Le mouvement féministe en Asie du Sud-Est : La Thaïlande

Par Maria Kapelewski

Nous avons vu dans le post précédent les enjeux aux Philippines en ce qui concerne le mouvement féministes, son histoire et son évolution. Dans ce billet-ci, nous aborderons le même thème, en ce qui concerne la Thaïlande.

La Thaïlande est un royaume, dont la capitale est Bangkok. La population de la Thaïlande est d’environs 67 millions d’habitants pour une superficie de 513 120 km². Le régime politique présentement en place est une monarchie constitutionnelle. Auparavant appelé Royaume de Siam, jusqu’en 1932, où le pays change de nom et devient une monarchie constitutionnelle. La particularité de la Thaïlande, par rapport aux autres pays de la région d’Asie du Sud-Est, c’est que c’est un des seuls qui ne fut pas colonisés, par une puissance européenne ou américaine. Ça rend sa condition tout particulière, car le mouvement féministe ne se créera pas pendant la résistance anti-coloniale au Siam.

La religion principale en Thaïlande est le bouddhisme teravâda. Le christianisme et l’islam sont également présents mais en grande minorité. Le bouddhisme teravâda arrive vers le 11eme siècle en Thaïlande, et devient bien établie vers le 17eme siècle. Un grand lien existe entre le mouvement féministe (égalité des genres principalement) et la religion bouddhiste. Premièrement, cette religion condamne l’existence des femmes en ce monde et affirme qu’elles doivent renaître comme un homme pour pouvoir exister et devenir « «Bouddha ». Les lois d’Ayutthaya ( la capitale de la province d’Ayutthaya, royaume dominant Thaïlandais) reflète le plus l’emphase sur la hiérarchie homme/femme. La femme y est d’ailleurs considérée comme la moitié de la valeur du rang de l’homme à qui elle est liée. Mais, même si les féministes Thaïlandais ont violemment critiqué la nature « suppressive » de la religion, il est important de noter que cette même religion permet le divorce (droit important pour hommes et femmes) et que le droit pour les femmes de propriété et d’héritage est meilleur qu’en Inde. Si l’on compare le statut des femmes et ceux des moines, qui ont un statut considéré tel un achèvement , car passage à l’âge adulte et rapprochement ultime de Bouddha, ils ne sont pas pour autant supérieur . En effet, les femmes « bien nées » (aristocratiques) ont un statut similaire à ceux des moines. Mais, la Thaïlande interdit l’avortement, sauf en cas de danger pour la mère, en grande partie à cause du bouddhisme, qui considère cet acte comme un péché. Certaines féministes pensent se faire pardonner en priant aux temples, mais est-ce que féminisme, lutte pour l’égalité des sexes dans tous les droits, et bouddhisme teravâda, sont-ils compatibles? Est-ce possible de croire en une religion qui restreint sa propre liberté, dû au genre assigné à la naissance?

Le féminisme est également présent en Thaïlande, contre des activités dégradant l’image de la femme dans la société. La prostitution, le tourisme sexuel ainsi que les concours de beauté sont très répandus, et font figure dactivités établies et installées pour les touristes. Là où le pouvoir est purement patriarcale dans la société Thaïlandaise, les femmes sont encore exploitées et sous-estimées. La prostitution est considérée comme activité légale pour le gouvernement Thaïlandais, ce qui a pour résultat d’attirer en masse des touristes en demande de tourisme sexuel peu cher et sans risque de se faire attraper. Le statut de la prostitution n’en est pas pour autant légal, mais toléré par certaines autorités. Les salons de massages sont monnaies courantes, et beaucoup de féministes se battent pour fermer ces salons, démanteler le réseau derrière ce business et également atteindre le gouvernement pour lui sommer d’agir. Les lois clament la « liberté de chacun d’agir pour sa personne », alors que la réalité est toute autre. La prostitution et le tourisme sexuel n’est pas l’affaire de femmes créant des lieux pour y travailler. C’est souvent la tache des réseaux mafieux, gangsters, encore une fois d’hommes, contrôlant et soumettant des femmes à leurs pouvoir; cela engendre le trafic humain, la prostitution infantile et clandestine, et est un danger pour la santé et la vie des femmes.

Quels sont les combats pour les féministes Thaïlandaises de nos jours? En premier lieu, savoir gérer religion et combat pour ses droits. Dans un pays majoritairement bouddhiste, et dont la religion soumet plusieurs points contradictoires à une modernité Thaïlandaise possible, la question se pose encore : quel avenir a-t-on pour cette religion si les femmes veulent voir leurs droits égaux à ceux des hommes? En deuxième lieu, il faut considérer le combat des femmes contre leurs soumission dans l’industrie sexuelle. Bien ancré, et approuvé même par le gouvernement Thaïlandais, ce combat est très actuel, et controversé. Bien des pays ont également mis en place des campagnes pour lutter contre le tourisme sexuel et l’exploitation des femmes.


BIBLIOGRAPHIE

A companion to gender history

edited by Teresa A.Meade and Merry E.Wiesner-Hanks

Blackwell Publishing, 2004

Legalization of Prostitution in Thailand: A

Challenge to Feminism and Societal Conscience

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Peace and Security in the Asia-Pacific : theory and practice

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Women, Feminism and Development

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McGill-Queen’s Press

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