Par Anne-Catherine Touchette
Singapour connait aujourd’hui une réussite économique impressionnante. Or, l’État que nous connaissons aujourd’hui il y a exactement 54 ans venait tout juste de devenir indépendant et vivait des problèmes socioéconomiques insurmontables.
L’ile de Singapour a été colonisée pour la première fois par le domaine colonial néerlandais en 1685. C’est en 1819 que Thomas Stamford Raffles arrive à Singapour et met en place un comptoir sous le nom de East India Company, alors que l’ile est sous le contrôle du sultan de l’État Johor. L’ancien comptoir britannique, décolonisé, ne sait comment vivre comme État indépendant et s’intègre à la fédération de la Malaisie. L’ile est peuplée majoritairement de Chinois, ils formaient 80 % de la population. Il y a aussi une minorité malaise privilégiée, qui elle représentait 11 millions sur un total de 1 700 000 habitants, contribuant à la naissance de tensions ethniques au sein du territoire singapourien. Différentes ethnies telles que les Malais, les Chinois, les Indiens et les Eurasiens étaient tous confrontés au projet du nationalisme malais et la création d’un état islamique sans aucune distinction. Aux mois de juillet et septembre 1964, de sanglantes émeutes raciales ont éclaté dans les rues de Singapour, ce sont les extrémistes malais qui voulaient détruire l’omniprésence chinoise dans la métropole (Le Figaro. 2015). C’est ainsi qu’avec ces émeutes sanglantes et ce problème ethnique irréparable que Singapour proclame son indépendance le 9 aout 1965. Lee Kuan Yew déclara que pour lui « c’est un moment d’angoisse parce que pendant toute ma vie, toute ma vie d’adulte, j’ai cru en la Malaisie, en l’union et l’unité de ces deux territoires ». Le parlement de Kuala Lumpur a voté un amendement à leur Constitution fédérale qui a rendu Singapour indépendant. Ainsi, Singapour n’a absolument pas choisi son indépendance, au contraire de tous les pays sud-est asiatiques qui se sont battus pour l’obtenir. (Le Temps. 2015)
Toutefois, comment expliquer le succès du Parti de l’action populaire dans la mise en place d’un régime économiquement et socialement développé ?Pour répondre à cette problématique, il sera important de discuter de l’élite politique éduquée ainsi que des réformes éducatives favorisant la croissance à Singapour.
Un régime contrôlé par une élite politique éduquée
Le parti de l’action populaire est fondé en 1954, ce parti est terriblement secoué en 1961, lorsqu’une de ses factions crée le Front socialiste. Or, à partir de1963, ce parti se dissipe et le Parti de l’action populaire devient majoritaire à Singapour. C’est ainsi le seul parti qui a gouverné Singapour depuis la proclamation de l’indépendance en 1965. Le premier ministre présent lors de la signature de l’indépendance restera au poste jusqu’en 1990. Après toutes ces années à obtenir la totalité des sièges, on considère le régime politique de Singapour comme une « Démocratie autoritaire » (Perspective Université de Sherbrooke. 2016). Ce régime était voué à l’élitisme et l’autoritarisme (Le Temps. 2015) .Ainsi, à la suite de cette indépendance forcée, Singapour a été prise en main par cette petite élite. C’est ainsi la prise autoritaire d’une petite élite politique très riche et éduquée qui a permis l’encadrement de la population. Cet encadrement est basé sur des réformes strictes, non démocratiques et économiquement ambitieuses. Ainsi, c’est grâce à cette petite élite que les réformes ont pu être mises en place, et ces réformes permettront de relever les défis post-indépendance, auxquels Singapour fait face.
Les réformes éducatives et économiques du PAP favorisent la croissance de Singapour
Lee Kuan Yew condamne l’État nouvellement indépendant à des réformes urgentes. Il convertit le régime social démocratique à une cité-État riche économiquement, en raison de son éducation en Angleterre, et ses descendances de famille riche. Il dit dans un de ses discours : « En cet âge de technologie et de science moderne, 2 millions peuvent réussir tout autant que 20 millions à travers une organisation rationnelle et un effort déterminé et discipliné (…) l’avantage que Singapour possède, c’est de ne pas avoir une population rurale attardée, entravée par la superstition et les méthodes de travail traditionnelles. À la place, nous avons une communauté urbaine compacte, bien éduquée, une société de migrants attachés à une performance élevée et exaltée par la perspective de récompenses importantes » (Le Temps. 2015). Ainsi, Lee Kuan Yew base ses réformes sur l’éducation morale et académique, la discipline et le travail (Le Figaro. 2015). En 1987, Singapour se voit comme une création de la vaillance et de la sagesse humaine (Le Temps. 2015). Et les Singapouriens se démontrent comme redevant une dette de reconnaissance envers Lee Kuan Yew sous forme d’obéissance et de loyauté.
C’est ainsi que la déclaration de l’indépendance est forcée en 1965 et que le Parti de l’action populaire prend un tournant sociodémocrate issu de sa première colonie britannique. Toutefois, Singapour est prise en charge par une Élite qui mettra en place des réformes éducatives et économiques. Ces réformes quant à elle permettront à Singapour de se développer expéditivement et devenir la puissance économique qu’aujourd’hui nous connaissons.
Bibliographie
United Nations, International Law Commission. 1997. Annuaire de La Commission du Droit international : Documents de la quarante-neuvième session, United Nations Publications, 2008, p.80 & p. 65
L’indépendance dont Singapour ne voulait pas. 2015. https://www.letemps.ch/opinions/2015/04/03/independance-dont-singapour-ne-voulait (page consultée le 14 mai 2017)
Proclamation de l’indépendance de Singapour. 2016. http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve?codeEve=714 (page consulté le 14 mai 2017)
Le 9 août 1965, Singapour devient un État souverain. 2015. http://www.lefigaro.fr/histoire/archives/2015/08/07/26010-20150807ARTFIG00248-le-9-aout-1965-singapour-devient-un-etat-souverain.php (page consultée le 14 mai 2017)