Par Lucie Marcoux
« Tous les hommes naissent égaux. Le Créateur nous a donné des droits inviolables, le droit de vivre, le droit d’être libres et le droit de réaliser notre bonheur » [1]. Cette sage parole, tirée de la Déclaration d’Indépendance des États-Unis d’Amérique en 1776, fut reprise par le président vietnamien Ho Chi Minh le 2 septembre 1945 lors de son discours pour la déclaration d’indépendance de la République démocratique du Vietnam. En reprenant ces propos, Ho Chi Minh désirait démontrer au peuple vietnamien que, durant plusieurs années, les actes des colonialistes français ont été à l’encontre des idéaux d’humanité et de justice des pays occidentaux. On retrouve dans cette phrase l’un des aspects justifiant la lutte nationaliste entreprise par Ho Chi Minh, ce qui fit de lui une figure marquante au Vietnam.
Ho Chi Minh n’était pas le seul à désirer un Vietnam communiste [2]. À la tête du mouvement de la République démocratique du Vietnam, Ho a trouvé moyen de rallier la majorité du peuple vietnamien à son idéologie. Grâce à lui, le Vietnam fut la première nation à lancer une libération nationale sous un régime communisme [3]. Cet exploit a fait en sorte que l’UNESCO (United Nations Educational, Scientific and Cultural Organisation) le reconnait comme héros national de la libération [4]. Par contre, avec ces informations, il est facile d’en venir au questionnement suivant : qu’est-ce qui fait en sorte que Ho Chi Minh soit considéré comme une figure marquante de la lutte nationaliste au Vietnam ? C’est la question à laquelle cet article répondra.
Bien sûr, Ho Chi Minh a amené le Vietnam à l’indépendance, a sorti le pays de l’emprise du protectorat français et a également travaillé à la réunification du pays. Néanmoins, en plus d’avoir accompli ces grandes choses, Ho Chi Minh détenait des qualités de dirigeant uniques.
Premièrement, Ho Chi Minh est une figure marquante du Vietnam, car il s’est allié avec les paysans, qui représentent la grande majorité de la population, dès le début de la révolution. Pour ce faire, il décide de modifier le communisme de manière à ce qu’il corresponde à la situation vietnamienne. À l’habitude, cette idéologie place la classe ouvrière à la tête du mouvement révolutionnaire. Par contre, au Vietnam, ce sont les paysans qui représentent la majorité de la population et Ho fut l’un des premiers dirigeants à reconnaître leurs rôles dans la libération du pays. Il établit donc de fortes alliances avec différents villages dans le Vietnam et il y introduit la « lutte des classes » [5]. Les villages deviennent le point d’ancrage de la révolution. Ho adapte les structures traditionnelles paysannes en leur donnant un contexte révolutionnaire. En faisant cela, il devient difficile pour les autorités françaises d’arrêter ce mouvement communiste, bien dissimulé dans les campagnes. Ho s’installe dans les montagnes, dans les villages et auprès des différentes minorités ethniques dans le nord du pays. Il est perçu comme l’homme de la situation. En plaçant le paysan à la tête du mouvement révolutionnaire, Ho Chi Minh mit donc en place un front uni qui venait du peuple, ce qui changea l’histoire du Vietnam. Cette aptitude à rallier la majorité de la population de son côté est unique et, étant désormais apprécié par la majorité des Vietnamiens, il fut rapidement reconnu comme une figure marquante du pays.
Deuxièmement, Ho Chin Minh a toujours fait en sorte que le mouvement soit perçu comme égalitaire et commun. Le fait qu’il percevait les Vietnamiens comme égaux fit en sorte qu’il devint rapidement populaire et important aux yeux de la population. Selon lui, pour accéder à l’indépendance, les sociétés hiérarchiques devaient s’habituer au « nous ». Pour lui, le régime colonial était l’ennemi de tous et tous les Vietnamiens avaient un rôle primordial dans la lutte vers l’obtention de l’indépendance. Il regroupe donc ensemble les différents groupes et classes sociales. Tous doivent s’unir. Ainsi, il ne veut pas faire de distinction entre les jeunes ou les vieux, les riches ou les pauvres, et cela pour combattre l’ennemi colonial et se diriger vers l’indépendance [6]. Ho voit les travailleurs et les paysans comme la base de la révolution, tandis qu’il perçoit les marchands et propriétaires comme des partisans du mouvement révolutionnaire [7]. Son désir de ralliement et sa capacité à communiquer le sentiment de nationalisme à la majorité firent de lui un leader singulier.
Pour conclure, ces deux aptitudes de dirigeant ont fait en sorte que Ho Chi Minh a su se démarquer en tant qu’homme politique et ainsi laisser sa trace dans l’histoire du Vietnam en tant que figure marquante de la lutte nationaliste. Bien que le gouvernement actuel du Vietnam ait des politiques différentes de celles de Ho, son image de leader national communiste reste bien imprégnée dans la culture vietnamienne.
https://www.youtube.com/watch?v=L4tY9-aYBkE
Références :
[1] : Perspective Monde (Université de Sherbrooke), 2015.
[2] : Dommen, 2001, p.113.
[3] : Xanh, 2008, p. 161.
[4] : Xanh, 2008, p. 189.
[5] : Marangé, 2012, p.257.
[6] : Xanh, 2008, p. 163.
[7] : Turner, 1975, p. 43.
Bibliographie :
Dommen, Arthur J. 2001. « The Indochinese experience of the French and the Americans: nationalism and communism in Cambodia, Laos, and Vietnam ». Bloomington: Indiana University Press.
Duan, Le. 1970. « The Vietnamese Revolution: Fundamental Problems Essential Tasks ». Hanoi: Foreign Languages Publishing House.
Marangé, Céline. 2012. « Le Communisme Vietnamien (1919-191) ». Paris : Presses de Sciences Po.
Perspective Monde (Université de Sherbrooke). 2015. « Déclaration d’indépendance de la République Démocratique du Viêt-Nam ». [En ligne] http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMDictionnaire?iddictionnaire=1727 (page consultée le 22 mai 2016).
Turner, Robert F. 1975. « Vietnamese communism, its origins and development ». Stanford: Hoover Institution Press, Stanford University.
Xanh, Phạm. 2008. « Hồ Chí Minh, the nation and the times, 1911-1946 ». Hà Nội : Thế Giới Publishers.