GUERRE ET DÉVELOPPEMENT EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Par Sydney Taylor-Wingender

La République Démocratique du Congo (RDC), fait face, encore aujourd’hui, à plusieurs obstacles en ce qui concerne son développement social et économique. L’espoir d’un Congo prospère fut le rêve de plus d’un.Lumumba, le principal leader de l’indépendance nationale de 1960, voulait un Congo uni dans une pluralité culturelle, un Congo où chaque Congolais put s’exprimer librement dans sa langue maternelle, un Congo où les nationaux devraient écrire leur propre histoire, avec autonomie (Kachelewa 2001, 80).

Les conflits qui ont marqué l’histoire congolaise remontent jusqu’à l’époque coloniale. Alors que la guerre semble y être un problème chronique, le développement reste, pour plusieurs, la solution à tous ces maux. Nous pouvons donc nous poser cette question : est-ce que le développement pourrait être un remède aux récurrents conflits armés en RDC? Nous commencerons donc par affirmer en quoi le développement pourrait être un remède à la violence. Par la suite, à travers différents éléments, dont l’unité d’analyse de la violence, l’ethnicité et le territoire, nous déterminerons les nouveaux défis auxquels fait face le développement dans la région.

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Un enfant soldat en RDC

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Dans leur article traitant du phénomène de la reprise économique post-conflit, Flores et Nooruddin arrivent à plusieurs conclusions en ce qui concerne les politiques nécessaires aux périodes suivant un conflit armé. Leur thèse principale, soutenue par de nombreuses analyses statistiques, est l’affirmation qui suit : « our analysis, consistent with that of Collier and his World Bank team (2003), indicates that countries that do not recover economically within one year face dramatically lower odds of avoiding further violent conflict » (Flores et Nooruddin 2009, 22). Ils soutiennent également que l’aide étrangère est plus efficace lorsqu’elle est acheminée dans une période suivant un conflit armé (Flores et Nooruddin 2009, 23). Ces conclusions prouvent donc que, parmi plusieurs facteurs, le développement économique joue un rôle important dans la prévention de conflits armés. Cela dit, plusieurs nouveaux enjeux rendent cette tâche de plus en plus ardue.

Depuis les dernières années, l’étude des conflits armés en RDC et en Afrique subsaharienne a changé d’unité d’analyse : « dans tous les cas, la violence a cessé d’être un monopole de l’État. Elle est désormais accessible à toutes les catégories populaires, en particulier aux groupes marginalisés » (Maindo 2007, 21). Cette citation nous laisse donc croire que la question de la violence ne peut être réglée par des moyens formels, puisque les acteurs impliqués font de plus en plus partie du secteur informel. Ce premier aspect nous montre que, même si le développement peut opérer dans un tel contexte, la tâche s’en retrouve tout de même fortement complexifiée. Un second aspect, celui de l’ethnicité, se rattache à une dimension encore plus délicate. Jean-François Hugo, spécialiste de l’Afrique centrale pour l’Union Européenne, aborde la résurgence de l’ethnie en RDC comme étant une « référence identitaire indépassable dans le paysage politique congolais » et ajoute que « la multiplication des partis politiques, leur absence de programme et le désarroi lié à la paupérisation de la population font de l’ethnie un point d’ancrage auquel les électeurs peuvent se référer » (Hugo 2006, 113). L’unification politique est donc difficilement envisageable dans un contexte où le premier référent identitaire est l’ethnie, et non l’État. Dans cette situation, un développement économique est peu probable. Le troisième aspect, celui du territoire, est également élaboré par Jean-François Hugo. Il affirme que les conflits auxquels font face la RDC sont désormais interreliés à ceux auxquels font face le Rwanda et l’Ouganda. « Les dynamiques conflictuelles en RDC sont étroitement interdépendantes de celles qui minent l’ensemble de la région des Grands-Lacs » (Hugo 2006, 115). Autrement dit, on ne peut aborder le sujet de la violence au Congo sans y intégrer des éléments exogènes, provenant des pays voisins. Ce nouvel aspect rend l’analyse de la reprise post-conflit d’autant plus embrouillée. Pour tout dire, l’informalisation des conflits armés, l’ethnicisation des référents identitaires et l’interdépendance des conflits dans la région des Grands-Lacs représentent de nouveaux défis auxquels doit faire face le développement de la République Démocratique du Congo.

Pour terminer, nous avons vu que le développement économique reste un remède efficace contre la récurrence des conflits armés en RDC. Nous avons également vu que les nouveaux réseaux informels, l’ethnicisation du politique et l’interdépendance régionale des conflits rendent la tâche du développement plutôt ardue. Cela dit, la violence qui a marqué l’histoire congolaise se doit d’être perçue comme un message. Tout comme l’affirme Alphonse Maindo, « cette violence multiforme n’est pas absurde ni même gratuite. Elle suit les logiques des acteurs, et, de ce fait, elle est porteuse elle est porteuse de messages sociaux et politiques » (Maindo 2007, 291).

Bibliographie

Flores, Thomas Edward et Irfan Nooruddin. 2009. « Democracy under the Gun Understanding Postconflict Economic Recovery ». Journal of Conflict Resolution 53 (février): 3-29.

Hugo, Jean-François. 2006. La République Démocratique du Congo : une guerre inconnue. Paris : Éditions Michalon.

Katchelewa, Shimbi Kamba. 2001. L’est du Congo-Zaïre : Uvira, aux sources d’une conscience rebelle. Saint-Léonard : Éditions 5 Continents.

Maindo, Alphonse, dir. 2007. Des conflits locaux à la guerre régionale en Afrique centrale : le Congo-Kinshasa oriental, 1996-2007. Paris : L’Harmattan.

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08

04 2010

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