Vers un capitalisme socialement responsable : fiction ou nouveau paradigme ?

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Par Mathieu Hamelin et Jasmine Bélanger-Gulick

Il y a quarante ans, Milton Friedman (1970) écrivait que les entreprises contribuent le plus à leur société lorsqu’elles se consacrent à leur raison d’être, c’est-à-dire augmenter les profits, créer des emplois et générer de la richesse. « The business of business is business », plaidait-il. Si cette position trouve encore des adeptes aujourd’hui, elle a été nettement supplantée par l’idée que la responsabilité des entreprises excède les obligations légales et financières. En Occident, il est de plus en plus admis que les entreprises ont des comptes à rendre non seulement à leurs actionnaires mais également aux individus et aux communautés affectés par leurs activités. Une entreprise doit certes créer un rendement appréciable pour ses actionnaires, mais ce rendement doit « être tempéré par l’appréciation de certaines normes sociales fondamentales qui vont au-delà des demandes de la loi et du marché » (Goodpaster 1991, 69).

Industrie Canada (2006, 5) présente la responsabilité sociale comme « la façon dont les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales et économiques à leurs valeurs, à leur culture, à leur prise de décisions, à leur stratégie et à leurs activités ». Pour la Commission européenne (2001, 7) : « Être socialement responsable signifie non seulement satisfaire aux obligations juridiques applicables, mais aussi aller au-delà et investir « davantage » dans le capital humain, l’environnement et les relations avec les parties prenantes ». Pour sa part, la récente norme ISO 26000 indique que les entreprises responsables sont celles qui « contribuent au développement durable, incluant la santé et le bien-être de la société ».

Les entreprises sont d’ailleurs de plus en plus sollicitées pour contribuer à la résolution des problèmes sociaux et environnementaux. Lors des grands sommets internationaux, par exemple celui de Rio+20 tenu l’an dernier, il est abondamment question de leur contribution essentielle au développement humain et à la sauvegarde du patrimoine écologique. La pollution atmosphérique, l’utilisation des terres arables, la souveraineté alimentaire, le réchauffement climatique sont des exemples d’enjeux transnationaux qui ne peuvent être résolus sans un effort coordonné de la part des acteurs étatiques et non étatiques.

Les institutions internationales insistent aussi de plus en plus sur la nécessaire collaboration entre les gouvernements et le secteur privé. Les Objectifs du Millénaire pour le développement confient aux entreprises un rôle dans l’avancement des droits humains et la réduction de la pauvreté. Le Global Compact leur demande de protéger les droits de l’Homme, de combattre la corruption et de développer des technologies propres. Les Principes pour l’investissement responsable plaident pour l’incorporation des enjeux sociaux et environnementaux dans le processus de décisions financières des grands investisseurs. L’ONU s’est dotée d’un Représentant spécial pour la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales, lequel a clairement statué que les entreprises ont le devoir de « protéger, respecter et réparer » les droits humains dans l’ensemble de leurs activités et de leurs relations.

Mais selon bien des observateurs, la responsabilité sociale n’a pas encore atteint son « point de bascule », comme l’illustre la professeure Sandra Waddock (2003). Plusieurs actions volontaires mises de l’avant par les entreprises sont souvent perçues comme du « green washing », c’est-à-dire une façade pour dissimuler le véritable objectif de l’entreprise, soit celui de maximiser le rendement de ses actionnaires. Le décalage entre le discours et la pratique (entre les principes de responsabilité sociale et leur application effective sur le terrain) fait en sorte que les initiatives des entreprises sont souvent jugées avec cynisme et méfiance. À l’évidence, les entreprises ne s’y engagent pas avec le même sérieux et les mêmes motivations.

Certaines entreprises font preuve d’une conscience sociale sincère, mais d’autres agissent par pure stratégie afin d’arriver à leurs fins. Comme l’éthique, les initiatives sociales sont susceptibles d’être instrumentalisées à des fins de marketing et de relations publiques, si bien qu’il devient complexe de distinguer la véritable responsabilité sociale de l’ensemble de la stratégie commerciale d’une entreprise. Il est facile de s’y perdre devant l’abondance de codes de conduite, d’organismes de certification, d’agences de notation sociale, de produits équitables, de rapports de performance sociale et de fonds d’investissement responsable. Les progrès significatifs dans certains domaines n’ont pas fait taire les critiques, d’autant plus que les scandales financiers et les négligences environnementales continuent de faire les manchettes régulièrement.

