Libre(s) Pensée(s) contre Pensée Unique
Par Anthony Côte, étudiant à l’Université de Montréal
Quand quelqu’un demande ce qu’est un Forum Social Mondial, on lui dit que c’est un événement regroupant de manière plus ou moins régulière les personnes qui sont en désaccord avec le système et le monde tel qu’il est, c’est à dire rempli d’injustices inutiles, etc…
Mais il y a un aspect en particulier du FSM que, à mon avis, n’est pas assez mis de l’avant, à savoir le rôle que ce dernier joue en tant que vecteur de la libre pensée face à la pensée unique.
Je vais donc essayer ici de vous donner un aperçu de l’affrontement entre ces deux pensées puis du rôle joué par le FSM dans ce dernier.
La pensée unique est celle qui tend à régir notre système actuel. Appelons ce dernier le système capitaliste.
La libre pensée est par définition multiple car en prônant que chacun doit essayer de penser par lui-même, elle donne naissance à des idées différentes, alternatives. Et je pense que le FSM est un des espaces où cette libre pensée s’épanouit le plus.
Parlons plus concrètement maintenant et regardons de plus près les deux forces en présence.
Sans être caricatural, nous pouvons dire que le système capitaliste, en dehors du fait qu’il soit bon ou mauvais a souvent été présenté comme la seule solution viable. «There is no alternative». Il n’y a pas d’alternative…tels étaient les mots de Margaret Thatcher (Première Ministre du Royaume-Uni de 1979 à 1990) lorsqu’elle imposa un programme néo-libéral à son pays. Ronald Reagan fit de même aux États-Unis. Je ne cherche pas ici à savoir si que ce «traitement de choc» était nécessaire. Ce n’est en effet pas le but de cet article.
Le but est de bien montrer cette tendance du capitalisme à vouloir «endoctriner» le plus de personnes possible en les incitant à ne pas remettre en cause les choses telles qu’elle sont étant donné qu’un autre monde est impossible.
Le Forum Social Mondial en naissant peu après le début de ce siècle a remis en cause, il me semble, cette Pensée Unique.
Ainsi, le FSM ne se fixe pas uniquement comme objectif de faire passer la mouvance altermondialiste de l’opposition au système vers la proposition d’alternative. Cet espace vise en plus à être ouvert à TOUTES les propositions d’alternatives, en les encourageant à se traduire par des actions concrètes mais en ne favorisant pas, dans la mesure du possible, une solution par rapport à une autre. Le FSM fonctionne plutôt par consensus quand il doit absolument prendre une décision commune à tous.
Évidemment des problèmes subsistent comme la légitimité du Conseil International à gérer le processus du FSM, ce dernier n’ayant jamais fait l’objet d’une quelconque élection qui lui aurait donné mandat d’action.
Il est aussi flagrant que le Forum est encore loin de son objectif qui est de faire émerger des propositions vraiment concrètes. Quelques-unes existent mais l’effort n’est pas encore toujours systématique ni coordonné.
Mais prenons le problème de la sécurité internationale, exemple parmi tant d’autres : certains proposent une simple réforme du Conseil de Sécurité de l’ONU, d’autres la création de nouvelles institutions internationales. Au niveau économique, les partisans de la décroissance tiennent leurs discours à quelques encablures de ceux qui réfléchissent à une aide au développement plus juste et efficace. On voit donc que les solutions proposées sont multiples et toutes examinées avec la même honnêteté par les participants, bien qu’ils aient toujours une préférence personnelle pour l’une ou pour l’autre (ce qui est normal et souhaitable).
C’est pourquoi je soutiens ici que le FSM est un des espaces majeurs de(s) libre(s) pensée(s) au sein du système global dans lequel nous vivons et où malheureusement, la Pensée Unique prends bien trop de place…
Et à ceux qui soutiendraient encore qu’il n’y a aucune alternative, bien que je respecte leur opinion, je leur conseillerai de réfléchir activement à cette magnifique pensée d’Edgar Morin :
«Vouloir un monde meilleur, ce qui est notre principale aspiration, ne signifie pas vouloir le meilleur des mondes. À l’inverse, renoncer au meilleur des mondes n’est pas renoncer à un monde meilleur. »
(dans Éduquer pour l’ère planétaire)