Pat Juliette Klein
Cet article présentera les relations politiques et économiques du Canada et du Myanmar, ainsi que la crise des Rohingyas qui se déroule au Myanmar et au Bangladesh. En effet, la situation de cette minorité ethnique majoritairement musulmane est alarmante, et suscite de fortes réactions de la part de la communauté mondiale.
Informations générales
Le Canada et le Myanmar — autrefois appelé Birmanie jusqu’à son changement de patronyme en 1989, officialisé au Canada en septembre 2016 — entretiennent des relations diplomatiques fluctuantes en raison du contexte géopolitique du pays et de la conjoncture rendue instable par le traitement réservé au peuple des Rohingyas. Malgré tout, le Canada compte un ambassadeur résident au Myanmar depuis 2013 ainsi qu’une ambassade à Yangon (anciennement Rangoon) depuis 2014 (Gouvernement du Canada 2023). Le Myanmar possède quant à lui une ambassade à Ottawa. En plus de fournir des stratégies et aides internationales sur la question des Rohingyas au Myanmar et au Bangladesh, le Canada prête attention à la place des femmes dans le pays. Elles font souvent face à une discrimination systémique profonde, mais subissent aussi des lacunes importantes en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs (SDSR), en n’ayant par exemple pas accès à la planification familiale ou à l’avortement (Gouvernement du Canada 2023).
Crise des Rohingyas
Le mot « Rohingya » est un nom historique désignant la minorité ethnique musulmane de l’État de Rakhine, situé dans la partie ouest du Myanmar, un territoire majoritairement bouddhiste (Anwary 2020, 85). Les tensions entre ce peuple et le Myanmar semblent remonter à la Seconde Guerre mondiale, les Rohingyas supportant les Britanniques alors que la communauté rakhine soutient les Japonais. Le peuple rohingya est alors victime de discrimination et Ne Win[1] fait passer une loi en 1982, révoquant leur citoyenneté birmane et les rendant apatrides (Rae 2018, 10). Ils ne sont donc ni reconnus comme citoyens du Myanmar ni comme un des groupes ethniques officiels y vivant. Cette condition les rend plus vulnérables à différents types d’abus, comme des restrictions à leur liberté de circulation, des inégalités dans l’accès à l’éducation, ou du travail forcé (Ahsan Ullah 2016, 287). La situation n’a cessé de se détériorer depuis, et nombre de Rohingyas fuient au Bangladesh, notamment au district de Cox’s Bazar, dans le camp de réfugiés dorénavant le plus densément peuplé au monde. Cette proximité pose des problèmes sanitaires, favorisant la propagation d’épidémies si une maladie contagieuse se présente, mais posant aussi des risques liés à l’environnement.
En effet, si une forte tempête ou une inondation surviennent, l’évacuation du camp sera très compliquée (Gouvernement du Canada 2022). Par ailleurs, un nombre important de cas de violences sexuelles contre des femmes Rohingyas par les forces de l’ordre birmanes a été rapporté. Parmi les souffrances infligées, on relève notamment la mutilation des organes féminins, le viol devant les autres membres de la famille ou encore la restriction du nombre d’enfants par famille, poussant les femmes à des avortements non voulus et dangereux pour leur santé (Anwary 2022, 410 ; 412). En raison de tous ces éléments, la condition des Rohingyas est critique, et les gouvernements et organisations extérieures essaient d’apporter des solutions et des améliorations à la situation.
Réaction du Canada
En réponse au traitement des Rohingyas, le Canada a implanté plusieurs stratégies. De 2018 à 2021, le plan pour « répondre à la crise des Rohingyas au Myanmar et au Bangladesh » a été mis en place par le gouvernement. Les principales ambitions de ce programme visaient à atténuer la crise humanitaire et à encourager les avancées politiques au Myanmar. Concrètement, le Canada a fourni des aides alimentaires au camp de réfugiés à Cox’s Bazar, a aidé à rendre les services de santé essentiels plus accessibles aux personnes touchées par la crise, et a créé des réseaux multiethniques pour améliorer la recherche active de solutions et la communication au sein des communautés devant cohabiter (Gouvernement du Canada 2022). En plus de cette stratégie triennale, le Canada a décidé de maintenir ses engagements par une nouvelle phase de la méthode, qui durera de 2021 à 2024. Les objectifs de cette deuxième étape restent similaires à ceux de la première, tout en mettant l’accent sur le soutien à l’éducation et le droit des femmes. En plus de cela, le Canada a aussi imposé des sanctions financières au Myanmar depuis 2007, grâce à la Loi sur les mesures économiques spéciales (Rae 2018, 30). Les restrictions principales concernent l’import-export d’armes ainsi que celui du carburant d’aviation entre le Canada et le Myanmar, qui sont interdits jusqu’à nouvel ordre.
Conclusion
Finalement, bien que le Canada et le Myanmar entretiennent des relations politiques, celles-ci sont inconstantes et fortement impactées par la crise des Rohingyas se déroulant sur le territoire. Il est nécessaire de garder un œil sur les rapports des deux pays, pour mesurer les fruits des actions canadiennes et voir comment évolue le traitement du peuple rohingya.
[1] Militaire et homme d’État birman qui a dirigé le Myanmar de 1962 à 1988.
Bibliographie
Ahsan Ullah, AKM. 2016. « Rohingya Crisis in Myanmar: Seeking Justice for the “Stateless” ». Journal of Contemporary Criminal Justice 32 (3): 285–301. https://doi.org/10.1177/1043986216660811
Anwary, Afroza. 2022. « Sexual Violence against Women as a Weapon f Rohingya Genocide in Myanmar ». The International Journal of Human Rights 26 (3): 400–419. https://doi.org/10.1080/13642987.2021.1931136
Anwary, Afroza. 2020. « Interethnic Conflict and Genocide in Myanmar ». Homicide Studies 24 (1): 85–102. https://doi.org/10.1177/1088767919827354
Gouvernement du Canada. 2023. « Relations Canada-Myanmar ». Gouvernement du Canada. https://www.international.gc.ca/country-pays/myanmar/relations.aspx?lang=fra
Gouvernement du Canada. 2022. « Réponse du Canada aux crises des Rohingyas et du Myanmar ». Gouvernement du Canada. https://www.international.gc.ca/country-pays/myanmar/relations.aspx?lang=fra
Rae, Bob. Affaires mondiales Canada. 2018. « Dites-leur que nous sommes humains » : Ce que le Canada et le monde peuvent faire au sujet de la crise des Rohingyas. Ottawa (Ontario), Canada : Affaires mondiales Canada. https://publications.gc.ca/collections/collection_2018/amc-gac/FR5-141-2018-fra.pdf