Au-delà des slogans et des discours, la responsabilité sociale peut-elle contribuer à forger un capitalisme respectueux des valeurs humaines et des besoins des individus et des collectivités ? C’est ce à quoi ce numéro spécial de Possibles tente de répondre, à l’aide d’une diversité de points de vue et de perspectives.

Contester ou conforter le système en place ?

Les articles de ce numéro soulèvent de nombreux éléments de réflexion, dont un questionnement sur la nature et l’ampleur du changement amené par le courant de responsabilité sociale. L’émergence de nouvelles normes sociales et environnementales en Occident laisse-t-elle présager une transformation en profondeur ou en surface du système capitaliste actuel ? Peut-on réellement croire à l’avènement d’un capitalisme « socialement responsable », c’est-à-dire un capitalisme conscient de ses impacts parfois négatifs sur les individus et dédié à l’amélioration des sociétés. Au contraire, doit-on juger la responsabilité sociale comme une utopie, ou pire encore comme une manœuvre de diversion ou une tactique pour préserver la position enviable des entreprises et consolider l’hégémonie du système actuel ? La responsabilité sociale serait-elle la « caution » parfaite qui permet aux entreprises de poursuivre leurs activités sans trop de contraintes ?

Cette courte introduction n’a pas l’ambition de faire le tour de cette vaste question, mais plutôt d’ouvrir la porte à quelques pistes de réponses. Force est de constater que le courant de responsabilité sociale se situe jusqu’ici à l’intérieur des limites du système actuel. Les nouvelles normes ne visent pas tant la refonte du système capitaliste que la bonification du rôle de l’entreprise au sein de la société et l’instauration de critères sociaux et environnementaux afin de contrebalancer les critères financiers et économiques traditionnellement utilisés pour juger de la légitimité d’une activité commerciale ou productive. Les entreprises doivent accepter de nouvelles responsabilités sociales et environnementales, en échange desquelles elles peuvent conserver le droit d’exploiter des ressources et d’engendrer des bénéfices (Gendron 2002).

L’adoption des normes de responsabilité sociale demeure encore fortement liée à des raisons stratégiques et utilitaires, c’est-à-dire au besoin des entreprises de maintenir leur réputation, de gagner des parts de marché et de rehausser le lien de confiance qui les lie à l’ensemble de la société. Pour reprendre l’expression de Morvan (2008, 126), la responsabilité sociale « est au cœur des tentatives de légitimation » des entreprises. Même les dirigeants les plus sceptiques à l’égard du rôle social de l’entreprise reconnaissent qu’il serait « suicidaire » de ne pas s’adapter aux normes sociales et environnementales qui s’imposent graduellement. Le slogan « Good ethics is good business » résume bien cette vision.

Ceci dit, l’adoption instrumentale de ces normes a son importance car elle représente peut-être une première étape (un passage obligé) dans le processus menant à leur « internalisation », c’est-à-dire à leur intégration à l’identité des acteurs et à la culture des organisations (Risse & Sikkink 1999, Finnemore & Sikkink 1998). Le système économique ne s’en trouvera peut-être pas chambardé de fonds en comble, mais il est certainement susceptible d’évoluer au fur et à mesure que progresseront ces normes sur le rôle social de l’entreprise et le développement durable. Sans exagérer l’impact des changements de mentalité, on constate déjà une montée des valeurs sociales et environnementales dans le monde des affaires. Bien des comportements jugés acceptables il y a quelques décennies à peine ne le sont plus aujourd’hui.

Les dirigeants, les actionnaires, les consommateurs et les investisseurs d’aujourd’hui ne sont plus tout à fait les mêmes qu’il y a vingt ans, ne serait-ce qu’en raison de la somme d’informations dont ils disposent. Il n’y a pas si longtemps, au début des années 1990, les technologies de l’information et des communications en étaient à leurs balbutiements et les chaines de production commençaient tout juste à se mondialiser et à intégrer les millions de travailleurs des pays en développement. Les fonds d’investissement responsables et les organismes de certification étaient peu nombreux, le mouvement « anti-sweatshops » ne s’était pas encore lancé à l’assaut des marques populaires et les pressions sociales étaient nettement moindres sur les entreprises (Waddock 2003).

