Germain Schmid, étudiant à l’Université de Montréal
15 jours d’absence, ça se voit. Ça se voit du point de vue du voyageur. Et cela permet de vivre une autre expérience: les questions que l’on nous pose au retour.
En tant qu’étudiant, je rencontre essentiellement d’autres étudiants. Après avoir expliqué les valoches que je me trimbale sous les yeux (le manque de sommeil), le bronzage approximatif et la fièvre attrapée dans un aéroport, surviennent les éléments intéressants.
Belém, c’est où? Il y fait beau? Première question rituelle. La couverture médiatique au Québec n’a donc pas permis de parler suffisamment du FSM pour le localiser au Brésil. L’aspect « camping de la jeunesse » est une découverte.
C’était comment? Une façon détournée d’exprimer le fait qu’on ne sait pas vraiment de quoi il s’agit. A partir de là, c’est le début d’un travail explicatif, qui fait entièrement parti du rôle du participant. En effet, se rendre au FSM, c’est aussi dès lors que l’on est concerné, endosser la responsabilité de transmettre sur l’évènement et son contenu.
Tu as payé ton voyage? Une question très intéressante qui revient presque à tous les coups en 2ème ou 3ème position. Il semble un fait acquis que tout esprit raisonnable ne paierait pas son billet: on ne va dans une « conférence » aussi loin que si on est obligé d’y aller ou parce qu’elle est offerte. Dans l’imaginaire collectif, le Forum Social Mondial n’est ouvert qu’aux organisations. Le FSM est ainsi souvent vu comme un lieu de travail entre des mouvements sociaux. En effet, les délégations d’étudiants et d’individus présents à leurs frais sont rares si l’on exclu les brésiliens. Il s’agit dans quelques cas d’étudiants en doctorat ou effectuant des recherches précises sur les mouvements sociaux ou sur des problématiques particulières.
Qu’est ce que tu as appris? L’à-priori est que nous nous sommes déplacés pour écouter. Cela révèle peut être le peu de crédibilité que j’ai en tant qu’intervenant potentiel. Je crois surtout que cela fait ressortir que nous sommes des étudiants formatés: nous allons voir des conférences écouter des professeurs. Or, pour nous tous, il semble évident que nous avons participé au FSM, chacun à notre manière.
Il y a des questions que l’on ne m’a pas posées, et que souvent j’aurais souhaité entendre. Il s’agit de l’expérience vécue, du contenu des ateliers, des combats sociaux, des conclusions du FSM….
Cela démontre une faiblesse de communication du FSM: la plupart des gens ne savent pas qu’il a eu lieu. Au delà, la plupart des gens ignorent de quoi il s’agit. Il faut se sentir concerné, il faut obtenir que chacun sache qu’il a la possibilité de construire une alternative, il faut concerner le monde.
Il faut aussi sortir des cases. Notre monde est vu comme fini dans l’inconscient collectif: il est vu comme un choix entre des systèmes politiques existants, entre des évènements existants, entre des métiers existants. Or le FSM le montre: il est en lui même un évènement en invention, un OSNI (objet social non identifié) entre les colloques, les conférences, les rassemblements, les fêtes. Il est en soi une alternative. Nous devons réapprendre à créer des possibilités!