Par Judith Cavallo
L’Indonésie proclame son indépendance en 1945, peu de temps « après la capitulation de l’occupant japonais » (Guay 2016). Suite à de nombreux conflits mêlant le dirigeant Soekarno aux communistes, le général Mohammed Suharto s’impose comme l’homme fort du pays, et devient alors le chef de l’état. Ce dernier instaure un régime politique autoritaire, sanglant et corrompu, interdisant une majorité des partis politiques.
De ce fait, le pouvoir du Parlement a été fortement réduit, rendant le pouvoir de Suharto encore plus important.
De plus, « le leader suprême était le “porte-parole” de la nation, et pouvait à ce titre se passer du verdict des urnes » (Bertrand 2001).
Suite à cette centralisation extrême des pouvoirs, le général Suharto, sous la pression internationale, est contraint de libéraliser le régime politique, bien que cette libéralisation reste très limitée. Cependant, peu de temps après cette dernière, de 1993 à 1996, le régime se durcit de plus en plus, le gouvernement fonctionne avec une « police secrète » et « trois partis sont autorisés seulement » et toutes contestations sont bannies (Pomonti 2008). Avec ces nombreuses affaires de corruptions et l’extrême violence de la milice, de 1996 jusqu’à la démission du chef d’état tyrannique, une vague de protestation va être menée et ce, notamment par les étudiants en 1998. Un mouvement d’opposition dirigé par le Parti démocratique indonésien (PDI) va émerger avec le soutient de la population ainsi que la communauté internationale. Le régime de Suharto connaissant une crise interne et des contestations populaires empêcheront la réélection de ce dernier et le mènera à démissionner.
À la suite de ces nombreux évènements, la transition démocratique va pouvoir se mettre en marche. De ce fait, « le 7 juin 1999, l’Indonésie a connu son premier scrutin libre depuis 1955. Puisque en effet, de 1959 à 1965, le Président Sukarno avait en effet institué un régime dit de “Démocratie Guidée” dans lequel le multipartisme était jugé contradictoire avec la poursuite du processus de construction nationale » (Bertrand 2001). Cependant, la transition démocratique de l’Indonésie va se faire de manière progressive, avec la succession de plusieurs Présidents élus démocratiquement par la population.
Le Président indonésien qui succède à Suharto, Jusuf Habibie, en fonction de mai à décembre 1998, restaure le multipartisme, la liberté de presse, augmente le nombre de pourcentage d’élus dans les deux chambres du parlement et propose un projet de référendum sur la question de l’indépendance du Timor oriental.
Le Président Abdhurrahman Wahid est le prochain élu démocratiquement en 1999 jusqu’en 2001. Ce dernier va poursuivre sur la lancée du précédent président, en accordant l’indépendance du Timor oriental (Éthier 2017).
De 2001 à 2004, c’est Mégawati Sukarnoputri qui est à la tête du gouvernement. Cette dernière va entreprendre un certain nombre de changements favorables à un régime démocratique total. En effet, elle va rendre le statut d’autonomie à l’Irian Jaya et à Banda Aceh, deux territoires de l’Indonésie. Elle va par la suite instaurer des élections afin d’élire les députés du Conseil représentatif du peuple, soit du Dewan Perwakilan Rakyat (DPR), qui composent la chambre basse indonésienne. Elle va faire de même pour la branche législative du système politique en organisant les élections de ses membres, People’s Consultative Assembly of the Republic of Indonesia (MPR). Enfin, un élément central de la démocratie contemporaine et Occidentale va être adopté sous la présidence de Mégawati Sukarnoputri, il s’agit de l’instauration de l’élection du président au suffrage universel. Une pratique essentielle et très importante dans une démocratie, et ainsi permettant une égalité de tous les citoyens face au choix présidentiel.
Enfin, l’un des présidents qui a eu un rôle dans l’instauration de la démocratie indonésienne est le président Susilo Bambang Yudhoyono. En effet, ce dernier en fonction de 2004 à 2014 a passé des accords de paix avec les indépendantistes de Banda Aceh, a permit au pays de réduire le taux de corruption pourtant très élevé et enfin, grâce à sa tolérance et les mesures prises lors de son mandat, le niveau de vie des indonésiens s’est accrue ces dernières années.
Cependant, nous remarquons que malgré tous les efforts fait par ces dirigeants dans le but d’instaurer une démocratie solide, cette dernière n’est tout de même pas encore réellement consolidée et ce pour différentes raisons. En effet, le respect des libertés civiles et des droits politiques a connu une nette régression depuis quatre ans, avec notamment la montée du parti islamiste revendiquant certaine règle de la charia, comme « le port du voile ou l’interdiction de circuler la nuit pour les femmes non-accompagnées » (Alles 2009). De plus, la corruption du régime refait surface depuis 2008, les partis politiques ne sont toujours pas assez institutionnalisés et l’influence de l’armée sur le pouvoir politique semble encore très présente.
Ce sont alors de nombreux facteurs qui portent encore atteinte à une démocratie solide et durable même si cette dernière est bien présente.
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Bibliographie
Guay, Jean-Herman. 2016. « Indonésie ». Dans Perspective Monde. Université de Sherbrooke. Lettres et sciences humaines. École de politique appliquée. En ligne. http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMPays?codePays=IDN (page consultée le 24 mai).
Pomonti, Jean Claude. 2008. « Mohammed Suharto » Dans Le Monde. En ligne. http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2008/01/28/mohammed-suharto_1004555_3382.html (page consultée le 24 mai)
Bertrand, Romain. 2001. « La “démocratie à l’Indonésienne” : bilan critique d’une transition qui n ’en finit pas de commencer ». Dans Revue internationale de politique comparée. De Boeck Supérieur. Vol 8. Pp 435-459. En ligne. https://www.cairn.info/revue-internationale-de-politique-comparee-2001-3-page-435.htm (page consultée le 24 mai).
Alles, Delphine. 2009. « Indonésie, dix ans pour une démocratisation réussie » Dans Alternatives économique. Numéro 43. En ligne. http://www.alternatives-economiques.fr/indonesie-dix-ans-une-democratisation-reussie/00070830 (page consultée le 24 mai)