Par Manon Regnault
A l’heure de la crise sanitaire récente, le système de bidonvilles, de taudis, plus généralement d’habitats précaires est un réel problème tant pour sa dimension socio-économique que sa dimension environnementale. Le cas du Vietnam est particulièrement frappant.
La population vietnamienne se regroupe majoritairement dans les basses terres et les plaines notamment le long du Mékong et au Sud. Ho chi Minh, plus grande métropole du pays concentre environ 3,5 millions d’habitants (PopulationStat, 2021). Cette population jeune et relativement récente est pourtant très dense. Cependant, une forte concentration de population rime aussi avec mauvaise gestion de l’urbain et donc la multiplication d’habitats précaires[1]
Etablir une définition pour caractériser l’ensemble des habitats précaires est impossible. Néanmoins, leurs conditions d’émergence et leurs retombées socio-économiques peuvent être similaires. De ce fait, un logement précaire, ou « trous à rats » pour les vietnamiens, sont des logements souvent spontanés, informels, désorganisés et illégaux. Le territoire est donc occupé de manière anarchique : les rues sont étroites et la promiscuité est grande. Par ailleurs, le cadre de vie n’est pas digne d’un Eldorado. Ces « taudis » n’ont ni accès à l’eau potable, ni accès à un « système efficace d’évacuation des ordures et des eaux usées » [2]. Les services publics tels que l’éducation ou la santé y sont pratiquement absents alors que les inondations qui menacent leurs habitants ne sont pas sans dégâts environnementaux et sociaux. La pauvreté des matériaux utilisés traduit se phénomène. Ces logis sont situés sur les canaux ou les zones marécageuse et prennent souvent la forme de « baraques sur pilotis reliées par un réseau de passage ». Certains logements précaires se trouvent aussi dans de grands immeubles collectifs et densément habités. De plus, l’architecture n’est pas souvent réglementé. Le fossé avec la ville se creuse. La modernité d’Ho Chi Minh Ville ne veut pas s’associer à la pauvreté de ces logements. Le cadre et l’environnement dans lesquels se retrouvent leurs habitats ne sont donc pas favorables à leur intégration sociale et urbaine. Au contraire, ils font face à aussi bien à une extrême vulnérabilité qu’à de grandes insécurités et instabilités socio-économiques[3] [4].
Ho chi Minh ville est l’exemple parfait pour rendre compte de ce phénomène. Après la guerre avec les Etats-Unis et sa réunification en 1975, le Vietnam tente de repeupler ses métropoles. Voyant l’exode rural s’accroître, le processus inverse était pourtant en cours depuis les années 1960. Le pays voulait désurbaniser les villes et exporter le nouvel modèle économique de libéralisation des marchés dans les hautes terres et au Nord du Vietnam[5]. Dans la même perspective chinoise de libéralisation des marchés et l’ouverture du pays au commerce extérieur, le Vietnam s’industrialise rapidement. Mais l’urbanisation accélérée et l’attrait des investisseur étrangers pour la ville a soldé cette tentative par un échec. Justement, après les réformes économiques, « Doi moi », le pays a centralisé ses activités dans les métropoles et la croissance démographique est désormais hors de contrôle[6]. Inévitablement, cette situation impacte les infrastructures urbaines. Les pouvoirs publics perdent petit à petit leur mainmise. La situation économique et sociale creuse l’écart entre les riches et les pauvres de la ville et la ségrégation spatiale s’agrandie[7].
Mais comment un pays de plus en plus industrialisé a-t-il pu arriver à un point où une partie de sa population puisse être autant marginalisée ? Comment cela se fait-il que la ségrégation urbaine puisse être à ce point visible ?
