La crise asiatique et ses impacts : le cas du Malaysia

Par H. Aysegul KARSLI

«Non aux solutions conditionnelles de FMI! Non à sa politique économique orthodoxe !» [1]

C’est ainsi s’est opposé la Malaysia aux prescriptions économiques du Fonds monétaire international au lendemain de la crise asiatique de 1997. Alors que ses voisins (tous aussi victimes de la tourmente financière) n’ont pas hésité à adopter une politique de réduction des déficits publics et de hausse des taux d’intérêt afin de recevoir les aides monétaires importantes du FMI, la Malaysia privilégia une politique budgétaire expansionniste ! Le gouvernement adopta une stratégie d’isolement monétaire les effets de la restructuration se firent sentir dès 1999 avec la revalorisation du marché boursier.

La composition ethnique très variée de la Malaysia a toujours été une menace potentielle à l’harmonie sociale. La prépondérance des Chinois dans le domaine du commerce et dans les secteurs économiques et industriels a suscité du mécontentement chez les Malais et créant occasionnellement des crises économiques et politiques. Pour réduire les écarts entre ces communautés, la « New Economic Policy » privilégia les investissements malais. Le remplacement du NEP par la « New Development Policy » modéra l’orientation «promalaise » de l’ancienne politique. À l’époque, les investissements étrangers étaient négligés, mais avec la NDP l’appel aux investissements étrangers est devenu la stratégie centrale [2].

Ce libéralisme tempéré porta fruits : l’économie s’est diversifiée, le niveau de vie s’est amélioré. Grâce à un commerce d’exportation dynamique vers les États-Unis, l’Union européenne, le Japon et le Singapour, les Malais possédaient donc une économie saine et solide.

Toutefois, le pays n’était pas immunisé contre les crises. Quand le krach, qui a débuté en Thaïlande, à affecté les aux autres devises asiatiques, la dépréciation subite du ringgit a mené à une chute dramatique des cours de la bourse malaise. En quelques mois, l’endettement interne atteint 120% du PIB [3]. Ce choc a eu des incidences sociales : le chômage a augmenté de façon exponentielle, les travailleurs migrants des pays voisins ont été forcés de retourner chez eux et il y a eu un retour massif au milieu rural. L’échec de l’État face à la crise asiatique a donné naissance à plusieurs ONG et à l’expansion de la société civile. La crise a aussi fragilisé le consensus politique et social a motivé l’émergence des partis islamistes qui, depuis 1999, réclament l`instauration d’un régime islamiste [4].

Comme les autres pays asiatiques, la Malaysia a constaté que la croissance économique basée sur les investissements étrangers peut avoir des effets pervers. Comme que la prospérité économique est garante d’unité politique, le gouvernement a intérêt à soutenir son développement, notamment par des politiques institutionnelles de gestion et en favorisant des industries locales naissantes. Peut-être que des investissements plus solides dans le domaine technologique, en ressources humaines et en industrie auraient évité le démembrement des politiques économiques en 97, cela aurait aussi réduit la dépendance actuelle aux marchés occidentaux. À l’heure actuelle, la reprise de l’économie malaisienne se fait grâce aux exportations et aux investissements directs étrangers; les facteurs permettant le rattrapage économique représentent aussi des éléments de fragilité.

Ressources multimédia

Discours du président de la Asian Bank of Development, Haruhiko Kuroda. 1 2 3

Références

[1] Yves Gounin et Sébastien Vivier-Lirimont, La crise asiatique (Paris : presses universitaires de France, 1999)

[2] Éric Bouteiller et Michel Fouquin, Le développement économique de l’Asie orientale (Paris : Éditions La découverte, 2001)

[3] Jacques Mauduy, Asie de l’Est : émergence, convergence, concurrence? (Paris : Éditions Ellipses, 2005)

[4] Jean-Luc Domenach, L’Asie en danger, (Paris : Librairie Arthème Fayard, 1998)

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