Par H. Aysegul KARSLI
La Thaïlande, ce « Tigre » de l’Asie du Sud-est, était un des symboles du « miracle économique » asiatique avant la crise de 1997 ne vienne ternir cette image d’invulnérabilité et prouver la fragilité des économies émergentes dans la région. Pourtant, l’ancien Siam avait entrepris son développement industriel depuis les années 60, et connaissait une croissance soutenue de son PIB depuis la Seconde Guerre mondiale. Elle avait même terminé son décollage économique (de 85 à 97, le PIB par habitant a connu une hausse de 8% par an et les revenus se sont multipliés par quatre [1]).
Toutefois, cette crise souligna les lacunes de l’économie thaïlandaise : les structures sociales existantes (seulement 30% de la population est scolarisée) rendaient le passage à l’étape de la société de consommation de masse impossible [2] si bien que l’économie du pays dépendait toujours, en grande partie, des exportations et des investissements étrangers (l’économie thaïlandaise est en grande partie basée sur l’exportation du riz, le tourisme et ses secteurs connexes). Dès la crise mexicaine de 95, la suraccumulation et l`énorme taux d`investissement étranger en Thaïlande signalaient une crise imminente.
Arrivée en 1997, la compétitivité des produits thaïlandais sur le marché international qui se déprécie graduellement et le risque de retraits des capitaux entraîne le pays dans une période de dépression économique [3]. Face à la vague spéculative, le baht perd 20% de sa valeur en quelques mois. En 98, l’inflation élevée de 8,1% et le PIB qui baisse de 8% mènent à une crise sociopolitique [4]. Le gouvernement tente même d’expulser les travailleurs étrangers illégaux, qui jusqu’au jour pratiquaient leur métier sans contrainte. En 98, le FMI prête des montants colossaux à la Thaïlande (17 milliards de dollars) et en échange il exige une libéralisation du marché financier et du commerce extérieur. Ces prêts conditionnels ont détruit le modèle du développement du pays sans en créer un nouveau [5].
À la suite de la crise financière, la Thaïlande comme d’autres pays de la région s’engagent dans un processus de « réémergence » en adoptant de nombreuses réformes en faveur de l’ouverture économique. Le gouvernement sabre les dépenses et augmente les impôts. Également, il autorise les investisseurs étrangers à détenir la totalité du capital d`une banque. Cette politique économique porte ses fruits sans tarder et dès 2000 la Thaïlande commence à rembourser ses dettes au FMI. Aussi, grâce à une dévaluation importante de la monnaie, les produits thaïlandais redeviennent compétitifs et son économie est de nouveau proche de la prospérité.
À l’heure actuelle, la Thaïlande fait face à une régression des secteurs à faible technologie à cause de l’arrivée massive des autres pays sur la scène comme le Vietnam, le Cambodge et le Laos, mais la dynamique régionale s’avère positive.
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[1] Jacques Mauduy, Asie de l`Est : émergence, convergence, concurrence? (Paris : Éditions Ellipses, 2005).
[2] Yves Gounin et Sébastien Vivier-Lirimont, La crise asiatique (Paris : presses universitaires de France, 1999).
[3] Renaud Bouret, Relations économiques internationales (Montréal : Éducation Chenelière, 2008).
[4] Éric Bouteiller et Michel Fouquin, Le développement économique de l`Asie orinentale (Paris : Éditions La découverte, 2001).
[5] Jean-Luc Domenach, L`Asie en danger, (Paris : Librairie Arthème Fayard, 1998).