Le détroit de Malacca est l’une des plus importantes voies de navigation au monde, et connaît un trafic équivalent à celui du canal de Suez.
Il constitue l’une des principales voies de passage entre l’océan Indien et l’océan Pacifique, reliant quatre des pays les plus peuplés au monde : l’Inde, l’Indonésie, le Japon et la Chine. Quelques chiffres en témoignent :
- Plus de 50 000 navires l’empruntent chaque année ;
- Entre 20 et 25 % du transport maritime mondial y passe chaque année ;
- La moitié du commerce maritime de pétrole y transite (plus de 11 millions de barils en 2003, soit 1 700 000 m3), et ce trafic est en constante augmentation, suivant la croissance économique chinoise.
Les détroits internationaux ont également une importance géopolitique. La proximité des rives confère à ces lieux une dimension géostratégique particulière. La logique militaire a toujours justifié de garder les détroits ouverts. Les détroits des Dardanelles ou d’Ormuz sont ainsi restés célèbres dans l’histoire. Ils sont restés dans les mémoires comme des enjeux majeurs pour les questions de sécurité et pour le déploiement des forces navales. Les détroits sont ainsi souvent gardés par des bases militaires et demeurent des “points chauds”.
Dans les détroits reconnus internationaux, les États riverains ne peuvent aménager et gérer ces espaces sans tenir compte du droit international. Ils ne peuvent pas ainsi affirmer unilatéralement leur souveraineté sur les eaux des détroits et restreindre leur franchissement à des navires étrangers. Ils ne peuvent pas non plus imposer des taxes aux navires empruntant ces détroits ou y entraver la circulation. Les détroits présentent des enjeux non seulement pour les États riverains, mais aussi et surtout pour les États utilisateurs, parfois très éloignés, et les compagnies maritimes.
Les tentatives d’appropriation du détroit de Malacca par l’Indonésie et la Malaisie au lendemain de l’indépendance ont ainsi échoué et cristallisé les enjeux géopolitiques de la Guerre froide. À la suite de la convention de Genève de 1958, les gouvernements indonésien et malaisien étendent la limite de leurs eaux territoriales à 12 milles nautiques (22,2 km). Le détroit de Malacca, dont la largeur est inférieure à 20 milles dans sa partie la plus étroite, se trouve donc recouvert par les eaux nationales des deux pays, menaçant la libre circulation maritime. Le 16 novembre 1971, les deux gouvernements déclarent conjointement que le détroit de Malacca n’est pas un détroit international, mais ils autorisent son franchissement par des navires étrangers en vertu du principe de “passage innocent”.
Dans les années 1980, le détroit de Malacca devient également un passage stratégique pour la Chine du fait de ses ambitions en mer de Chine méridionale. Les accords signés avec le gouvernement du Myanmar lui permettent d’occuper des bases navales de la mer d’Andaman. Depuis 1992, la Chine développe des infrastructures militaires sur les petites îles de Hainggyi, à l’embouchure du fleuve Irrawady et sur les îles Coco, situées dans le golfe du Bengale à 300 km au sud de la Birmanie continentale. Elle est ainsi en mesure de contrôler les flux entre l’Océan Indien et la mer d’Andaman. Depuis l’été 1994, Rangoon accorde des facilités supplémentaires d’installation à la République Populaire de Chine dans les îles de Sittwe et Zadetkyi, localisées au large de la côte de Tenasserim, à proximité de l’entrée nord du détroit de Malacca. La Chine dispose ainsi d’une présence militaire des deux côtés du détroit de Malacca, et d’avant-postes maritimes défensifs protégeant son flanc sud. Elle devient donc une menace potentielle pour les pays de l’Asean et pour le Japon : les flottes militaires chinoises ont désormais la possibilité de bloquer l’accès au détroit de Malacca.
Ils ont conservé leurs alliances bilatérales traditionnelles avec l’Australie, le Japon, la Corée du Sud, la Thaïlande et les Philippines. De plus, la politique indienne de non-alignement, qui contestait naguère la présence des bases américaines, appartient au passé. L’Inde développe une coopération de défense avec les États-Unis de plus en plus active. Après les attentats du 11 septembre 2001, la militarisation de l’Océan Indien et le rapprochement militaire entre les États-Unis et l’Inde se sont accélérés et le détroit de Malacca est placé sous une surveillance accrue. Les marines nationales américaines et indiennes ont notamment intensifié leurs patrouilles communes dans le détroit de Malacca : plus de 200 en 2002 contre seulement 25 en 1998.