Le contexte actuel est fort différent. Certes, les consommateurs recherchent encore des produits au prix le plus bas, et les investisseurs sont toujours en quête du meilleur rendement possible. Mais pour un nombre croissant d’entre eux, il est approprié et souhaitable d’acheter des marques ou des actions d’entreprises respectueuses de l’environnement et des droits humains (Turcotte 2002). Pour eux, ces comportements ont une valeur intrinsèque indépendante des bénéfices financiers qui peuvent en découler. Ils s’approprient ces nouvelles normes parce qu’ils les jugent dignes de respect, et non pas parce qu’ils en tirent un profit particulier (March & Olsen 1989, Keohane 2002). Dans le même sens, de plus en plus de dirigeants et de gestionnaires tiennent à exercer un leadership social et environnemental et utilisent le puissant véhicule qu’est l’entreprise pour tenter d’améliorer le monde qui les entoure.

On peut certainement demeurer sceptique à l’égard des préoccupations sociales des entreprises et de l’émergence d’un présumé capitalisme à « visage humain ». Devant la multiplication des scandales financiers, des cas de négligence environnementale, des atteintes aux droits humains et des cas de corruption, il est tentant de considérer la responsabilité sociale comme de la « poudre aux yeux ». Mais si le capitalisme se présente encore fréquemment sous son visage le moins reluisant, il reste que de telles aberrations ne passent plus inaperçues et mènent à des crises d’envergure.

On voit mal comment les entreprises pourraient revenir en arrière et tourner le dos aux nouvelles normes après deux décennies d’efforts et d’investissements considérables pour associer leurs marques à des valeurs sociales et environnementales. Même en présumant que leurs intentions de départ relevaient davantage du positionnement stratégique que d’une réelle conscience humanitaire, elles se sont néanmoins insérées dans une logique où les comportements socialement responsables sont devenus obligatoires.

Il est de plus en plus évident que les entreprises occidentales ne peuvent plus se cantonner dans la sphère économique, car leur légitimité au sein de la société risque de s’éroder (Gendron & al. 2004). Cela est d’autant plus vrai que leurs activités sont scrutées à la loupe par les environnementalistes, les ONG, les médias, les investisseurs et les consommateurs, ce qui maintient sur elles une pression constante et les force à une plus grande transparence. La publication de rapports de développement durable, surtout ceux réalisés en suivant les critères de transparence du Global Reporting Initiative (GRI), s’inscrit dans cette tendance.

Enfin, il faut aussi reconnaitre que les entreprises ne font pas que réagir aux pressions des militants et du marché. Elles « font » la responsabilité sociale, tout autant qu’elles s’y adaptent. Elles participent à la construction du nouveau discours normatif, en même temps qu’elles refaçonnent leur identité et qu’elles évoluent en tant qu’organisations. Ce processus est dynamique et implique de nombreux acteurs, comme nous l’abordons ci-après. Un défi de taille est d’ailleurs l’établissement de normes reconnues et acceptées à la fois par les entreprises, les gouvernements et la multitude de parties prenantes. À l’échelle internationale, la tâche est encore plus complexe, compte tenu des différences culturelles et les niveaux de développement des pays.

Une toile complexe et une diversité d’acteurs

À la lecture des articles de ce numéro, on est en effet frappé par la diversité des acteurs impliqués ou sollicités par le courant de responsabilité sociale : les gouvernements, les organisations internationales, les experts, le secteur privé et les différents groupes issus de la société civile. Devenues des acteurs incontournables de la gouvernance mondiale, les entreprises participent à plusieurs institutions internationales et leur apport est de plus en plus nécessaire, aux plans financier et technologique notamment. Mais l’influence accrue des entreprises soulève aussi un questionnement au sujet de leur représentativité et de leur imputabilité. Par exemple, la multiplication des codes de conduite et des mécanismes de certification risque-t-elle d’entrainer une privatisation de la régulation et un désengagement des États à l’égard des normes du travail ? Au contraire, la responsabilité sociale offre-t-elle une opportunité pour démocratiser les instances de la gouvernance mondiale en intégrant le travail des entreprises, des ONG, des communautés épistémologiques, des syndicats et d’autres groupes au sein de plates formes communes ? À plusieurs égards, la responsabilité sociale se situe à la frontière des sphères privée et publique.