Les problèmes urbains peuvent s’expliquer par les politiques sociales de logement de l’Etat. En effet, il ne faut pas oublier que le Vietnam est un pays communiste et les politiques qui en découlent, bien qu’intégrées dans la mondialisation, traduisent toujours une relation étroite entre l’Etat et la société civile. Le Vietnam a, par exemple, imposé un contrôle strict de résidence de sa population. Cette dernière est associée à un province particulière ne lui permettant pas de bénéficier de services sociaux des provinces voisines. C’est dans cette logique exclusive et collaborative que se retrouve l’Etat. Entre 1986 et 1992, le Vietnam propose des logements à ses employés et aux entreprises privées et locales dans les métropoles, les autres sont souvent marginalisés dans les zones périphériques faute de moyens[8] [9] [10]. Mais l’aspect esthétique et même territorial d’entassement de ces habitats précaires mettent l’Etat dans l’embarras. Les solutions portent donc sur l’éviction de ces habitants précaires ou du moins leur relogement[11] . Reste donc à ces derniers de décider s’ils veulent dépendre de l’Etat (logements étatiques fournis par le haut) ou d’eux-mêmes
Les politiques étatiques sont parfois insuffisantes. De ce fait, on observe alors l’émergence de nouveaux projets communautaires dans certains quartiers précaires. C’est donc le début de projets d’aménagement urbain impulsés par le bas. Cette tendance de « gestion urbaine partagée » peut déjà être un pas pour la diminution de cette marginalisation et ségrégation[12].
Il devient donc de première nécessité de développer l’économie de ces quartier ainsi que de protéger l’environnement aussi bien naturel que politique et économique pour plus tard améliorer les conditions de vie de ces défavorisés et marginalisés.
Bibliographie
Anne-Lise Humain-Lamoure, Antoine Laporte. Introduction à la géographie urbaine . Armand Colin , 2013.
Koninck, Rodolphe de. L’Asie du Sud-Est. Armand Colin , 2019.
Hai, Pham Thanh. Les migrations internes au Vietnam et leur impact sur l’environnement . Université de Montréal , 2009.
Loan, Ngô Thanh. Aménagement des quartiers précaires et relogement de leurs habitants : Le cas de Ho Chi Minh Ville – Viet Nam. Université de Montréal, 2006.
Ngoc-Du, Thai-Thi. Métropolisation, gestion des villes et habitation à Ho Chi Minh Ville . Cachier d’outre-mer: Université de Ho Chi Minh Ville, 1996.
[1] Anne-Lise Humain-Lamoure, Antoine Laporte. Introduction à la géographie urbaine . Armand Colin , 2013.
[2] Loan, Ngô Thanh. Aménagement des quartiers précaires et relogement de leurs habitants : Le cas de Ho Chi Minh Ville – Viet Nam. Université de Montréal, 2006.
[3] Loan, Ngô Thanh. Aménagement des quartiers précaires et relogement de leurs habitants : Le cas de Ho Chi Minh Ville – Viet Nam. Université de Montréal, 2006.
[4] Ngoc-Du, Thai-Thi. Métropolisation, gestion des villes et habitation à Ho Chi Minh Ville . Cachier d’outre-mer: Université de Ho Chi Minh Ville, 1996.
[5] Hai, Pham Thanh. Les migrations internes au Vietnam et leur impact sur l’environnement . Université de Montréal , 2009.
[6] Loan, Ngô Thanh. Aménagement des quartiers précaires et relogement de leurs habitants : Le cas de Ho Chi Minh Ville – Viet Nam. Université de Montréal, 2006.
[7] Koninck, Rodolphe de. L’Asie du Sud-Est. Armand Colin , 2019.
[8] Loan, Ngô Thanh. Aménagement des quartiers précaires et relogement de leurs habitants : Le cas de Ho Chi Minh Ville – Viet Nam. Université de Montréal, 2006.
[9] Hai, Pham Thanh. Les migrations internes au Vietnam et leur impact sur l’environnement . Université de Montréal , 2009.
[10] Koninck, Rodolphe de. L’Asie du Sud-Est. Armand Colin , 2019.
[11] Loan, Ngô Thanh. Aménagement des quartiers précaires et relogement de leurs habitants : Le cas de Ho Chi Minh Ville – Viet Nam. Université de Montréal, 2006.
[12] Ngoc-Du, Thai-Thi. Métropolisation, gestion des villes et habitation à Ho Chi Minh Ville . Cachier d’outre-mer: Université de Ho Chi Minh Ville, 1996.