Les ONGs et la province de Lao Cai au Vietnam

Par Mercedes Lussier-Trépanier

Depuis l’avènement de la mondialisation et la création d’organismes non gouvernementaux (ONG) ou inter gouvernementaux (OIG) comme le FMI, l’OMC et la Banque mondiale, on remarque l’apparition d’un nouveau mouvement qui vient contrebalancer ce phénomène de mondialisation de l’économique. Ce nouveau mouvement social international qu’est l’altermondialisation, dont plusieurs ONG et OIG font partie, détermine de nouvelles conditions de luttes sociales qui sont plus axées sur le développement durable, la souveraineté alimentaire, les droits humains fondamentaux plutôt que la prospérité économique[1]. C’est alors que l’on voit une prolifération d’ONG luttant pour la défense des droits humains, pour la préservation des cultures traditionnelles, etc. Ainsi, ces ONG sont massivement présentes en Asie du Sud-Est, autant elles sont fondées dans les centres urbains la région (les Philippines sont le berceau des ONG) autant leurs projets sont appliqués dans les régions rurales des pays d’Asie du Sud-Est. La question des minorités ethniques, qui marque cette région du monde est donc un champ de bataille prioritaire pour les ONG altermondialistes. Un bon exemple de la situation des minorités ethniques et de leur relation avec les ONG est le Vietnam, car au-delà des Viêt, le Vietnam regroupe 53 minorités ethniques que l’on retrouve dans les montagnes du Nord. Nous verrons en premier lieu la situation des minorités ethniques de la province de Lao Cai au Vietnam suivi d’un exemple de programme d’intervention de l’ONU et un bilan de son efficacité réel.

La province de Lao Cai est peuplée de 22 minorités ethniques différentes, où la population a un revenu annuel de 150$ US par habitant, cette région est l’une des plus pauvres du Vietnam[2]. Pourtant, il y a de grandes possibilités d’ouverture économique pour les ethnies de la province grâce à sa richesse en ressources naturelles, surtout pour produits forestiers, mais aussi au plan agricole. De plus, la proximité avec la Chine (frontière commune au nord) est un atout au plan du développement économique[3], donc tous les éléments pour établir le commerce dans la province de Lao Cai sont disponibles, mais pourquoi les habitants sont-ils réticents au projet de développement économique et ne veulent pas collaborer avec le gouvernement? La réponse à cette question est anthropologique, car le fait est qu’ils veulent tout simplement continuer à vivre de manière traditionnelle. Les peuples de la province de Lao Cai sont établis dans ces montagnes depuis des siècles et ne sont pas intéressés par un changement de leur mode de vie. Bien que leur situation soit inquiétante d’un point de vue occidental, eux ne se perçoivent pas comme étant défavorisés, car ils ont toujours vécu ainsi. De plus, les ONG travaillant pour la défense des minorités ethniques vivant sous le seuil de la pauvreté ne sont pas en interaction entre elles et ne tentent pas d’agir en commun pour les aider. Au lieu de cela, chacun défend la valeur qui lui est chère sans se préoccuper des actions des autres ONG. Le problème est qu’il y a peu d’attention qui est accordée à l’impact des interventions des ONG sur la vie quotidienne des minorités ethniques de la province de Lao Cai.

La branche de l’ONU nommée l’Organisation internationale du travail (OIT) est impliquée dans la région avec son projet de Développement du jeune enfant chez les minorités ethniques du Vietnam. Ce plan d’action consiste à « améliorer les conditions de vie des jeunes enfants de (0-8 ans) issus des minorités ethniques dans la province de Lao Cai »[4] Plus spécifiquement, l’OIT désire créer un «environnement physique, intellectuel et psychosocial favorable au bon développement du plein potentiel des jeunes, renforcer l’environnement institutionnel autour de la Petite Enfance, sensibiliser les autorités vietnamiennes […] et améliorer la compréhension et le respect des valeurs des minorités ethniques. »[5] Ce projet initié en 1997 et ayant comme finalité prévu en 2007 es considéré aujourd’hui comme un échec au plan de l’efficacité réelle du projet. Les conclusions de ce programme d’aide à la Petite Enfance ne se sont pas avérées très positives en ce qui concerne les répercussions réelles. Bien que quelques écoles aient été construites, ainsi que des centres récréatifs pour les jeunes, ils ne sont pas utilisés par la population. Car les mères ne peuvent pas les amènes à l’école, car elles doivent faire la cueillette des denrées alimentaires dans la forêt pour nourrir leur famille et dans la plupart des cas elles ont besoin de leurs enfants pour les aident. Les infrastructures mises en place sont ainsi une coquille vide, car on ne peut seulement venir en aide aux enfants sans changer les besoins (quête de nourriture, d’eau, de sécurité, etc.) de la vie quotidienne des hommes et des femmes des communautés ethniques de la province de Lao Cai. En bref, le projet de développement du jeune enfant chez les minorités ethniques du Vietnam comporte de bonnes intentions, mais sans un changement radical du mode de vie de ces peuples autochtones du Vietnam, le travail des ONG et OIG n’aura jamais un impact réel significatif.

Bibliographie

Gestion sociale et spatiale des biens publics et environnementaux. ANDES; Aménagement, développement, environnement, santé et sociétés-UMR 5185. En ligne. http://www.ades.cnrs.fr/spip.php?article248 (page consultée le 6 décembre 2009)

L’organisation internationale du travail. Site officiel de l’ONU. En ligne.  http://www.ilo.org/public/french/employment/skills/hrdr/init/vie_1.htm#7 (page consultée le 6 décembre 2009)

Michaud, Jean et Sarah Turner, « Tribulations d’un marché de la montagne du Nord-Vietnam », Études rurales 165-166 (2003), 53-80.

Noel, Julien, « Regard géographique sur les dimensions spatiales de l’altermondialisation halieutique », Norois, Presses universitaire de Rennes 211 (2009), 7-21.


[1] Noel, Julien, « Regard géographique sur les dimensions spatiales de l’altermondialisation halieutique », Norois, Presses universitaire de Rennes 211 (2009), 7-21.

[2] http://www.ades.cnrs.fr/spip.php?article248

[3] Michaud, Jean et Sarah Turner, « Tribulations d’un marché de la montagne du Nord-Vietnam », Études rurales 165-166 (2003), 53-80.

[4] http://www.ilo.org/public/french/employment/skills/hrdr/init/vie_1.htm#7

[5] idem

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