Traditionnellement, la gouvernance et la régulation étaient exercées par les institutions publiques nationales. Depuis les années 1980, la tendance est cependant à un retrait partiel de l’État de la sphère de la régulation et plus généralement de la gouvernance. En parallèle, on observe l’émergence de la gouvernance et de la régulation privées d’une part, et supranationales d’autre part. Si la gouvernance internationale est une tendance qui gagne du terrain depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la prolifération des formes privées de gouvernance est observable surtout depuis une dizaine d’années. On constate ainsi une abondance de codes de conduite volontaires, de normes de certification et d’autres initiatives d’auto-régulation ou de régulation multipartite (Borras & Franco 2010).

La gouvernance internationale ou supranationale n’est pas nouvelle. Des centaines d’organisations internationales ont été fondées au cours du dernier siècle, mais cette forme de gouvernance a pris davantage d’ampleur avec la mondialisation actuelle et le développement de nouvelles activités économiques. Par exemple, l’apparition du phénomène de l’accaparement des terres a résulté en une croissance de la gouvernance internationale et de principes de responsabilité sociale dans ce domaine. Dans ce cas précis, des organisations internationales telles que la Banque Mondiale et la Food and Agriculture Organization ont établi des principes volontaires pour encadrer les investissements fonciers afin qu’ils soient socialement responsables. De manière similaire, la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International ont incorporé le concept de développement humain dans leurs discours sur le développement, tentant d’établir des lignes directrices, en théorie à tout le moins.

Plusieurs facteurs expliquent le désengagement de l’État et l’émergence de nouveaux acteurs dans la gouvernance économique mondiale et plus particulièrement dans le domaine de la responsabilité sociale. Le contexte global a changé. Il s’est produit une évolution importante au cours des trente dernières années, alors que la mondialisation s’accompagne d’une « dé-territorialisation » de la production et des impacts environnementaux et sociaux. Les gouvernements nationaux sont incapables de contrôler totalement la nouvelle économie globale. Les entreprises transnationales opèrent globalement, sont mobiles et peuvent se soustraire aux cadres législatifs trop contraignants.

Par ailleurs, les répercussions négatives de la mondialisation dans divers domaines ont amené la création de réseaux militants transnationaux – représentants d’une certaine « société civile mondiale » – qui ont exercé des pressions sur les organisations internationales et les entreprises privées, après avoir sans succès demandé une intervention accrue des gouvernements nationaux (Mayer & Gereffi 2010). Dans une certaine mesure, les militants et les ONG tentent d’encadrer les activités des entreprises dans certains domaines, récupérant ainsi une partie du rôle traditionnel de l’État. Ce sont par exemple les mouvements populaires de consommateurs qui ont incité l’industrie agro-alimentaire à offrir au marché des produits biologiques. Dans d’autres cas, le secteur privé s’est auto-régulé de manière proactive afin de prévenir l’intervention étatique (Loconto & Busch 2010).

La responsabilité sociale se veut donc une toile complexe qui regroupe à la fois : les gouvernements qui légifèrent au niveau national et participent à des négociations au sein des organisations internationales; les organisations internationales où se négocient des traités et des codes non contraignants; le secteur privé qui propose ses propres régulations; et divers groupes de la société civile qui élaborent des principes de responsabilité sociale et exercent des pressions sur les gouvernements et le secteur privé pour faire respecter ces principes et les législations en place. La responsabilité sociale est un espace flou où interagissent tous ces acteurs, créant des dédoublements de rôles, mais laissant aussi des vides.

Structure du numéro

La première section de ce numéro de Possibles s’articule autour des thèmes de la responsabilité sociale et du développement. Le premier texte, celui de Jasmine Bélanger-Gulick, explore le lien entre les acquisitions foncières à grande échelle et la responsabilité sociale des entreprises. Il tente de répondre à la question : « Les investissements fonciers massifs dans les pays en développement peuvent-ils être socialement responsables ? ». Le texte discute des principes qui devraient être suivis et des implications de ces investissements. Efe Can Gürcan, également dans la veine de l’agro-alimentaire, propose une analyse des enjeux de l’industrialisation et de la « supermarché-isation » du secteur agro-alimentaire, et se penche sur la croissance du marché de produits alimentaires biologiques en tant qu’instrument hégémonique de l’agro-industrie. Le texte de Mathieu Hamelin jette un éclairage socio-politique sur la théorie des parties prenantes, selon laquelle une entreprise qui veut prospérer a tout intérêt à gérer activement ses relations avec les acteurs de son environnement. Il montre que les entreprises tendent naturellement à se préoccuper davantage des acteurs les mieux organisés et les plus bruyants. Au contraire, les acteurs les plus vulnérables et les plus affectés par les activités économiques n’ont pas toujours les moyens de se faire entendre. Le texte de Maïka Sondarjée porte sur le concept de « développement humain », intégré au discours des grandes organisations internationales depuis la fin des années 1990. L’adoption de ce concept semble marquer un tournant idéologique et le texte se penche sur son niveau d’implantation dans la pratique.

