Le Brunei Darussalam, un État riche, mais pour combien de temps?

Par Shiran Sivarajah

Imaginez un état de la taille de la Corse qui dégage depuis 1980 un surplus budgétaire et commercial tel qu’il dispose aujourd’hui d’un confortable fond souverain de 120 milliards de dollars et n’a aucune dette[1]. De plus, ce pays dispose d’un état providence à faire jalouser les pays scandinaves : les étudiants sont payés pour étudier à l’université, les prêts immobiliers sont à 0%…le tout sous une économie avec 4% de chômage[2] et aucune taxe sur le revenu.[3]

Pendant ce temps en Europe et aux USA, les politiques d’austérité rognent les services sociaux et le pouvoir d’achat de la classe de la classe moyenne. Par comparaison, le Canada c’est 7 % de taux de chômage et un endettement de 85% du PIB.[4]

Cet état existe réellement, c’est le Brunei Darussalam, avec ses 0.4 million d’habitants, encastré dans l’état Malaysien de Sarawak (MARIE CNRS)[5]. L’état discret est dirigé par un généreux et riche Sultan, Hassanal Bolkiah, qui offre une excellente qualité de vie à ses citoyens grâce aux ressources en hydrocarbures du pays ce qui permet de préserver une paix sociale rare en Asie du Sud-Est.[6]

Seulement un rapide coup d’œil sur son économie montre la domination de l’industrie du gaz et du pétrole dans l’économie et un secteur privé quasi inexistant. Ainsi la majorité des Brunein sont des fonctionnaires. L’industrie des hydrocarbures est gourmande en capitaux financiers, mais pas tant en capitaux humains,si jamais la croissance démographique dépasse le croissance des revenus des hydrocarbures l’économie tomberait en ruine à cause du chomâge. Le surplus du pays est suffisant pour financer certains projet immobiler mais pas le chômage de toute une population..[7] Le manque de diversification de l’économie est tel que la majeure partie de la viande du pays provient d’un ranch australien privé qui appartient au Sultan et dont la superficie est plus grande que le Brunei Darussalam.[8]

Pourquoi faut-il absolument [fp1] diversifier son économie si l’argent coule à flot aujourd’hui?

Les revenus du gouvernement dépendent entièrement des hydrocarbures. Si le gouvernement ne dispose pas de ces revenus, c’est la fin de l’état providence et donc de la paix sociale..Les ressources naturelles ne sont jamais illimitées et selon le Oil & Gas Journal, les réserves de pétroles de Brunei sont en déclins à 1.1 milliard de barils prouvés en réserves. La ville de Dubaï par exemple dispose de 4 milliards de barils, mais l’UAE a réussi de faire de cette ville un “Las Vegas” du monde arabe et la majeure partie des revenus de la ville provient aujourd’hui de l’immobilier et du tourisme.[9]

À la dépendance au hydrocarbure se combine l’absence de secteur privée. Les ressources naturelles voient leur valeur évoluer constamment sous l’influence des marchés internationaux. Le Brunei vendait ses barils à 100$ en 2008 puis à 75$ en 2010, sachant que ces revenus permettent de financer les salaires des fonctionnaires du pays[fp2] , si le gouvernement doit licencier ses fonctionnaires par manque de revenu, le chômage exploserait car il n’y a pas de secteur privée pour employer les non fonctionnaires.

Kotler et Al (1997) recommandent de se concentrer sur le développement de plusieurs industries qui présentent déjà un avantage comparatif, le Brunei dispose de trois axes à fort potentiel: la finance, l’éducation et le tourisme.

