Les guérillas communistes aux Philippines

Par Lucie Marcoux

Logo de New People's Army https://en.wikipedia.org/wiki/New_People%27s_Army

Logo du New People’s Army
https://en.wikipedia.org/wiki/New_People%27s_Army

L’Asie du Sud-Est a hébergé, durant la guerre froide, plusieurs mouvements nationalistes et communistes. Dans plusieurs pays, comme au Vietnam, ces mouvements ont connu un grand succès. Par contre, ce ne fut pas le cas des Philippines avec le groupe révolutionnaire du New People’s Army (NPA). Fondé en 1969 par José Maria Canlás Sison et quelques étudiants militants, le NPA est l’organisation armée du Parti communiste des Philippines-marxistes-léninistes. Ce regroupement a mené la révolution dans le but de libérer les Philippines des forces de l’impérialisme, du capitalisme bureaucratique et du féodalisme [1]. Avec ces informations, il est facile de se questionner sur les causes qui amenèrent ce groupe communiste philippin vers l’échec. Bien qu’il existe plusieurs causes, cet article traite des principales raisons qui expliquent pourquoi la révolution de New People’s Army n’a pas eu les effets escomptés.

Premièrement, durant les années de sa lutte, le New People’s Army a manqué de soutien auprès de la population locale. Étant réfugié dans des contrées éloignées des villes, l’organisation tente de convaincre les paysans que l’impérialisme américain est responsable de la pauvreté rurale [2] et que les classes bourgeoises ne font que reproduire les inégalités au pays [3]. Certains paysans vont embarquer dans le mouvement, mais, au fil des ans, le nombre de combattants reste insuffisant. Cela fait en sorte que la guérilla communiste éprouve des difficultés au niveau de l’armement, de la logistique, du support international et d’endroits où se cacher et s’isoler de la menace [4].  Un des facteurs qui peut expliquer ce manque de soutien est les lacunes au niveau démocratique du parti communiste philippin. Par exemple, dans les années 80, quelques centaines, voire des milliers d’innocents, furent emprisonnés, torturés ou tués, car le New People’s Army craignait que ce soient des espions [5]. Ce genre d’actions remet en question la crédibilité du mouvement.

Deuxièmement, une autre raison qui fit en sorte que la révolution du New People’s Army ne fonctionna pas comme prévu est le manque de support à l’international. Certes, le parti communiste philippin est soutenu par certains pays partisans de l’idéologie communiste. La Chine, la Corée du Nord, l’Union soviétique, le Nicaragua, Cuba et la Libye sont quelques exemples de pays appuyant la révolution [6].  Par contre, les actions révolutionnaires du New People’s Army ne sont pas très populaires dans les autres pays du globe.  Les États-Unis, ainsi que d’autres pays occidentaux, tentent d’isoler le parti en lui posant l’étiquette d’organisation terroriste. Ils essayent également de geler les actifs bancaires de l’organisation [7]. Cette réputation de « terroriste » va donc nuire au financement du parti et à sa popularité auprès de la population.

Quelques combattabts du NPA http://www.hartford-hwp.com/archives/54a/076.html

Quelques combattants du NPA http://www.hartford-hwp.com/archives/54a/076.html

Troisièmement, le New People’s Army n’était pas assez équipé pour combattre. Bien sûr, la guérilla communiste est capable de se débrouiller pour obtenir quelques fusils, mitrailleuses et mortiers venant du marché noir ou de transactions avec des soldats philippins, mais ce n’est pas suffisant. La majorité des armes avec lesquelles le NPA se bat proviennent des États-Unis. Bien qu’ils étaient contre le mouvement communiste, les Américains, avec leur accord d’armement établi avec les Philippins quelques années auparavant, se trouvent à encourager le mouvement. La Chine également contribue à leur équipement de combat au début des années 70. Par contre, vers 1975, Beijing, voulant améliorer ses relations avec l’Ouest, retire son appui à la lutte que mènent les Philippines et ne leur fournit plus aucune arme. Donc en plus d’être considéré illégal aux yeux du gouvernement des Philippines, le New People’s Army se retrouve avec quelques armes seulement pour lutter [8]. Ce manque de support engendre donc, vers 1980-1985, un déclin de ce groupe de guérilla. Ils perdent des soldats et des territoires [9].

Pour conclure, les combattants des guérillas ont sacrifié leurs vies pour la lutte. Pendant des années, ils ont vécu avec des paysans dans le but de faire grandir leur idéologie. Bien que la révolution menée par le New People’s Army ne fut pas un succès, il va sans dire que leurs actions amenèrent des transformations dans la vie des paysans qui vécurent avec ces troupes rebelles. Ils ont créé l’espérance d’un pays plus juste envers les classes soufrant de pauvreté. Aujourd’hui, bien que le parti communiste n’ait pas triomphé et que le New People’s Army soit tombé dans l’oubli, l’espoir d’une révolution repose toujours dans ce pays [10].

 

Références :

[1] : Jones, 1989, p. 6.

[2] : Chapman, 1987, p.25.

[3] : Bankoff & Weekley, 2002, p. 73.

[4] : Chapman, 1987, 214.

[5] : Gilbert Quimpo, 2008, p. 77.

[6] : Jones, 1989, p. 9.

[7] : Gilbert Quimpo, 2008, p. 69.

[8] : Chapman, 1987, p. 20.

[9] : Jones, 1989, p. 12.

[10] : Jones, 1989, p. 314.

 

Bibliographie :

Bankoff, Greg & Weekley, Kathleen. 2002. « Post-Colonial National Identity in the Philippines ». Burlington: Ashgate Publishing Company.

Chapman, William. 1987. « Inside the Philippine Revolution ». New York: W. W. Norton & Company.

Fuller, Ken. 2011. « A movement divided : Philippine communism, 1957-1986 ». Diliman, Quezon City: The University of the Philippines Press.

Gilbert Quimpo, Nathan. 2008. « Contested Democracy and the Left in the Philippines after Marcos ». New Haven: Yale University Southeast Asia Studies.

Jones, R. Gregg. 1989. « Red Revolution: inside the Philippine Guerrilla movement ». London: Westview Press.

Pye, Lucian W. 1956. « Guerilla Communism in Malaya: its social and political meaning ». London: Oxford University Press.

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