La deuxième section du numéro est axée davantage sur le thème du capitalisme, ses différents visages, sa remise en question et ses mutations. D’entrée de jeu, André Thibeault se questionne sur le déclin du paradigme du capitalisme, de plus en plus contesté depuis la récente crise financière. Il explore les idées de déclin et de possible transition vers un nouveau paradigme économique. Dans l’article suivant, Étienne Girouard s’intéresse à la transition en Chine entre une économie planifiée et une économie libéralisée et aux conséquences d’une telle transition sur les conditions de travail et la responsabilité des entreprises dans la protection sociale. Le texte évalue les implications sociales du nouveau type de capitalisme introduit par Deng Xiaoping qui tente de concilier libéralisme économique et autoritarisme politique. L’article de Jean-Claude Roc s’attarde également au thème de la transition. Il cherche à comprendre et à analyser les changements qui ont amené le discours sur les « nouveaux » visages du capitalisme. Il se penche sur les voies alternatives au capitalisme classique, le keynésianisme et le néolibéralisme, et les aborde à travers les idées de justice sociale et de force de travail. Pour clore cette deuxième section, Francis Dupuis-Déri démystifie le message et les actions de ceux (et celles) que les policiers, les médias et les politiciens qualifient de « casseurs », de « fauteurs de trouble » et d’« anarchistes ». Il remet en question les étiquettes qui leur sont attribuées et le traitement qui leur a été réservé au cours du « printemps érable ». À ses yeux, ces femmes et ces hommes contestent un système économique qui est bien plus violent que les quelques « casses » survenues lors des manifestations étudiantes, d’où l’importance de leur message.

Finalement, dans la section Documents, Ève Marie Langevin nous propose son « chant pour le monde », magnifiquement composé dans style hybride qui allie poésie et références contemporaines et historiques. Ève illustre les questions qui nous font tantôt douter, tantôt croire qu’un monde meilleur est possible, un monde plus juste et plus respectueux de la vie, un monde moins violent et moins cruel pour ceux qui n’ont pas les moyens des puissants.

Ce numéro de Possibles est parsemé des photos du photojournaliste Pascal Dumont, dont le regard posé sur la société de consommation et le comportement des entreprises permet d’illustrer plusieurs thèmes soulevés dans les articles.

Références

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Gendron, Corinne, Alain Lapointe et Marie-France Turcotte. 2004. « Responsabilité sociale et régulation de l’entreprise mondialisée ». Relations industrielles/Industrial Relations 59 (no 1) : 73-100.

Gendron, Corinne. 2002. Envisager la responsabilité sociale dans le cadre des régulations portées par les nouveaux mouvements sociaux économiques. Cahier de la CRRSDD de l’UQAM no 01-2002.

Goodpaster, Kenneth E. 1991. « Business Ethics and Stakeholder Theory Analysis ». Business Ethics Quarterly 1 (no 1) : 53-73.

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Locanto, A. et L.Busch. 2010. « Standards, Techno-Economic Networks, and Playing Fields : Performing the Global Market Economy ». Review of International Political Economy 17 (no3) : 507-536.

Mayer, Frederick et Gary Gereffi. 2010. « Regulation and Economic Globalization : Prospects and Limits of Private Governance ». Business & Politics 12 (no 3) : 1-25.

Morvan, Jérémy. 2008. L’investissement socialement responsable. Une nouvelle gouvernance d’entreprise. Paris : L’Harmatan.

Risse, Thomas et Kathryn Sikkink. 1999. « The Socialization of International Human Rights Norms Into Domestic Practices : Introduction ». Dans Thomas Risse, Stephen C. Ropp et Kathryn Sikkink, dir., The power of human rights : international norms and domestic change. Cambridge : Cambridge University Press, 1-38.

Waddock, Sandra. 2003. « What Will It Take to Create a Tipping Point for Corporate Responsibility ». Working Paper. Carroll School of Management, Boston College. Boston : BC.

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