Par Kathryn Blanchette
La Birmanie est sujette à une surveillance internationale particulière par le Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies (ONU)[1]. Considérant la gravité des conditions de vie, la Birmanie est vue comme un des pires pays par rapport au respect des droits de l’Homme[2]. D’ailleurs, Hilary Clinton, secrétaire d’État américain, a appelé récemment à une enquête internationale sur les violations birmanes des droits de l’Homme[3].
Tout d’abord, s’étant mis comme objectif d’augmenter les visites touristiques en Birmanie, le gouvernement a effectué de grands travaux de rénovation et de modernisation des infrastructures. Plusieurs Birmans se sont vus expulsés de leurs terres; ils furent pour la plupart déplacés dans des zones rurales très éloignées où ils durent tout reconstruire[4] ou condamnés au travail forcé. D’ailleurs, le travail forcé est donc chose courante. En effet, en 2011, l’Organisation internationale du travail (OIT) n’avait toujours pas enregistré de progrès considérable[5]. De plus, les villages sont pillés systématiquement[6]; dans l’État de Kayin, 232 villages furent détruits.
En addition, Amnesty Internationale dénonce le traitement cruel, inhumain et dégradant vis-à-vis les hommes, mais surtout envers les femmes et les enfants[7]. En effet, on parle de violence et de crimes sexuels tels : trafic humain, esclavage sexuel pour les militaires et viols systématiques pouvant inclure de la torture, de la violence physique, de la mutilation et de la suffocation[8]. Comme le soutient d’ailleurs un reporter spécial de l’Organisme des Nations Unis, Paulo Sergio Piunheiro, « il y a cette incapacité à enquêter, à poursuivre les responsables de viols et de violences sexuelles, qui contribue à créer cet environnement propice à la perpétuation de la violence contre les femmes et fillettes birmanes[9] ». Non seulement il y a absence d’indépendance du pilier judiciaire[10], c’est ce que soutient l’article 445 de la Constitution de 2008 :
« Aucune procédure ne sera intentée contre lesdits Conseils ni contre aucun membre du Gouvernement à l’égard de tout acte accompli dans l’exercice de leurs fonctions respectives[11]. »
Les libertés politiques et d’expression sont également brimées. En 1988, des soldats tirent alors sur la foule alors que des dizaines de Birmans manifestent pour un régime démocratique. Puis, Aung San Suu Kyi fonde la Ligue nationale pour la démocratie, en faveur de la désobéissance civile et d’une politique de non-violence[12]. Néanmoins, pendant près de 15 ans, elle a été emprisonnée dans sa résidence, son parti politique fut banni et la plupart de ses membres, persécutés[13]. En d’autres mots, l’opposition birmane est étouffée. Amnesty International souligne que des centaines de prisonniers politiques sont encore incarcérés au Myanmar[14].
De plus, lors de la Révolution safran en septembre 2007, les autorités birmanes se sont attirées les foudres mondiales lorsqu’elles ont réprimé avec violences les manifestations des Bronzes[15], religieux musulmans de confession bouddhiste[16]. Le corps policier les brutalisa alors que ces derniers manifestaient calmement contre la junte au pouvoir. L’Organisation des Nations Unies craint donc pour les minorités ethniques, qui sont souvent contrées à l’exil, et surtout face à l’extermination des minorités musulmanes[17]. Comme 97% des réfugiés dans les pays adjacents sont des musulmans, l’organisme invite d’ailleurs le gouvernement birman à ne pas utiliser le conflit comme excuse pour éliminer la population musulmane, mais plutôt à la protéger[18]. Quant au ministre de l’information En Birmanie, Kyaw San, il déclare : « […] Ces accusations concernant les violations des droits de l’homme dans les régions ethniques sont complètement fausses. Il s’agit de campagnes négatives à but politique de l’opposition et d’autres groupes qui sont contre le gouvernement et l’armée[19] ». Il n’en demeure pas moins que la justice et le respect des libertés individuelles sont des composantes qui seront essentielles à la Birmanie si elle souhaite une réconciliation nationale.
