Mémoire pour la consultation concernant loi n° 60, Charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l’État ainsi que d’égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d’accommodement.

Par le Centre communautaire des femmes sud-asiatiques

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Une perspective féministe

Le Centre communautaire des femmes sud-asiatiques de Montréal déplore, au sens le plus profond du terme, l’ajout proposé par le gouvernement du Québec de la « Charte des valeurs québécoises » à la Charte québécoise des droits et libertés déjà existante. Depuis 1981, en tant que féministes, nous rassemblons les femmes d’origine sud-asiatique, leur famille, leurs amis. Le projet de loi 60 viole la Charte québécoise des droits et libertés, la Charte canadienne des droits et libertés et la déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies. Ce projet échoue encore plus déplorablement sur la question de l’égalité des genres1. De plus, la section 50.1 ajoutée en 2008 à la Charte québécoise, « réitère que les droits sont également garantis pour les hommes et les femmes » 2.

Le Centre communautaire des femmes sud-asiatiques (CCFSA) est un organisme féministe québécois qui regroupe des femmes de différentes origines ethniques, culturelles, linguistiques, spirituelles, religieuses. Le CCFSA promeut la justice sociale et économique pour toutes les femmes immigrantes ou réfugiées et soutient l’équité et la détermination personnelle.

1 Lors d’une table ronde, Me Pearl Eliadis, dialogue communautaire sur le projet de loi 60 – égalité et perspectives féministes – Montréal, Université Concordia, 28 novembre 2013.

2 Communiqué de presse, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec. Montréal, 17 octobre 2013.

Depuis 32 ans, nous regroupons des femmes qui visent toutes le même but : faciliter l’adaptation des nouvelles arrivantes à la société québécoise. Nous fournissons un endroit sécuritaire et agréable où il fait bon se réunir pour participer à diverses activités qui impliquent des gens des pays sud-asiatiques, du Québec, du Canada, et de partout ailleurs. Nous sommes musulmanes, hindoues, bouddhistes, sikhes, zoroastriennes, chrétiennes. Certaines d’entre nous, sont agnostiques ou athées. En solidarité et en alliance avec les Québécoises francophones et anglophones ainsi que les femmes de groupes ethniques variés, nous nous positionnons de front dans la lutte féministe qui se tient au Québec.

Nous prenons nos propres décisions quant à notre tenue vestimentaire, que ce soit au travail ou à la maison. Quelques-unes d’entre nous peuvent facilement être associées à une religion en particulier, d’autres pas. Nous sommes des féministes. La « neutralité religieuse » à laquelle nous sommes parvenues dans nos relations professionnelles est de loin plus signifiante que celle, pastiche, proposée par le projet de loi 60. Notre neutralité repose bien sûr sur une compréhension véritable et un respect des convictions d’autrui, même si celui-ci ne partage pas nos opinions. Cacher les signes externes d’une quelconque affiliation religieuse ne fait pas disparaître les préjugés. Nous savons trop bien que les personnes qui semblent être, qui pensent être supposément neutres, ne le sont pas véritablement ; elles sont parfois racistes, xénophobes, islamophobes, homophobes, misogynes.

Le projet de loi 60, la Charte des valeurs québécoises proposée, fait une interprétation intégriste du sécularisme afin de faire la guerre aux minorités religieuses. Les résultats immédiats de ce projet de loi se font déjà ressentir lors de débats approuvés par l’État qui sont en réalité des attaques et qui accroissent simultanément la discrimination et les agressions patriarcales et racistes envers les femmes musulmanes voilées. L’analyse qui suit démontrera que cette Charte proposée est fondamentalement déficiente. Le projet de loi 60 représente l’anti-égalité, l’anti-équité en ce qui concerne les genres, les minorités ethniques et les religions, particulièrement l’Islam. Tel qu’énoncé par Me Eliadis, « si cette haine avait été instiguée par quelqu’un qui n’aurait pas été protégé par des privilèges parlementaires, cette personne aurait été confrontée à la loi contre les discours haineux »3.

De plus, nous trouvons très problématique le fait que cette soi-disant neutralité doive être imposée par la loi. « Il n’est pas raisonnable de supposer la partialité d’un employé du secteur public par le simple port d’un symbole religieux »4.

3 Me Eliadis, 28 novembre 2013.

Notre expérience, et celle de nos membres, démontrent au contraire que les préjugés racistes proviennent souvent de fonctionnaires publics qui ne portent aucun symbole religieux.

Nous sommes particulièrement préoccupées par la clause 10 qui forcerait le CCFSA à faire respecter la loi ; nous serions alors dans l’obligation de refuser d’employer des personnes portant le voile religieux. Nous serions également dans l’obligation de cesser de servir les femmes qui couvrent leur visage.

