizaine de millier de personnes s’y promènent chaque jour, nous pouvons y observer environ 400 policiers de la National Environment Agency habillés en civil et qui ont comme seul mandat de faire respecter les règles de propreté[iii]. Par conséquent, « les règles de la cité, notamment celles qui concernent le respect de la propreté des lieux publics, sont largement respectées »[iv].  Ainsi, suivant un contrôle des politiques publiques très strictes, il en vient à se questionner sur l’utilité ainsi que la nécessité de ses lois et règlements.

L’histoire du chewing-gum

« Dans un pays où tout est réglementé, ordonné, aseptisé, le chewing-gum a été officiellement déclaré nuisance non dégradable »[v] il y a environ vingt ans. La principale raison? Un jour, les portes du métro de Singapour n’ont pas été capables d’ouvrir à cause d’une gomme à mâcher qui en bloquait le mécanisme[vi]. Connues de pratiquement tous les Singapouriens, une personne peut recevoir jusqu’à 1000$ pour une gomme à mâcher jeté par terre. À cela, peut également être ajouté des travaux d’intérêt public[vii]. Cela peut paraître absurde ou même exagérer, mais dans la cité-État ce règlement est tout à fait légitime. Encore aujourd’hui, alors que certains considèrent cette règle superflue, le gouvernement affirme que les problèmes de propreté encourus ont été éliminés avec de tels règlements. Petit anecdote, « les autorités singapouriennes avaient même refusé en 2005 un dernier chewing-gum à un condamné à mort parce que c’était trop grossier, même dans le couloir de la mort »[viii].

Les répercussions de ces politiques

« On peut s’interroger sur les motifs qui permettent aux Singapouriens de composer avec une gouvernance aussi serrée, omniprésente [et] intelligente »[ix]. Ce qui motive les habitants demeurent toutefois la prospérité économique que connait la petite île. En effet, depuis 1960, Singapour connait une croissance spectaculaire dans plusieurs domaines. D’ailleurs, le niveau de consommation ne cesse d’augmenter et « au cours des quarante dernières années, la croissance [du] niveau de vie et plus particulièrement du pouvoir d’achat des individus a sans doute été la plus forte au monde »[x].

Outre cela, entre 1961 et 2010, la densité de population a connu une croissance de 185%. En 2013, ce chiffre atteignait 7,540 personnes par km2[xi]. Cela fait de Singapour le troisième État au monde après Macao et Monaco en terme de densité de population. Ainsi, gérer une population de plus de 5,3 millions de personne dans un territoire d’une superficie de 716.1 km2 demande un très grand contrôle de la part de l’État, du moins c’est ce que le gouvernement singapourien justifie[xii]. L’État ne se gène pas de vanter l’efficacité de ses mesures. En effet, au XXIe siècle, « Singapour est la ville-État la plus sûre du monde et attire les expatriés beaucoup plus facilement que Hongkong »[xiii].  La ville est également reconnue pour sa propreté exemplaire[xiv].

Pour ainsi dire, depuis plus de quarante ans, le Parti d’action populaire a principalement mis en place ces politiques afin d’aider au développement de l’île. C’est d’ailleurs grâce à la propreté, l’ordre et la sécurité qui règne dans la ville que le développement  économique de Singapour a connu une croissance rapide. Il faut également tenir compte du contexte géopolitique unique à Singapour. Évidemment, le modèle de la ville s’adapte à sa situation de cité-État ce qui rend plus facile et rapide de mettre en place et de faire appliquer ce type de loi. Il serait donc difficile d’utiliser des politiques comme celles-ci à l’échelle d’un grand État.

Références

Compain, Florence. 2010. En ligne. Le chewing-gum ne passera pas par Singapour. En ligne. http://www.lefigaro.fr/international/2010/03/05/01003-20100305ARTFIG00402-le-chewing-gum-ne-passera-pas-par-singapour-.php (Page consultée le 24 septembre 2013).

Department of Statistics Singapore. 2013. Latest Data. En ligne. http://www.singstat.gov.sg/statistics/latest_data.html#12 (Page consultée le 24 septembre 2013).

De Koninck, Rodolphe. 2006. Singapour : la cité-État ambitieuse. Paris : la documentation française, 112-17.

Rodier, Arnaud. 2010. Singapour, champion du monde de la croissance. En ligne. http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2010/08/09/04016-20100809ARTFIG00484-singapour-champion-du-monde-de-la-croissance.php (Page consultée le 24 septembre 2013).

Thomas, George. 2008. The Cleanest City in the World. En ligne. http://www.cbn.com/cbnnews/367205.aspx (Page consultée le 29 octobre 2013).


[i] Rodier 2010

[ii] De Koninck 2006, 112-3

[iii] Thomas 2008

[iv] De Koninck 2006, 113

[v] Compain 2010

[vi] Id.

[vii] Id.

[viii] Id.

[ix] De Koninck 2006, 116

[x] Id.

[xi] Department of Statistics Singapore 2013

[xii] Id.

[xiii] Rodier 2010

[xiv] De Koninck 2006, 12

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