La concurrence est déjà rude avec Singapour dans la région, mais Brunei est un état islamique et au potentiel de devenir un leader en finance islamique en Asie avec comme client la Malaisie, mais aussi son voisin, l’Indonésie, le plus grand pays musulman du monde. Brunei dispose des capitaux et d’un cadre politique stable contrairement à ses voisins ce qui est un avantage indéniable.[10]

Les universités du Brunei n’ont pas leurs places dans les classements internationaux à cause du manque de professeurs de rang international ce qui pénalise la recherche[fp3] [11]. Singapour a pu pallier à ce problème en misant sur l’immigration rapide et simple pour les travailleurs et étudiant hautement qualifiés tout en proposant un cadre vie stable, mais dynamique à la porte des pays asiatiques dynamique, mais encore en retard comme la Chine et l’Inde. Ces politiques ont fonctionné, car des universités prestigieuses comme Duke University sont venues implanter des campus satellites.[12]

Le Brunei ne dispose pas d’une main-d’œuvre bon marché comme ses voisins, mais le pays dispose d’infrastructure de qualité et l’imposition de règles environnementales strictes par le Sultan et l’absence d’industrie lourde présente un pays [fp4] avec de magnifiques espaces verts et un écosystème préservée. La niche de l’écotourisme de luxe est donc ouverte, reste à donner au pays une image sur la scène internationale.. Pour cela le Brunei dispose de ses ambassades et la Brunei Royal Airlines devrait s’étendre et faire des partenariats pour étendre sa gamme de vols internationaux.[13]

Le Brunei Darussalam est aujourd’hui riche, autant économiquement que socialement grâce à son généreux Sultan. Néanmoins ses ressources en hydrocarbures ne sont pas illimitées et avec le développement des énergies vertes, rien n’assure son avenir à long terme. C’est pour cela que l’éducation universitaire, la finance islamique et l’écotourisme sont des niches à investir, car encore peu développé dans la région Asie du Sud-Est.


[1] Marie-Sybille de Vienne

[2] IMF Country report. (2008). Http://www.imf.org/external/pubs/ft/scr/2008/cr08165.pdf

[3] Manu Bhaskaran

[4] CIA World Facts

[5] Marie-Sybille de Vienne

[6] Alaa Aldin Abdul Rahim Al Athmay et Al

[7] Alaa Aldin Abdul Rahim Al Athmay et Al

[8] Manu Bhaskaran

[9] Abdul Amin Haji Hashim

[10] Roger Neil Lawrey

[11] Roger Neil Lawrey

[12] Roger Neil Lawrey

[13] Roger Neil Lawrey

Bibliographie

Abdul Amin Haji Hashim. 2010. « Challenges in achieving Wawasan 2035 goals: Economic Diversification in Perspective ». CSPS Strategy and Policy Journal, Volume 1, July 2010, Pages 29-54.

Alaa Aldin Abdul Rahim Al Athmay, Shamim Ahmad Siddiqui, Hamdan Bin Mohammed. 2012. « Development and Growth through Economic Diversification: Are there Solutions for Continued Challenges Faced by Brunei Darussalam? ». Journal of Economics and Behavioral Studies Vol. 4, No. 7, pp. 397-413, July 2012 (ISSN: 2220-6140)

CIA Fact Report: Brunei Darussalam https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/bx.html

IMF Country report. (2008). Http://www.imf.org/external/pubs/ft/scr/2008/cr08165.pdf

Manu Bhaskaran. 2010. « Economic Diversification in Brunei Darussalam ». CSPS Strategy and Policy Journal, Volume 1, July 2010, Pages 1-12.

Marie-Sybille de Vienne. 2012. Brunei : de la thalassocratie à la rente. Paris: CNRS Editions.

Roger Neil Lawrey. 2010. « An economist’s Perspective on Economic Diversification in Brunei Darussalam ». CSPS Strategy and Policy Journal, Volume 1, July 2010, Pages 13-28.

IMAGE 1 SOURCE : Ministry of Tourism Brunei

IMAGE 2 : VOIR IMAGE

IMAGE 3 : Ministry of Tourism Brunei


[fp1]Ah, génial. La réponse

[fp2]comme dans tous les pays

[fp3]source

[fp4]le Brunei n’est pas une ile

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