À ce sujet, nous pensons qu’il y a un manque de logique flagrant qui émane du projet de loi 60. En effet, si le but réel était d’assurer l’égalité des genres, alors, le renforcement de l’autonomie des femmes (empowerment) devrait être au cœur des préoccupations du législateur. Toutefois, les conséquences logiques de cette loi sont toutes autres: la femme musulmane pratiquante restera à la maison, économiquement inactive et dépendante financièrement des membres masculins de son foyer. Parce que les femmes appartenant à une minorité visible sont les membres de notre société les plus vulnérables à la discrimination, nous demeurons perplexes quant à ce besoin de changer les choses. De plus, nous pensons que, dans la sphère publique, la raison et le bon sens dictent souvent très bien la façon de gérer les accommodations.

En 2008, la commission Bouchard-Taylor, à qui nous avions aussi présenté un dossier et avec laquelle nous nous étions longuement entretenues, a publié un rapport. Parmi leurs « recommandations prioritaires » figurait «…la lutte contre l’inégalité et la discrimination ». Nos recommandations en ce sens se concentraient sur « l’urgence de lutter contre toutes formes de discrimination, l’islamophobie, l’antisémitisme et le racisme, auquel est particulièrement sujette la communauté noire »5. Nous croyons que les commissaires ont considéré notre point de vue. Nous recommandons donc fortement à l’ensemble du Québec de nous écouter aujourd’hui.

Nous sommes très conscientes des conséquences de l’intolérance religieuse. Plusieurs d’entre nous proviennent d’endroits où, de par le passé et encore maintenant, l’identification à des religions différentes sont la cause de violence et de milliers de morts. Cependant, nous sommes profondément choquées de constater que notre gouvernement vise à mettre en œuvre des pratiques qui excluraient de la fonction publique des musulmanes qui décident de porter le voile.

4 Communiqué de presse, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec. Montréal, 17 octobre 2013.

5 Gérard Bouchard, Charles Taylor. Fonder l’avenir. Le temps de la réconciliation. Rapport 2008.

Nous savons où mènent de pareilles mesures. L’histoire a démontré que les lois qui s’attaquent aux minorités engendrent une tyrannie de la majorité (en l’occurrence, la majorité judéo-chrétienne) et mettent fin au pluralisme et à l’acceptation. Par conséquent, nous affirmons que le gouvernement s’est engagé sur un terrain glissant et qu’il faudrait mieux faire demi-tour.

Depuis plusieurs décennies maintenant, le Québec met de l’avant des politiques novatrices et progressistes qui favorisent le pluralisme et l’égalité. Au Canada et partout ailleurs dans le monde, nous donnons l’exemple. Le cout fixe des garderies a permis à plusieurs femmes d’avoir accès à l’égalité. La Charte proposée est un retour en arrière et nous expose à la risée du reste du monde.

Au lieu de ramener à la maison les femmes qui portent le voile, le gouvernement devrait plutôt s’attarder à mettre fin à la violence envers les femmes. Voilà ce qu’est une véritable lutte pour l’égalité.

La position anti-religion de la Charte et de ses partisans : un schéma colonial

L’aspiration à la laïcité du Parti Québécois est ancrée dans une longue tradition de souveraineté libérale et de nationalisme conservateur aux valeurs républicaines françaises et aux discours de droite en ce qui a trait à l’égalité et à la liberté. Ce discours est né dans le contexte passé de la mission coloniale de l’Europe et continue à se perpétrer encore aujourd’hui. Derrière la Charte des valeurs se cachent des prétentions de modernité, de progrès et la croyance que seule la laïcité peut sauver les gens ‘prémodernes’, ‘moins évolués’ qui pratiquent une religion. La Charte perpétue la ‘mission colonisatrice et coloniale’, le ‘fardeau de l’homme blanc’, faisant la promotion de la ‘supériorité de la culture et des valeurs’ des québécois blancs francophones.

La Charte plaît à plusieurs Québécois francophones, ceux qui sont obsédés par la généalogie et la localisation précise de leurs ancêtres ici au Québec et là-bas en France. Sous cette obsession se cache le désir de provenir de la souche, de former une race pure. Cette peur de perdre le sentiment de chez-soi est en quelque sorte une forme d’eugénisme : la peur de l’Autre, définie par sa race et menaçant la pureté de la race d’ici. Dans cette optique, la Charte convient bien aux nationalistes de droite. Cette situation est similaire au climat social de la France où le Front national est en ascension.

