BARRAGE HYDROÉLECTRIQUE, MAIS AUSSI BARRAGE SOCIAL

Par Adil Boukind

Le 14 décembre 1994, la Chine décida de s’engager à la création d’un projet à la hauteur de sa croissance économique, le Barrage des Trois Gorges. Ce projet a pour principe la création d’un barrage hydroélectrique dans la région d’Hubei sur la rivière Yangzi. Celui-ci, une fois achevé, sera le plus grand du monde et sera capable de produire à l’année l’équivalent de la consommation annuelle d’énergie de la Belgique. Ce projet possède par conséquent une grande importance stratégique pour la Chine en matière de production d’électricité. La contradiction de ce projet est que d’une part la production d’hydroélectricité n’est pas polluante, mais que,  d’autre part, afin de pouvoir combler les besoins d’eau dont a besoin ce barrage pour fonctionner, le gouvernement chinois a décidé de noyer la vallée du Yangzi. Cette décision eut deux principales conséquences: la première est la délocalisation de la population qui est contrainte à évacuer la vallée et l’autre est la destruction de l’écosystème local. Cet exemple pose la problématique du développement « vert ». en dehors des question morales que ce cas pose, nous pouvons nous demander si de nouveaux projets de ce type sont à prévoir. Cet article se proposera d’analyser plus en détail l’impact sur la région et tentera de voir si ce projet est inévitable ou non…

Deux grands courants s’affrontent pour ce projet. D’un côté le point de vue écologique[1], qui met l’accent sur les impacts qu’auront la mise en place de ce barrage. En effet, l’activité entraînera deux conséquences logiques: la première étant l’inondation de la vallée du Yangtzi en amont tandis que le deuxième se traduit par un assèchement du reste de la vallée en aval. À court terme, cela entraînera un important mouvement de population, laissant ainsi des villes entièrement abandonnées et la pollution sera importante (à cause des produits toxiques qui n’auront pas été évacués entre autre comme les véhicules ou le matériel informatique). Du fait de l’inondation et de la pollution engendrée, l’écosystème en sera totalement changé avec la disparition de la faune et de la flore dans cette région. À long terme, les géologues redoutent l’érosion du sol ce qui le rendrait moins fiable et incultivable dans les alentours non-inondés. Un des autres risques non négligeable reste la position géostratégique du barrage. En aval se trouve trois villes importantes aussi bien au niveau économique que démographique: Shanghai, Nanjing et Wuhan. Le fait est qu’en cas de menaces sur le barrage, que ce soit d’origine terroriste, une guerre ou encore un tremblement de terre, l’eau retenue pourrait poser de sérieux dégâts à la région.

Une autre problématique est l’hypocrisie des pays occidentaux [2] qui prônent une production écologique mais qui supportent ce projet du fait de leurs intérêts à entretenir de bons rapports avec la Chine. Au point de vue sanitaire, la stagnation des eaux dans cette zone chaude aura le même effet que dans certaine région d’Asie: le développement de maladies telles que la malaria ou autres dues à la prolifération des bactéries qui seront dans un milieu favorable pour se développer. À long terme l’impact sur la population peut influencer la productivité de la région: moins d’investisseurs auront tendance à s’implanter, la santé de la classe ouvrière serait moins stable, etc.

L’argument officiel que le gouvernement met de l’avant est la propreté du projet au niveau mondiale. En effet, proportionnellement au niveau d’énergie produit, un barrage hydro-électrique pollue beaucoup moins qu’une usine. Au niveau international, ce sujet n’est que très peu critiqué par les autres États dans le but de ne pas compromettre leurs relations diplomatiques et économiques avec la Chine. À long terme, ce projet apporte des améliorations au niveau mondial en réduisant les gaz à effet de serres. La réduction des pluies acides est un des autres avantages pour les pays voisins notamment le Japon.

Par conséquent, nous pouvons nous demander si l’intégration mondiale (essentiellement économique) prône sur le développement alternatif. Ce type de développement met l’accent sur l’aspect social d’un état. Dans ce cas présent, la contradiction est importante entre le développement vert et la préservation de l’écosystème régional. La question se pose aussi quant à l’aspect social de ce projet. Peut-on sacrifier une « petite » région au profit de l’ensemble? La critique que l’on pourrait faire de ce projet est son ampleur. L’immensité du barrage est à la fois son avantage et son principal défaut. Une série de plusieurs barrages aurait probablement été plus bénéfique aussi bien au niveau énergétique que dans la préservation de l’écosystème. D’un point de vue économique, la Chine doit faire des concessions notamment dans l’arrivée de devises étrangères: la région ne pourra plus être aussi touristique qu’actuellement. Parallèlement le pays perd tout de même beaucoup de terres agricoles dont les bénéfices ne seront pas revendus ou réutilisés pour des produits manufacturés.

Up to the Yantze,Up to the Yantze Vidéo montrant la situation dans la région.

Bibliographie

Aadel Chaudhuri  – « Three Gorges Dam: Fortune or Folly? »

Robert B. Zoellick – « Whither China: From Membership to Responsibility? » – Department of State Deputy Secretary of State


[1] Aadel Chaudhuri  – « Three Gorges Dam: Fortune or Folly? »

[2] Robert B. Zoellick – « Whither China: From Membership to Responsibility? » – Department of State Deputy Secretary of State

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08

04 2010

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