Entre crise et espoir de renouveau en Indonésie

Par Jarryd N’michi

L’Indonésie reste l’un des pays les plus touchés par la crise qui s’est emparée des marchés asiatiques à la fin des années 90. Jusqu’à lors, l’économie indonésienne ne connaissait aucun ou peu de déséquilibres de ses principaux agrégats économiques (épargne élevée, finances publiques équilibrées, inflation maîtrisée). Toutefois, à cause de sa fragilité politique son économie était très sensible aux moindres fluctuations des marchés internationaux. L’ampleur de la crise asiatique l’a profondément ébranlée et le pays a dû faire face à une crise sans précédent.

La situation indonésienne a été aggravée par le fait que plusieurs facteurs négatifs ont décuplé l’impact de la crise la rendant incontrôlable. Une très dure sécheresse a coïncidé avec la tourmente financière et le budget a été basé sur des prévisions très optimistes (notamment en prenant pour base un taux de change de 4 000 roupies pour un dollar, alors que le plafond de 10 000 roupies a été atteint momentanément peu de temps après). Les Indonésiens se ruèrent sur les marchés et supermarchés pour se débarrasser de leurs roupies dont le cours s’effondrait. En une semaine, les prix des produits alimentaires auraient augmenté de 25 %. Le chômage de masse a cru et les capitaux étrangers ont été retirés du pays.

Les lacunes du régime politique et institutionnel indonésien, pourtant connues, mais masquées par la dynamique de croissance qu’avait connue le pays, sont apparues au grand jour. Népotisme, fin de règne, opacité financière et politique, nervosité sociale : ces éléments y ont rendu plus aléatoires des mesures d’austérité. L’application des prescriptions du FMI a tardée et l’assistance du FMI en Indonésie n’a ni enrayé ni la chute de la Bourse ni celle de la monnaie. Les firmes indonésiennes doivent faire face à une dette extérieure d’un montant global de 150 milliards de dollars ce qui est considérable et semblait insurmontable. Les rumeurs se mêlaient aux faits et entretenaient l’inquiétude. La possibilité d’un moratoire de la dette extérieure n’était plus entièrement exclue.

La question longtemps taboue d’une transition politique refit surface. Âgé de soixante-seize ans et au pouvoir depuis 1966, le président Suharto n’avait toujours pas déclaré formellement sa candidature à un septième mandat. La relative inertie affichée par le pouvoir était devenue une partie du problème. L’autorité du « père du développement » indonésien était minée par la crise. Ce dernier quitta la présidence du pays le 21 mai 1998.

À la fin de 1998, selon des données du gouvernement, 50% de la population vivait en dessous du seuil de pauvreté, estimé en Indonésie à 0,55 $ par jour pour les villes et 0,40 $ pour les campagnes. La Banque mondiale estime que les salaires nets ont chuté de 40 à 60% la première année de la crise alors que le taux de pauvreté montait en flèche. Le salaire minimum indonésien équivalait à 6.3 kilos de riz en janvier 1997 ; en juin 1998 il n’équivalait plus qu’à 2.6 kilos. Aux premiers stades de la crise, la chute des salaires fut par ailleurs exacerbée par la hausse des prix. Entre août 1997 et janvier 1998, les consommateurs connurent des augmentations extrêmement importantes des prix de l’électricité (200%), du lait (50%) et du riz (36%). En 2000 la croissance du PIB n’était que de 3% contrairement aux  8,2% d’avant crise.

Principalement grâce au FMI, l’Indonésie a pu quelque peu se relever de la crise. Toutefois, un grand travail reste à faire afin de pouvoir attirer beaucoup plus d’investissements étrangers. Dans un contexte international mondialisé et caractérisé notamment par l’intensification de flux de capitaux, le manque de confiance de la part des investisseurs plombe encore l’économie indonésienne.

Références

Jomo K. Sundaram. « La crise des tigres asiatiques et ses incidences mondiales : Une analyse au départ de l’Asie. » Tigres du Sud : Crise d’un modèle ou contradictions de l’économie capitaliste. Louvain-la-Neuve : L’Harmattan, 1999 : pp. 25-68.

John Evans. Impact social de la crise asiatique. Le  Monde Diplomatique, mai 1998

Amandine Giraud. La crise indonésienne et le rôle du FMI. En ligne.(page consultée le 20 juin 2008)

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