La Charte québécoise des valeurs a déclenché des réactions racistes, xénophobes et en particulier islamophobes. Malgré les références aux turbans des hommes sikhs et des kippas des hommes juifs, les personnes les plus touchées par cette Charte, comme l’ont montré les débats des derniers mois, sont les femmes et plus particulièrement la femme musulmane. C’est elle qui personnifie cet « étranger » menaçant la culture et l’identité nationales. C’est elle qui est l’Autre, qui ne fait pas partie du Québec, bien qu’elle soit souvent née ici, qu’elle provienne de la souche, qu’elle habite ici et qu’elle parle français. L’association religion-ethnicité démontre une ignorance profonde puisque nombre de femmes musulmanes voilées sont nées ici, elles sont québécoises. Plus récemment, la polémique survenue à Verdun concernant des éducatrices à la petite-enfance portant le niqab a engendré des discours haineux et misogynes : « deux balles ; c’est la saison de la chasse, allons-y ! », « brulons ces femmes et violons les comme des porcs ! »6. Et nous posons la question, où sont les statistiques qui confirmeraient la peur de l’invasion des musulmanes voilées ?

Le mouvement Idle No More a déclaré que lors de l’élaboration de la Charte, les peuples autochtones n’avaient nullement été consultés. Aucune attention n’a été portée au fait que les anglais comme les français ont colonisé les peuples autochtones et qu’en tant qu’étrangers et nouveaux arrivants, ils se sont activement affairés à les supprimer au lieu de respecter leurs valeurs, leurs lois et protocoles traditionnels. « Les politiques coloniales d’autrefois ont censuré nos cérémonies, sweat lodges, potlaches, les Danses du soleil et autres, nos chansons, nos symboles religieux et spirituels, notre identité culturelle et notre langue, de la même façon qu’elles menacent aujourd’hui les autres pratiques religieuses »7. Il ne faudrait pas oublier que la population canadienne descend d’immigrants et de colons qui ont volé le territoire aux peuples autochtones.

Le point de référence mis de l’avant par les partisans anti-religion de la Charte, telle Janette Bertrand, est le régime oppressif de l’Église catholique sous Duplessis, l’époque du christianisme catholique. Les féministes en faveur de la Charte ont une conception bien dualiste des choses. Elles doivent ignorer le fait qu’il existe des féministes chevronnées qui suivent des pratiques religieuses et qui exercent quand même leurs droits en tant que femmes. Il est erroné d’assumer que toutes les religions et toutes les cultures sont statiques.

6 « Nous sommes les parents des enfants sur cette photo » signé par 13 parents, novembre 2013.

7 Déclaration du mouvement Idle No More

Au contraire, elles sont dynamiques, fluides, elles évoluent au rythme du temps. Le fait de ‘permettre’ le port de petits symboles religieux telle la croix et l’étoile de David montre bien l’incompréhension vis à vis les religions qui n’impliquent pas les mêmes pratiques symboliques ou pour qui le port de signes visibles est intégral à l’identité culturelle, spirituelle et/ou religieuse. Le terme «ostentatoire», associé aux symboles religieux démontre en lui-même un préjugé culturel.

L’égalité des hommes et des femmes et la liberté de religion – Une hiérarchie de valeurs

Récemment, des femmes issues de la Fédération des femmes québécoises (FFQ) se sont détachées de la fédération et ont décidé de créer le groupe « Pour les droits des femmes » (PDF). Ces dernières accusent la FFQ de féminisme libéral puisqu’elle laisse à la femme la liberté de se vêtir comme elle le veut. Le groupe PDF accuse la FFQ de défendre une position individualiste et libérale puisque la fédération maintient que la Charte force les femmes à choisir entre leur emploi ou leur religion. Ce discours tenu par le groupe PDF assume que la race, la sexualité, les conditions économiques, la religion n’ont aucune incidence sur les relations entre les hommes et les femmes. Cet universalisme est une sorte de paternalisme. Les féministes bourgeoises et blanches se trompent si elles pensent qu’elles parlent au nom de toutes les femmes, et plus particulièrement des femmes discriminées et exclues. Les droits individuels et le droit de pratiquer une religion sont bafoués par le supposé bien-être commun et collectif acquis par la pratique de valeurs universelles et abstraites qui n’ont pas d’égard aux genres. Voilà un exemple de la célèbre phrase de Spivak (1988), des « femmes blanches qui sauvent les femmes noires des hommes noirs ». De croire que la femme non-voilée peut et doit parler au nom de la femme voilée est en soi une vision coloniale et paternaliste – le fardeau de la femme blanche !

À l’issue des derniers États généraux de l’action et de l’analyse féministes8 (14-17 novembre 2013), plus de 700 participantes, de partout à travers le Québec et représentant divers organismes, se sont prononcées haut et fort en faveur de l’auto-détermination des femmes et de leur liberté de choisir la façon dont elles pratiquent leur religion et se vêtissent.