[1] Londres, Amnesty International, Myanmar (Londres : Amnesty International, 2012).
[2] Kinley, David. 2007. « Engaging a Pariah : Human rights training in Burma/Myanmar » Human Rights Quartely dans The Johns Hopkins University Press 29 (no 2): 369.
[3] AFP, « Clinton veut une enquête sur la Birmanie », (2010) En ligne. http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2010/10/28/97001-20101028FILWWW00740-clinton-veut-une-enquete-sur-la-birmanie.php (page consultée le 19 novembre 2012).
[4] Info Birmanie, « Rapport sur le tourisme en Birmanie », (2011) En ligne. http://www.info-birmanie.org/web/images/stories/Rapport_Tourisme_25.10.11WEB2.pdf (page consultée le 6 novembre 2012), p.3.
[5] Londres, Amnesty International, Myanmar (Londres : Amnesty International, 2012).
[6] Marie Battini, « En Birmanie, le viol continue d’être utilisé comme arme de guerre malgré les promesses de paix », (2012) En ligne. http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/03/08/en-birmanie-le-viol-continue-d-etre-utilise-comme-arme-de-guerre-malgre-les-promesses-de-paix_1653519_3232.html (page consulté le 19 novembre 2012).
[7] Ibid.
[8] Shubhi Tandon, « Burma : War rape reports continue unabated as governement denies accounts », (2011) En ligne. http://womennewsnetwork.net/2011/10/19/burma-war-rape-reports-continue/ (page consultée le 19 novembre 2012).
[9] Shubhi Tandon, « Burma : War rape reports continue unabated as governement denies accounts », (2011) En ligne. http://womennewsnetwork.net/2011/10/19/burma-war-rape-reports-continue/ (page consultée le 19 novembre 2012).
[10] OpenNet Initiative, « Internet flitering in Burma in 2005 : a country study » (2005) En ligne. http://opennet.net/sites/opennet.net/files/ONI_Burma_Country_Study.pdf (page consultée le 18 novembre 2012), p.5.
[11] Aung Htoo, « Major flaws in the 2008 constitution », (2010) En ligne. http://www.dvb.no/about-elections/major-flaws-in-the-2008-constitution/7964 (page consultée le 19 novembre 2012).
[12] Ibid.
[13] Kinley, David. 2007. « Engaging a Pariah : Human rights training in Burma/Myanmar » Human Rights Quartely dans The Johns Hopkins University Press 29 (no 2): 402.
[14] Londres, Amnesty International, Myanmar (Londres : Amnesty International, 2012).
[15] Thawnghmung, Ardeth Maung et Maung Aung Myoe. 2008. « Myanmar in 2007: a turning point in the “roadmap”? » Asian Survey 48 (no 1) : 13.
[16] Alain Desjourdy, « La Révolution safran au Myanmar : la crise politique fait ses premières victimes », (2007) En ligne. http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMAnalyse?codeAnalyse=584 (page consultée le 19 novembre 2012).
[17] Oum Michket, « Birmanie : l’ONU craint l’extermination de la minorité musulamane », (2012) En ligne. http://www.ajib.fr/2012/11/birmanie-onu-extermination/ (page consultée le 19 novembre 2012).
[18] Alain Desjourdy, « La Révolution safran au Myanmar : la crise politique fait ses premières victimes », (2007) En ligne. http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMAnalyse?codeAnalyse=584 (page consultée le 19 novembre 2012).
[19] Marie Battini, « En Birmanie, le viol continue d’être utilisé comme arme de guerre malgré les promesses de paix », (2012) En ligne. http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/03/08/en-birmanie-le-viol-continue-d-etre-utilise-comme-arme-de-guerre-malgre-les-promesses-de-paix_1653519_3232.html (page consulté le 19 novembre 2012).