Selon la FAO, la production vietnamienne annuelle de ressources aquatiques vivantes est évaluée en 1994 à 1 150 000 tonnes dont 200 000 issues de l’aquaculture[1] ; en quelques années seulement, le Vietnam est devenu l’un des leaders mondiaux du marché de la crevette. Ceci implique de surcroit, d’importantes modifications agricoles, soit une exploitation intensive de l’agriculture et des ressources naturelles à l’ère de la mondialisation. L’adoption d’un mode de développement impliquant une urbanisation et une industrialisation rapide positionne le Vietnam en proie à une rapide dégradation de son environnement.
Constat écologique
Les années 1990 ont vu naître une idéologie selon laquelle les innovations technologiques et industrielles réalisées par les pays développées pouvaient s’appliquer aux pays du tiers-monde afin d’avoir une croissance et un développement économique comparable. Aujourd’hui le Vietnam est le cinquième exportateur mondial de crevettes [2]; industrie vitale pour l’économie. En effet, le secteur des pêches et de l’aquaculture est un secteur en pleine mutation ayant des enjeux environnementaux.
Le Vietnam est à la fois actrice et victime de la dégradation environnementale. Ce choix de ce type de développement fondé sur l’exportation et le libéralisation commerciale contribue à accroître les demandes extérieures sur les ressources naturelles[3]. Parmi les marchés y figurent l’Union Européenne ; en 2016, « un prêt européen de 2.5 millions d’euros a permis à des petits producteurs de se lancer dans ces agricultures intensives »[4]. L’esprit d’une expansion industrielle et d’une consommation régionale et mondiale toujours plus grande transforme plusieurs régions ; le Vietnam se retrouve actuellement en situation de crise environnementale.
La dégradation environnementale semble être corrélé au développement économique ; par exemple, le bassin du Mékong dont le Vietnam est dépendant à des fins d’irrigation agricole, est une région menacée par les grands aménagements sur le fleuve. L’on constate une érosion des côtes, un appauvrissement des sols, une pénétration des eaux salées et une contamination de l’eau dû notamment ; ainsi l’économie vietnamienne et des États riverains se trouvent fragilisée car ces facteurs ont un impact considérable sur les 4800 kilomètres du Mékong. En effet, l’industrialisation des zones a des impacts au-delà des frontières créant des litiges régionaux.
Sécurité environnementale
Les nouveaux objectifs du millénaire inversent la tendance actuelle en intégrant les principes du développement durable dans les politiques et programmes nationaux. Pendant les années 1980, la production rizicole intensive était l’objectif recherché, toutefois, cet objectif a évolué au cours des années 1990[5].
La coopération régionale tend de plus en plus à percevoir et à traiter les enjeux environnementaux comme des problèmes de sécurité transnationale. L’urgence de l’état de l’écologie vietnamienne pose la question de la préservation des ressources halieutiques, de nombreuses espère animales et végétales ; ceci encourage le gouvernement du Vietnam a participé dans des projets régionaux malgré des divergences idéologiques.
La Mekong River Commission (MRC) dont le Vietnam est membre, est une forme de coopération régionale qui a pour but de coordonner une aide à la gestion de l’eau et des ressources ; une forme de sécurité en termes de défense des intérêts nationaux. Au niveau international, « le PNUD est redevenu un acteur du développement de la MRC et plusieurs agences nationales appuient cet effort dont l’ACDI ou le GTZ »[6]. Toutefois, la mise en place du MRC ne s’accompagne pas forcément d’une flexibilité des souverainetés des pays riverains.
Par ailleurs, le rôle de l’ASEAN dans ce phénomène est d’intégrer les préoccupations environnementales afin d’engager des mécanismes de développement durable. Ainsi, plusieurs coopérations bilatérale et multilatérale prennent place dans le domaine de l’environnement ; par exemple, un mémorandum d’entente est conclu en 2000 entre la Corée et le Vietnam pour un aménagement respectueux de l’environnement.
Pour conclure, « les rapides avancées technologiques et les changements sociaux au Vietnam menacent sérieusement la durabilité des ressources naturelles et des processus écologiques ». [7]
Récemment, le gouvernement vietnamien cherche à s’impliquer d’avantage ; une dynamique coopérative au niveau régional est donc important. Ceci permet d’illustrer un changement de la considération de l’environnement comme facteur d’insécurité par les États et l’ASEAN.
[1] Lazard, Jérôme et Philippe Cacot. 1996. « Systèmes de production aquacoles au Vietnam : situation, perspectives et enjeux de recherche ». Agricultures des deltas : 127-136.
[2] Bertrand, Marie-Noelle. 2017. « Aquaculture. Quand la crevette vietnamienne drague l’Europe ». Humanité, 11 décembre : 1-3.
[3] Dupetit, Magali. 2008. La question environnementale en Asie du Sud-Est : l’évolution des enjeux sécuritaires régionaux et le rôle de la Chine. Institut de recherche stratégique de l’École militaire, Sciences Po Paris.
[4] L’industrie de la crevette vietnamienne. 2017. En ligne. https://www.egaliteetreconciliation.fr/L-industrie-de-la-crevette-vietnamienne-explose-47115.html (page consultée le 20 juin 2018).
[5] Tanguay, Louis et Rodolphe De Koninck. 2014. « L’agriculture durable au Vietnam : une étude de cas dans le delta du Mékong ». Revue électronique en sciences de l’environnement 14 (n 1) : 1-20.
[6] Affeltranger, Bastien et Frédéric Lasserre. 2003. « La gestion par bassin versant : du principe écologique à la contrainte politique – le cas du Mékong ». Revue électronique en sciences de l’environnement 4 (no 3) : 1-20.
[7] Cong Kiet Le. 1996. « La degradation de l’environnement au Vietnam ». Cahiers d’outre-mer 49 (no 196) : 361-376.
Iconographie
Vaughan, Jessy. 2017. « Au Vietnam, la crevette, bonne fortune des riziculteurs ». L’Union. En ligne. http://www.lunion.fr/44013/article/2017-08-09/au-vietnam-la-crevette-bonne-fortune-des-riziculteurs (page consultée le 20 juin 2018).