Nous soutenons le Collectif des féministes musulmanes du Québec dans leur refus de stigmatiser les femmes qui portent le voile et d’appuyer la hiérarchisation des citoyens québécois9. Ce sont nous les femmes qui sommes au gouvernail lorsqu’il s’agit de notre émancipation. Ce sont nous, et toutes celles qui s’identifient en tant que femmes, qui sommes le plus conscientes des différentes formes de violence qui nous menacent. La Charte des valeurs québécoises manque de logique lorsqu’elle soutient que l’égalité des femmes et des hommes doit l’emporter sur la liberté de religion. Cette position constitue une violation de la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que de la Charte québécoise des droits10. Comme le souligne la commission, la Charte néglige la question des droits lorsqu’elle s’exprime en termes de valeurs, alors que droits et valeurs sont deux choses différentes.

La détermination personnelle et le corps

La supposition paternaliste voulant que les musulmanes voilées n’aient aucune détermination personnelle implique une conception selon laquelle, paradoxalement, il vaut mieux les forcer à enlever leur voile plutôt que de leur laisser leur libre arbitre et leur liberté ! La Charte proposée viole le droit à la détermination personnelle et le droit d’être qui l’on est, sans interférence. Elle viole la souveraineté du corps de la femme en interdisant le port de symboles religieux. Il est inacceptable de laisser l’État imposer ce que la femme doit porter (ou ne doit pas porter). Nous nous opposons à cette imposition, qu’elle provienne de prêtres, de mullahs ou de l’État.

Le corps, les symboles religieux et l’identité

Le choix de porter le voile est lié, chez beaucoup de femmes, aux valeurs de la communauté, à la culture de la vertu, à la proximité avec Dieu. Il représente aussi une façon de vivre son incarnation. L’interprétation libérale, découlant directement d’une société capitaliste de consommation, ne peut que faire erreur dans son acception du terme choix.
En effet, le choix tel qu’envisagé par la Charte ne représente pas la réalité de la vie humaine. La multitude de facteurs sociaux, économiques et religieux sont autant de variables à prendre en considération lorsqu’il s’agit de choix11. Pour plusieurs musulmanes, le port du voile représente une forme d’expression de leur identité. Tout comme le port du turban et du kirpan chez les sikhs, ou de la kippa chez les juifs. Comme l’ont noté divers psychiatres de l’Université McGill, l’interdiction de pratiquer cette forme d’expression dans les sphères publiques peut avoir des effets négatifs sur la santé et le bien-être des personnes touchées12. Il importe de considérer la situation ambigüe dans laquelle se retrouvent ces femmes racialisées – incluant les femmes qui portent le voile- qui sont prises entre le fondamentalisme laïc (découlant du capitalisme et du colonialisme) et le fondamentalisme religieux. En tant que société, nous devons acquérir une compréhension globale de ce que signifient la détermination personnelle et le choix lorsqu’il est question de religion.

La peur du fondamentalisme

Bien des craintes concernant le port du voile ont été exprimées par des féministes qui sont en faveur de la Charte, provenant de pays tel l’Algérie où le port du voile est violement forcé. Leurs peurs s’enracinent dans la crainte du fondamentalisme religieux. Dans ces pays, en effet, les femmes qui refusent de porter le voile peuvent être tuées. Mais comme l’a bien noté Dalila Awada lors de son passage à Tout le monde en parle le 29 septembre 2013, nous sommes au Québec, pas en Algérie, et nos valeurs pluralistes ont, jusqu’à maintenant, soutenu le port du voile pour des raisons culturelles et religieuses, mais non politiques. Si l’on suit la logique de la Charte, le port d’un crucifix serait associé au fondamentalisme chrétien.

En conclusion, le Centre communautaire des femmes sud-asiatiques affirme sa solidarité avec les femmes, incluant les personnes qui s’identifient en tant que femmes, qui se battent pour la dignité. Nos 32 ans d’activité et d’activisme nous offrent une perspective informée de la situation. Nous nous opposons à toutes les formes de coercition. Nous nous opposons à toutes les autorités qui forcent des individus à se vêtir, à parler et à se comporter d’une certaine manière. Nous soutenons les femmes qui refusent de porter le voile parce qu’elles y sont forcées. Et, pour les mêmes raisons, nous soutenons les femmes qui refusent d’enlever leur voile parce qu’elles y sont forcées.

11 Stéphane Gaudet, Le Devoir, 9 octobre 2013, Des limites de la notion de « choix ».

12 The Gazette, 15 octobre 2013

Notre solidarité est notre force et nous continuerons de lutter pour notre libération collective, ancrée dans la diversité et la vision d’une société juste.

Soumis par

Le centre communautaire des femmes sud-asiatiques 1035 Rachel est
Montréal, Qc H2J 2J5
sawcc@bellnet.ca Téléphone: 514-528-8812 http://www.sawcc-ccfsa.ca

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