Par Maxime Marcotte-Bouthillier
La région du Sud-est asiatique est une région riche en ressources naturelles qui a été longtemps convoitée par des acteurs étrangers. En effet, que ce soit durant les vagues de colonisation qui ont déferlées sur la région dès le 16e siècle ou bien durant la période de décolonisation de la région au 20e siècle, l’acquisition des ressources naturelles ont toujours été dans au cœur des priorités. Ainsi, dans un contexte plus contemporain, on peut percevoir que cette tendance ce maintien toujours. Un des principaux acteurs ayant le plus d’intérêt envers les ressources des pays de la région n’est nul autre que la Chine. En effet, la demande énergétique toujours de plus en plus grande du géant asiatique lui requiert une quête de ressource naturelle toujours de plus en plus importante.
Il est possible, en effet de discerner de grands intérêts pour la Chine envers l’acquisition des ressources naturelles dans les pays de l’Asie du Sud-Est. Premièrement, lorsque nous portons notre regard sur les investissements directs étrangers et l’emplacement des firmes internationales de la Chine dans les pays en voie de développement de l’Asie du Sud-est, il est possible d’observer qu’une attraction très particulière est portée aux ressources naturelles des pays hôtes (Kang et Jiang, 2012). Également, la tentative d’acquisition des Îles menant aux disputes de la mer de la Chine du Sud, permet encore une fois de voir le besoin des Chinois d’acquérir le plus de ressources naturelles possible (Xue, 2011-2012). Mais à quel point le pays du coq est-il présent dans la région?
L’hydroélectricité étant, lorsqu’observé à travers l’œil économique, la source renouvelable d’énergie la plus profitable, la Chine a terminé la construction du quatrième barrage hydroélectrique sur les hauts de la rivière du Mékong. Également, la Chine promet la construction de barrages dans le territoire Cambodgiens qui permettra une augmentation de la production énergétique de ce dernier par près de trois fois (Burgos et Ear, 2010). Même si ceci peut sembler être une bonne chose pour la production électrique du Cambodge, l’acquisition des droits de construction sur la rivière Mékong pourrait s’avérer une arme géopolitique très importante pour la Chine. En effet, les barrages construits dans le haut et dans le bas du bassin du Mékong pourraient être utilisés afin de contrôler la production énergétique et l’écoulement des eaux dans la région (Burgos et Ear, 2010). Ceci pourrait donc être un levier géopolitique utilisé dans une « diplomatie de l’énergie chinoise », pas seulement envers le Cambodge, mais également envers la Thaïlande et même le Vietnam. Également, il est possible d’observer que la Chine a fait l’acquisition d’une grande firme pétrolière offshore cambodgienne ayant des droits préexistants sur l’exploitation des ressources (Burgos et Ear, 2010). C’est donc dire que l’exploitation et l’utilisation des ressources se feront maintenant dans les intérêts chinois (grâce d’ailleurs à l’allégeance du gouvernement cambodgien envers la cause chinoise), alors qu’elle aurait pu être une voie envisageable pour permettre à une partie du pays de sortir de la pauvreté.
Toutefois, l’acquisition des ressources ne se perçoit pas seulement dans l’hydroélectricité et le pétrole. En effet, la Chine qui est également assoiffée de caoutchouc, de minerais (or, argent, fer…), de bois, etc. a vue ses investissements terrestres (land-based investments) à l’étranger décuplés, cherchant à exploiter les opportunités à son propre avantage (Kolstad et Wiig, 2012). Dans cette optique, il est possible d’observer au Cambodge dans les dernières années une augmentation du contrôle illégal des terres (unlawful land-grabbing)[1]), une baisse des droits humains, une augmentation d’abus de travail, un agrandissement de l’exploitation illicite des ressources et plusieurs dommages environnementaux sur les rivières, lacs et sur les écosystèmes dépendants de l’eau (Burgos et Ear, 2010). Également, les opérations forestières illégales chinoises ayant décimés une grande partie des forêts en Birmanie et en Indonésie et ont causés une érosion des sols, une perte de la biodiversité et une baisse de la capacité de génération hydraulique (Burgos et Ear, 2010).
Ainsi, il est possible de noter que la présence de la Chine dans les pays du Sud-Est asiatique est très importante et même grandissante (Kang et Jiang, 2012). Également, il est possible de comprendre que la soif énergétique et la demande constante de consommation de ressources naturelles incitent la Chine à orienter une bonne partie de ses investissements directs étrangers dans le domaine des ressources naturelles, causant ainsi parfois de graves dommages sur les pays hôtes. Aussi, quelquefois, les investissements et combats pour l’acquisition des champs exploitables peuvent être utilisés par la Chine en tant que levier géopolitique pour faire valoir sa position sur l’échiquier politique de la région. Tout ceci, fréquemment accueilli de bonne foi et à bras grands ouverts par certains leaders politiques des pays qui en souffrent le plus, ceux de l’Asie du Sud-Est (Burgos et Ear, 2010).
Bibliographie:
BURGOS, Sigfrido et EAR, Sophal 2010 « China’s Strategic Interest in Cambodia: Influences and Resources » Asian Survey, Vol. 50, No. 3 (Mai/Juin): 615-639
KANG, Yuanfei et JIANG, Fuming 2012 « FDI location choice of Chinese multinationals in East and Southeast Asia: Traditional economic factors and institutional perspective » Journal of World Business, 47, No. 1 (Janvier): 45-53
KOLSTAD, Ivar et WIIG Arne, 2012 « What determines Chinese outward FDI? » Journal of World Business, Vol 47: 26-34
XUE, (Julia) Guifang (2011-2012) « Deep danger: intensified competition in the South China Sea and implications for China » HeinOnline URL: http://heinonline.org/HOL/Page?handle=hein.journals/occoa17&div=17&g_sent=1&collection=journals, consulté le 20 novembre 2014.
[1] Voir le blogue : Le contrôle des terres dans la sphère Sud-Est Asiatique